Burger Kill
3.7
Burger Kill

Film DTV (direct-to-video) de Brendan Cowles et Shane Kuhn (2007)

Tout aurait pu être bien sympathique. Pas transcendental, mais sympathique. Un petit slasher indépendant, un psychopathe au masque fun, une goutte de joyeuse subversion, le tout servi dans la collection DVD mensuelle de Mad Movies: pourquoi dire non?

Pourtant, comme le dit parfois une sage et honnête travailleuse du Bois de Boulogne: « Parfois, il vaut mieux savoir refuser » (prononcez « refuséaouche » avec l'accent brésilien).

Ca démarre pauvrement, avec de fausses racailles qui, en plus de mal jouer, sont affublés de dialogues aussi creux que leurs casquettes. Les djeunz dans le vent vont très vite être les cibles du traditionnel zigouillage introductif, étape incontournable du slasher qui ne veut prétendre à aucune originalité.

Pendant le générique, on se prend alors à espérer que la dégaine de ces loubards du dimanche annonce une série B parodique qui, sans atteindre le génie d'un Edgar Wright, saura nous faire passer un moment relativement fun, ne serait-ce que pour les moins exigeants d'entre nous.

Mais la scène qui suit nous ramène à la triste réalité, puisque nous découvrons un teen-movie infect, fait d'héritages des Souviens-Toi L'Eté Dernier ou des plus moches produits signés David De Coteau.

Que raconte donc Burger Kill, alias Drive Thru en VO? Une attaque de hamburgers tueurs? On aurait largement préféré, même si ce genre de concept est éculé depuis longtemps... Ici, rien de tout cela, juste Mackenzie, une petite rockeuse sainte nitouche (Leighton Meester) qui veut attendre ses dix-huit ans pour consommer son petit copain (Nicholas D'Agosto, vu dans Heroes), et qui accessoirement doit échapper à un méchant tueur grimé comme la mascotte-clown d'une grande chaine de fast-foods.

Bien évidemment, la jeune femme est végétarienne, ce qui nous permet un petit passage formidablement bien introduit de morale sur nos amis les animaux, qui n'aurait pas été malvenu si tous les personnages n'étaient pas aussi stéréotypés.
D'ailleurs, Shane Kuhn et Brendon Cowles ne font pas dans la demi-mesure en matière de caricatures, et épurent dans leur film à la fois tous les clichés des teen-movies contemporains, ainsi que tous ceux des slashers. Ca en fait quelques-uns, croyez-moi...

Tout y est: beuveries lycéennes, ouijas, bédos (l'action se passe même à Orange County, le berceau du pop-punk dit californien, bande-son attitrée des American Pie et consorts), mais aussi une multitude de références à Scream (la forme du masque de Horny, le parallèle Mackenzie/Sidney, toutes deux se refusant à leurs petits amis), à Halloween, ainsi qu'à d'autres oeuvres fondatrices du genre, comme Massacre A La Tronçonneuse.

L'ennui, c'est qu'à aucun moment les créateurs ne semblent assumer leur recours facile au recopiage, puisqu'au lieu de rebondir de manière amusante sur leurs emprunts parfois honteux, ils en rajoutent encore une couche dans les blagues lourdingues: un prout par ci, un gros flic incompétent par là. Le but premier de Kuhn et Cowles ne semble pas de faire rire une poignée d'entre nous, mais bien de rester en bas de l'échelle pour s'assurer que la totalité du public comprenne.

De plus, le fait d'avoir choisi d'étaler de pareilles boutades pourries au détriment d'une légère recherche d'originalité, résume parfaitement la logique sur laquelle est bâti le film. En effet, le principal argument de vente du film est sa soi-disant subversion (beaucoup l'ont présenté en temps que tel), sur un sujet qui vient de faire grand bruit aux Etats-Unis notamment à travers deux longs-métrages, Supersize Me et Fast Food Nation. Le film veut ainsi donner l'impression d'une charge fun à l'encontre de l'univers Mc Donaldesque, mais il ne réussit jamais à aborder le sujet de front. Le tueur, avec son costume tout juste sorti du Gay&Horror Pride Circus, parvient seulement à incarner une mascotte plus sympathique pour nous, fans de l'horreur, que le Ronald original.

C'est tout, me direz-vous? En ce qui concerne la partie politiquement engagée du film, rien de plus à déguster en effet, mis à part une ou deux répliques anti-républicanes énoncées comme des blagues, et la présence de Morgan « Supersize Me » Spurlock, dans un rôle aussi faussement impertinent que ridicule. L'intrigue elle-même aurait pu cacher une petite allégorie sur côté néfaste du fast-food, elle ne réussit qu'à noyer le poisson dans une histoire de secret de famille digne des meilleures sagas de l'été diffusées sur TF1.

En clair, mettez vos neurones sur « off », puisque l'ensemble vise plutôt le temps de cerveau disponiple (comme le font les teens movies en général: « des petits films funs ou on se prend pas la tete »). L'avenir du politiquement incorrect, quoi...

En plus de nous avoir arnaqué avec le fond du long-métrage, on réalise bien vite que Kuhn et Cowles n'ont aucune idée de comment instaurer la peur dans leur oeuvre. Les deux scénaristes se démènent comme des fous pour essayer de convaincre le spectateur de la menace, à coups de multiples éléments paranormaux, tous aussi malvenus qu'invraisemblables, et qui ne servent qu'a combler le vide intersidéral des dialogues tout en prétendant distiller des signes quand a l'identité de la prochaine victime. Ce dernier aspect aurait pu être réussi s'il avait été exploité a fond, or aucun doute ne nous est jamais permis sur le sujet, comme si, toujours dans la logique du teen movie décérébré, le duo créateur s'interdisait définitivement de nous faire réfléchir.

En plus d'être un slasher où il n'y a que le joli minois de son actrice principale à sauver, ainsi qu'un long-métrage qui peine à parodier efficacement l'implantation réelle du fast-food dans notre culture (Kevin Smith s'en chargeait mille fois mieux dans Dogma puis Clerks II), Burger Kill est une dénonciation totalement innofensive de la malbouffe et du conservatisme américain, qui ne réussit qu'à provoquer gentiment, pour au final caresser dans le sens du poil l'ensemble de son public.

Ce qui aurait pu aisément être une pantalonnade, certes réservée aux fanboys mais appréciable au demeurant, se révèle être dominée par un désir purement commercial de ratisser large. Les auteurs auront donc très mal calculé leur coup, puisque ni les initiés, ni les autres n'y trouveront leur compte.

Et franchement, vu comme ça, c'est bien fait pour leur gueule...


(Nov. 2008)

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XimAxinn
1
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le 3 nov. 2011

Critique lue 561 fois

XimAxinn

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