Un père et son fils se baladent sur une route visiblement peu fréquentée. Où vont-ils? Pourquoi? À quelle époque sommes-nous? En quel lieu? Toutes ces questions ne trouveront de réponses (souvent partielles) que plus loin dans l'histoire, et elles ne sont finalement que de peu d'importance.


Car Pasolini ne se sert du cheminement des deux compagnons (auxquels viendra bientôt s'ajouter un troisième larron, en la personne d'un corbeau bavard et philosophe) que pour scruter la marche de l'humanité.
Au fil des rencontres (des pauvres, des jeunes, des notables ou une prostituée), des discussions (le titre du film vient d'une longue et jolie parabole racontée par l'oiseau parlant) et des évènements (un suicide, une danse improvisée, une naissance impromptue, une fuite effrénée à travers champs), le spectateur sera ainsi amené à se questionner sur la vie, la mort, la foi, le plaisir, le progrès, la violence et l'immuabilité des rapports sociaux et économiques, l'impact des idéologies ou des évangiles sur le comportement humain.


Programme chargé donc, et l'on sait bien qu'ambition ne veut pas dire réussite. Mais, loin d'être ennuyant, obscur ou prétentieux, le film m'a emporté.
Par la beauté de la photographie et le rythme entêtant de la musique de Morriconne, d'abord.
Mais surtout par le regard du cinéaste, lucide, désenchanté et pessimiste, certes, mais surtout léger, plein d'esprit, de tendre mépris, de poésie, et d'humour. De beaucoup d'humour. À tel point que je me suis souvent demandé si je regardais une comédie ou un essai artistique et philosophique. Au final, sans doute un peu des deux (comme une autre œuvre que j'adore, à savoir le Septième Sceau), et c'est ce qui constitue à mon goût la plus grande force du film, comme le montre admirablement son délicieux (à plus d'un titre) dénouement.


ps : je préfère avertir tout de suite que la profusion de symboles, la bizarrerie occasionnelle de la réalisation (accélérations façon slapstick etc.), le jeu outrancier et les gueules pas possibles des interprètes principaux, et en général l'atmosphère particulière sont susceptibles de rebuter nombre de personnes qui ne verront dans cette bande qu'un objet grotesque, ridicule ou abscons.
Je suis désolé de dire que je ne pourrais leur rétorquer qu'un simple "tant pis pour vous".

Kalian
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le 22 juin 2011

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Kalian

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