J'arrive un peu en retard pour complimenter cette œuvre. Malgré une activité intense point de vue sorties ciné en 2023, j'étais passé à côté de ce Chien de la casse lors de sa sortie en salles. Oui, honte sur moi... Il faut bien dire qu'il m'a fallu d'abord visionner Yannick de Quentin Dupieux pour me rendre compte qu'une véritable révélation avait débarqué en fanfare dans le paysage du septième art français et qu'elle s'appelle Raphaël Quenard.


Bref, on suit deux amis paumés dans une commune du sud de la France, Le Pouget, l'un mince et grand, l'autre petit et assez tassé, le premier, Mirales, extraverti et avec un sens de la tchatche intarissable, le second, Dog, introverti et silencieux. Mirales a la fâcheuse tendance à ne pas manquer une occasion de rabaisser son ami, Dog a la fâcheuse tendance à toujours se laisser faire...

Rien d'excitant, a priori, à suivre les pas de deux personnalités qui ne parviennent pas à avoir le moindre but dans leur existence morose (la réalisation, d'ailleurs, la met admirablement en scène, soit à travers des ruelles pierreuses et incurvées pour signifier l'enfermement des caractères, soit, au contraire, en plan large, dans des cadres naturels, secs et rugueux, semblant sans limites, pour signifier leur isolement, soit par des scènes qui se répètent, notamment par l'utilisation qui est faite des personnages secondaires, pour la plupart eux aussi se bloquant dans un quotidien sans fin !).


Et il y a aussi la promesse de s'agacer souvent devant la méchanceté de l'un (qui va de plus en plus s'afficher par le biais d'une jalousie, mal dissimulée, lorsque son copain, contre toute attente, réussit à pécho une meuf !) et la passivité de l'autre. C'est le cas, car je ne compte même plus le nombre de fois lors desquels j'ai eu envie de m'énerver contre eux. Pourtant, la force de l'ensemble réussit l'exploit de les rendre attachants en dépit de tout. On n'a pas envie de les lâcher une seule seconde.


En effet, si l'agencement du récit est somme toute prévisible, les personnages sont superbement écrits, avec des nuances, des contradictions, des complexités... des êtres humains, quoi. Il y a des détails subtils qui montrent, nonobstant la frustration de l'un et la soumission de l'autre, que c'est une histoire d'amitié authentique, intense, et non pas (du moins uniquement !) de domination, qu'ils sont tout l'un pour l'autre. Ce qui culmine lors du dernier quart.


Et il y a surtout des acteurs formidables pour les incarner. Anthony Bajon et Raphaël Quenard frappent par leur extrême justesse. Quenard, en particulier, défonce tout avec flamboyance, son charisme de gros malade, sa personnalité atypique, sa manière de parler unique, sa faconde savoureuse. L'année 2023 a été celle de Raphaël Quenard. Et merci au réalisateur Jean-Baptiste Durand (dont c'est le premier long-métrage… chapeau l'artiste... hâte de voir la suite d'une carrière prometteuse !) d'avoir compris que cet acteur a très largement les épaules pour tenir le rôle principal d'un film.

Plume231
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le 11 janv. 2024

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