Au fond, il y a deux sortes de films de Tavernier.
Les grands films, indiscutables, absolus, magnifiques (que la fête commence, la vie et rien d'autre, le juge et l'assassin, capitaine Conan, Coup de torchon, un dimanche à la campagne... oui, j'aime bien Bertrand) et puis il y a les films fragiles.

Ces derniers se caractérisent par le sentiment ambivalent que provoque leur vision, sentiment qui vient de ce mélange paradoxal d'éléments hyper-réalistes mélangés à d'autres, parfaitement artificiels et construits.
Pour essayer d'illustrer cette précédente phrase un poil absconse, je l'admets bien volontiers, je dirais qu'il arrive régulièrement qu'on assiste à des moment qui sonnent terriblement juste, avec un aspect très très terre-à-terre et quotidien, au milieu de scènes à l'ambition manifestement plus large et du coup beaucoup moins naturelles.
Une forme d'hyper-réalisme surréaliste, en quelque sorte.
Le résultat n'est pas mauvais, mais donne à l'ensemble un aspect plus délicat, instable.
Il se dégage des films cette catégorie (la mort en direct, une semaine de vacances, autour de minuit, daddy nostalgie, Holy Lola...) un parfum d'oeuvre beaucoup plus vulnérable mais qui inspire une grande tendresse.

Des enfants gâtés s'inscrit complètement dans cette lignée.
C'est à la fois léger, plaisant et totalement dispensable. En toute sincérité, si on m'avait donné à voir ce film sans me dire qui en était l'auteur, je ne suis pas sûr que j'aurai autant apprécié. Alors oui, il y a quelques très belles scènes, de très jolis moments. Oui. Mais encore ?
Quelques allusions intéressantes sur la montée du chômage, la situation des étrangers, sur la lutte qu'il a fallu mené, en son temps, pour l'élaboration de bail honnêtes, les affres de la création chez un cinéaste... Très bien.

Un Tavernier mineur, donc, et qui (il n'y a pas toujours que des injustices dans le monde du cinématographe) n'a pas rencontré son public en son temps.
La quasi totalité masculine du théâtre du Splendide apparait à l'écran, Piccoli est comme d'habitude (excellent) en avatar cinématographique de Tavernier (qui s'amuse a donner à ce metteur en scène fictif un dernier film qui est réellement de lui, "la mort en direct"), Christine Pascal est fort jolie et naturelle. On notera qu'elle a participé à l'élaboration du scénario.
Au fond, il n'y a que Michel Aumont qui surjoue un poil.
Au rayon bizarrerie, guetter l'apparition hyper fugace d'Isabelle Huppert (en secrétaire improbable d'un non moins peu imaginable Daniel Toscan du Plantier en député parisien).

La musique de Philippe Sarde est comme souvent, très réussie.
Ah oui, tiens ! A ne pas rater: le générique de début, de Caussimon, chanté par Rochefort et Marielle, dont les paroles sont en complètes contradictions avec les images ! Superbe !

Bref, à réserver au fans de Tavernier ou au adorateurs du cinéma français avide de curiosités.

PS: si quelqu'un peut m'expliquer le titre... (je n'ai pas eu le courage d'écouter les commentaires audio, pourtant toujours si agréables, de Bertrand Tavernier)
guyness
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le 16 août 2011

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guyness

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