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Le biopic est un genre qui peine à évoluer. Le plus vieux film du genre que j'ai vu est le Lincoln de Griffith de 1930, hagiographie typique qui commence par la naissance du président et s'achève à sa mort. Entre temps, il faut remplir avec ce qu'on trouve. Quelques années plus tard, William Dieterle s'en sortait un peu mieux avec La Vie d'Emile Zola qui s'intéressait principalement à l'affaire Dreyfus. Le film avait au moins l'intelligence d'avoir trouvé un axe, et de ne pas s'être perdu dans la masse d'informations existantes concernant l'écrivain. Une vingtaine d'années plus tard, Vincente Minnelli réalisait un biopic honnête, romantique et intelligemment construit du peintre Vincent Van Gogh. Le troisième millénaire voit le genre inonder les écrans avec tous ces films inspirés d'une histoire vraie ou racontant la vie d'un illustre personnage. Le biopic ne peut pas se permettre d'être un miroir parfait de la biographie écrite. Quand on lit une bio, on peut s'attendre, légitimement, à dévorer une somme d'informations allant de l'anecdote anecdotique au développement plus large d'un aspect de la vie ou de la personnalité du personnage. Mais le biopic raconte une histoire, il doit faire le tri dans les informations collectées. On pourrait faire des dizaines de films sur le dessinateur John Callahan, avec des axes différents. Donc quand on projette de faire un biopic sur le mec, il faudrait se demander ce qui nous intéresse de raconter, et d'abandonner des aspects de la vie et du personnage qu'on choisit comme héros.
Gus van Sant l'avait justement compris avec son film sur Kurt Cobain, qui raconte ses derniers jours, ou avec son biopic plus classique sur Harvey Milk qui se concentre sur son activisme. Dans Don't Worry... une fois qu'on a compris de quoi parle le film, on peut se demander : pourquoi nous parler de ses dessins, pourquoi nous parler de sa relation amoureuse ? En quoi ça nourrie le personnage qui nous est présenté ?
Le genre du biopic donne naissance aux scénarios les plus incohérents possible. Oubliez que vous voyez un biopic et vous vous demanderez :
Mais pourquoi il se met à dessiner tout d'un coup ? Il dessinait avant ça ? Il aime le dessin au moins ? Il a des références, des artistes qui l'ont inspiré ?
Pourquoi fait-il de la satire ? A aucun moment on le voit parler politique, social etc avec ses amis, alors pourquoi quand il se met à dessiner il devient subversif ?
Il entame une relation avec une femme, mais pourquoi ? Qu'est-ce qu'il aime chez elle ? Qu'est-ce qu'elle aime chez lui ? Tout simplement. Aucun indice concernant ces deux questions simples, Rooney Mara est réduite non seulement à un personnage subalterne mais en plus on ne se demande à aucun moment ce qui lui plait chez John, c'est pris pour acquis.
Ce qui est développé dans ce film c'est sa relation avec Jonah Hill et avec sa mère et lui-même. Pourquoi ne pas accepter que c'est de ça dont on veut parler ? Accepter qu'on ne connaîtra jamais sa mère, accepter qu'on va devoir vivre en fauteuil roulant toute sa vie, s'accepter. C'aurait été suffisant. Le reste, vous le trouvez sur wikipédia. Le fait qu'il dessine, qu'il se moque de l'Amérique, qu'il sorte avec cette femme dont on ne sait rien, ça vient de nul part, aucune justification, on en parle parce que c'est biopic et qu'on se permet de mettre des éléments biographiques un peu partout.

Créée

le 17 mars 2019

Critique lue 157 fois

Gregor  Samsa

Écrit par

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