Madeleine Pastor (Rebecca Marder), jeune et brillante diplômée de Sciences Po Lyon, se présente à l’ENA. Pendant l’été 2019, elle se prépare à l’oral dans la maison que les parents d’Antoine (Benjamin Lavernhe) louent en Corse.

Alors qu’ils sont en balade sur une petite route de Corse, Antoine qui conduit, s’engueule au téléphone avec son père et, énervé, veut doubler un pick-up qui, selon lui, roule trop lentement. En le croisant, il fait au conducteur, un doigt d’honneur.

Le conducteur les double et s’arrête devant eux. Le ton monte et, voyant Antoine menacé, Madeleine se saisit de la carabine de leur agresseur, tire, le blessant mortellement. Affolés, après avoir abandonné le corps et caché l’arme dans la forêt, les deux jeunes gens gardent le silence sur ce qui s’est passé. Rongés par la culpabilité, tous deux ratent leur entrée à l’ENA et se séparent.

Malgré cet échec, Madeleine, repérée pour ses qualités par la députée Gabrielle Dervaz (Emmanuelle Bercot) est embauchée comme attachée parlementaire alors qu’Antoine, pistonné par son père, entre au cabinet de Peltier, le ministre du travail, chacun travaillant dans un camp opposé.

Mais l’enquête de police se resserre autour des deux coupables et, pour se venger d’avoir été repoussé par Madeleine, Antoine, et pour se dédouaner, la dénonce. Madeleine, aussitôt incarcérée, est immédiatement licenciée par sa députée qui vient d’être nommée ministre. De la prison, elle reste néanmoins « professionnelle », plus obnubilée par le projet de loi progressiste sur lequel elle a travaillé que sur sa propre défense.

Mais lors de la reconstitution sur les lieux du drame, ouvrant enfin les yeux sur la lâcheté de son ex-amant, elle le charge Antoine qui, malgré toutes les protections dont il dispose, se retrouvera dans la position inconfortable d’accusé.

Mon opinion

Avec ce film, on n’est pas dans Dickens, dont j’ai commenté deux des adaptations qui en ont été faites, que ce soit celle très libre mais que j’ai personnellement trouvée très réussie d’Alfonso Cuaron avec Ethan Hawke et Gwyneth Paltrow (1998), ou celle, fidèle au texte, de Brian Kirk, avec Douglas Booth (2011). De grandes espérances de Sylvain Desclous, dont ce n’est que le 3ème long métrage, est très éloigné de l’œuvre originale mais c’est un excellent thriller politique qui, bien que tourné en 2019, résonne de manière aiguë avec notre actualité : en découvrant les personnages, on ne peut s’empêcher de penser à certains hommes (ou femmes) politiques venus de la gauche qui ont trahi leurs idées et leur camp pour un poste (même éphémère) de ministre. Rebecca Marder, que j’avais découverte dans le rôle d’avocate dans le génial film de François Ozon, Mon crime, est parfaite en ambitieuse élève de l’ENA qui est bien la seule à rester fidèle à ses idées, même si l’on comprend, lorsqu’elle reçoit le stylo Bic quatre-couleurs, qu’elle a toujours la confiance de sa patronne. Bien entendu, ne comprendront cette allusion que ceux qui auront vu le film…

Roland Comte

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