D'aucun diront que Dashcam, nouveau trip lowcost et foundfootage de Rob Savage est un ramassis de commentaires twitter et facebook par des "connards" de complotistes qui commentent l'actualité Ouest France et Mediapart. Alors attention: pris en ce sens, Dashcam peut être un film qui enfonce des portes, agace au plus haut point, ne serait-ce que par son aspect dépréciatif général (qualité de l'image au rabais, absence de mise en scène classique, personnage principal extrêment irritant).

Et pourtant, selon moi, il n'en est rien.

Ce que le film propose, c'est avant tout de prendre tout se qui passe, tout ce qui peut constituer "l'air du temps" (le covid, les masques, trump, le conspirationisme rampant sur internet, le mouvement Black live matters, les armes à feu, le veganisme, le feminisme, etc) et d'en faire à chaque fois un argument fantastique. Systématiquement, le film puise dans ce portrait d'une jeune américaine marginale pour prendre tout ce qui constitue son contemporain et pour le transformer en diesel cinématographique.

Par exemple, le masque de protection anti-covid qui devient un élément fantastique en couvrant d'abord le visage de cette vieille dame, la rendant à la fois banale et mystérieuse, sentiment d'inquiétante étrangeté, puis le masque devient ensanglanté et fait basculer cette étrangeté dans l'horreur.

Alors d'accord, le film est opportuniste, mais il ne se prend jamais au sérieux comme avait pu le faire récemment le reboot/remake/suite de Candyman.

Candyman version 2021, superbe film au demeurant, basculait in fine dans un opportunisme prétentieux. Presque un film à message.

Dashcam, lui, reste avant tout une bonne grosse farce, générique de fin à l'appuie. Et l'horreur, comme me le disait très justement un ami, c'est d'abord du rire.

Dashcam, c'est tout, sauf un film politique. Bien que la protagoniste principale soit caractérisé comme une égérie pro-Trump à outrance, conspirationnisme et complotisme à l'appuie, le film n'en fait jamais rien, a part peut être rire ou s'en moquer. Le seul véritable complot du film, c'est pas celui des gouvernements à l'ère Covid, c'est surtout celui du puzzle finale, ou le film prend une tournure cryptique, où l'on essaye de rattacher les wagons, où les poncif du cinéma de genre s'enchaînent sans soucis de cohérence, véritable name-dropping d'une production type BlumHouse. Tout y est. Le complot, dans le film, c'est du niveau "tonton secte du soleil en vacances ches les Lovecraft". C'est huitième degrés.

En opposant systématiquement un argument fantastique ou d'horreur à ce qui peut faire vrai, le film tourne à la dérision. Littéralement.

Alors oui, le film peut paraître hystérique et agaçant, je peux tout a fait le comprendre et l'envisager. Mais trés sincèrement, on aurait tord de bouder son plaisir. Il faut s'accrocher quand même car Dashcam est franchement hardcore, presque plus sadique que son voisin du moment, The Sadness. Aussi bien graphiquement que scénaristiquement. Mais cela montre à quel point il y a quelquechose de l'ordre d'un "cinéma de l'après", véritablement en phase avec son temps. Tout se que Dashcam passe à la moulinette (le titre du film est tout un programme), c'est du contemporain et rien d'autre. Mais sur le mode de la farce. Du grand guignol quoi.

Au final, Dashcam est bien plus punk et irrévérencieux que The Sadness. Et si le film peut passer pour un film de petit malin, et bien je préfère encore aller mater un film de petit malin comme celui-ci plutôt qu'un film qui va se perdre dans son sérieux et dans la posture.

Et puis je sais pas, si on prend Get Out récemment, que j'aime beeaucoup aussi, et qui a fait l'unanimité ches les cinéphiles de cinéma de genre, et bien je suis désolé mais dashcam ca n'est pas plus un film de petit malin que celui de Jordan Peel. Les moyens et la forme changent mais ce que l'on croit être un grand film démocrate sur des préoccupations de société (du genre cinema d'afro-américain contre les suprémacistes blancs) ce n'est jamais qu'un argumentaire fantastique avec pour seul commentaire que de mettre un coup de fusil dans la gueule de la meuf à la fin. C'est un geste libérateur, pulsionnel, presque gratuit. Peu importe alors de quel côté se situe le film. Get out ou Dashcam ne sont pas plus politique que, je sais pas moi, Evil Dead par exemple.

Complétement barré et what the fuck, Dashcam est un véritable grand huit, comme en témoigne ce passage dans la fête forraine. Film court mais trés dense, l'énergie qu'il met dans son jusqu'au boutisme fini par épuiser toute sémantique du genre, à l'image du géniallissime PontyPool.

Le générique de fin, à cet égard, et un véritable bijou, film dans le film, et qui convoque littérallement cet épuisement.

Comme un mirroir de notre époque, la machine Dashcam s'emballe et, en surchauffe et en bout de course, finit dans le fossé.

La morale c'est d'aller tous nous faire foutre.

Un comble pour les cinéphiles déviant comme nous.

Avec dashcam, mieux vaut en rire qu'en pleurer. Vu la lourdeur de notre époque, on aurait vraiment tord de s'en priver.

lien vers ma chaîne youtube: https://youtu.be/bd6VBV2U7tU

Ravages_blog
5
Écrit par

Créée

le 9 juin 2022

Critique lue 803 fois

9 j'aime

2 commentaires

Ravages blog

Écrit par

Critique lue 803 fois

9
2

D'autres avis sur Dashcam

Dashcam
Le-Roy-du-Bis
5

Blow me Annie

Pour réussir dans la vie, il ne suffit plus de faire des études ou d’avoir du talent, il s’agit surtout de savoir fait le buzz médiatique au bon moment. C’est un art, et ça ne se provoque pas...

le 27 juil. 2023

2 j'aime

3

Dashcam
Genji-Takaya391
8

Critique de Dashcam par Genji-Takaya391

Dashcam de rob savage c'est celui qui a dernièrement réalisé le croque-mitaine, ici on et sur une œuvre plus indépendante et donc avec moins de budget, où l'on suit le personnage de annie hardy...

le 10 juil. 2023

1 j'aime

Dashcam
vincent607
2

film pour epileptique

Une horreur, ça bouge dans tous les sens, "l'héroine" est insupportable et on en a vite marre des 40 jumpscares tous pétés

le 14 avr. 2023

1 j'aime

Du même critique

Gaga: Five Foot Two
Ravages_blog
1

06-03-18 Five feet Two

Au moment de visionner Five feet two, le documentaire coproduit par Netflix et la chanteuse Lady Gaga sur elle-même, hasard de mon calendrier cinéphile, je viens juste de voir le film coréen A...

le 20 mars 2018

4 j'aime

JFK
Ravages_blog
3

#4 J'ai vu... JFK (1991-Oliver Stone)

Oliver Stone avait dit, au moment des attentats du 11 septembre, qu'il fallait qu'Hollywood s'empare immédiatement du sujet, de façon frontale et directe. Avec la mort de Kenney, on a compris que...

le 26 sept. 2017

3 j'aime

1

The Eyes of My Mother
Ravages_blog
1

15-01-17 The eyes of my mother

En deux plans, l'introduction de The Eyes of my mother met la barre haute: plan fixe mais "en mouvement", entrée en matière féroce du son, durée du plan proportionnelle à la naissance d'une intrigue,...

le 9 sept. 2017

3 j'aime

4