Climax a été mon premier Gaspar Noé. Autant dire qu'à l'époque je n'avais pas le recul nécessaire pour apprécier ce réalisateur à sa juste valeur. Je cherchais des explications là où il y en avait pas (ou très peu) et j'éprouvais de l'aversion pour ses scènes volontairement subversives.
2 ans plus tard, j'ai retenté le coup et j'en suis sorti surpris mais pas vraiment dans le bon sens du terme.
En effet, notons que le premier visionnage m'a laissé des souvenirs choques indélébiles, mais maintenant que je l'ai revu l'impact est moins important, surement car je savais à quoi m'attendre et parce que je suis plus familier avec ce cinéma.
Alors qu'est-ce que raconte ce sublime Climax ? Eh bien une histoire réelle, celle où des danseurs boivent ce qui semble être de l'alcool avant de rentrer dans une folie démoniaque.
Ce qui est génial dans ce métrage, ce n'est pas le scénario, non, on s'en fout de ça ! Au cinéma le plus important n'est pas le scénario mais la mise en scène, le plan, le cadre, l'esthétisme et c'est sur tout ces points que Noé va jouer pour retranscrire à l'écran une folie des plus démentielles qu'on ait pu voir au cinéma.
Le film démarre et on nous présente plusieurs interviews. On remarque déjà un certain cosmopoltisme, une pluralité ethnique dans ce groupe de danseur français. Des interviews montrés à travers une télé, on peut voir sur les côtés toutes les références sur lesquels ce petit coquin de Noé se paluche quotidiennement et il a bien raison le bougre, ainsi on peut voir l'excellentissime Possession d'Andrzej Zulawski, le crasseux Schizophrenia de Gerald Kargl ou encore l'envoutant Suspiria de Dario Argento et bien d'autre ...
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Après ces scènes de présentation, nous avons une performance fulgurante. Plan séquence de presque 5 minutes sur le groupe de danseur faisant une prestation exceptionnelle !
Les danseurs s'extasient totalement, ils se déchainent dans leurs mouvements de danses hyper modernes. Le film porte bien son nom.
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Lorsque cette prestation prend fin, le plan séquence ne s'interrompt pas, la caméra tourne toujours pendant encore 5 minutes où nos personnages partent se reposer ou s'entrainer en buvant un cocktail rougeâtre. Passé les 5 minutes, Noé enchaine sur de nombreux plans fixes dans lesquels il y a toujours deux personnages qui discutent sur des sujets peu matures et centrés sur le sexe. Au départ, tout le monde ricane dans cette ambiance festif puis progressivement les discussions et relations vont se détériorer. Ça commence par des regards fuyants, personnages qui n'écoutent pas son interlocuteur, réponses absurdes puis on passe à un niveau supérieur ...
Pour marquer le moment, Noé décide de faire un autre plan séquence sauf que cette fois bien plus conséquent ! 35 minutes (voire plus) où nos personnages, détruits par le contenu de la boisson, errent dans ce huis-clos représentant l'enfer. Ce plan séquence permet d'insérer le spectateur dans un délire, une folie totalement stupéfiante, ça permet d'accroitre la sensation horrifique due au réalisme qui en découle. Le spectateur se voit plonger avec incompréhension dans une démence frôlant quasi le ridicule tant les personnages surjouent. Mais paradoxalement ça marche ! On y croit ! D'autant plus que Noé s'amuse avec les jeux de lumières, je pense notamment à certaines scènes avec Sofia Boutella qui est totalement bluffante.
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Tout le monde essaye d'improviser du mieux qu'ils peuvent, en revanche Noé, lui, totalement décontracté, se permet de faire des pirouettes avec sa caméra pour appuyer l'aspect chaotique qui parcourt le lieu pour terminer sur un final infernal ou plus rien n'a de sens, infanticide (accidentel), inceste, overdoses, coups fatales ...
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Une France cosmopolite voué à se détruire.
Vivre est une impossibilité collective
Malheureusement, il s'avère que Climax n'est pas mon préféré du cinéaste. Je trouve que sa manière d'insérer les crédits est un peu trop arbitraire ce qui entache un peu son film. Et j'aurais aimé que Noé travaille davantage l'aspect esthétique en appuyant plus certaines couleurs (notamment le vert qui est assez faible à mon goût) ou juste en rajouter d'autre. Et j'ai cette sensation que Noé s'éloigne un peu de son style en étant dans la performance technique, ça marche du feu de Dieu, certes, mais on le reconnait un peu moins j'ai l'impression. Les plans séquences dans ce film, bien qu'époustouflant, lui font un peu défaut ...