Dracula
3.2
Dracula

Film de Dario Argento (2012)

J'aurais aimé pouvoir dire que le Dracula du maitre Dario Argento était bon, contrairement à tout ce qui a été écrit à son sujet.

Malheureusement, il faut bien reconnaitre que tout cela ne casse pas trois pattes à un canard.

L'image est plate (un comble, en quelque sorte, pour un film en 3D), la mise en scène fade, façon téléfilm ; j'ai souvent eu l'impression que tout était filmé de trop loin, avec des plans trop larges, peut-être pour valoriser le relief ? C'est quand même ballot de la part d'un metteur en scène qui à la grande époque a su nous gâter avec des gros plans percutants et une image inventive, sans avoir besoin d'effets spéciaux numériques ou de 3D.
Là, franchement, l'image est moche et fadasse, quasiment de bout en bout.

Les effets spéciaux, au passage, ne sont guère terribles ...si certains sont corrects, d'autres font franchement toc, comme notamment les désintégrations des vampires (la Hammer faisait bien mieux sans numérique ...) Bon, franchement, les effets spéciaux , ce n'est pas le plus embêtant à mes yeux, même si des productions fauchées arrivent à faire bien mieux ... et même si en son temps, Argento a su faire infiniment plus percutant avec une technique old school. Même les représentations du sang sont foireuses ; la scène où Dracu s'entaille le poignet pour payer un coup à Tania bat des records d'absence de crédibilité. Un comble pour un réalisateur capable de filerle frisson avec une simple flaque de liquide rouge ... avant (Suspiria, Profondo Rosso).

Petit ajout : à y repenser, il y a un autre effet normal bien crapoteux, celui où un personnage prend feu. On n'y croit pas une seconde, et en plus c'est moche. Franchement, on ne change pas de discours : c'était mieux avant. Dans Profondo Rosso, la maison qui brûle était certes visiblement une maquette (et heureusement), mais c'était bien plus crédible que ça. Franchement, il n'y avait pas moyen de faire mieux, éventuellement avec des effets spéciaux old school ? Et de toute façon cette scène n'existe pas dans le roman ... un bon pieu à l'ancienne, à la place, on sait faire, non ?

La continuité du film enfin, me pose un peu problème. L'histoire est simple, mais par moment elle semble décousue, peut-être parce que la mise en scène et le manque de direction des acteurs ne permet pas de faire le lien. Mina se retrouve (après la scène de la mante religieuse, j'y reviendrai) dans le château de Dracu, et ça papote, tranquille, et v'là qu'ça tombe amoureuse du vilain, alors que 3 minutes avant, le doc lui expliquait le comte, c'était une grosse crevure sanguinaire. On y croit. Les dialogues en eux-mêmes sont quelquefois laborieux, comme si on essayait, à grands coups de rames, de redonner justement un peu de continuité à tout ça.

Dois-je aborder la scène de la mante religieuse ? Quelle idée enfin ... Dario, faut éviter les plats en sauce au dîner si ça doit vous donner des ides pareilles. La bestiole arrive comme un cheveu sur la soupe, n'est pas belle, et disparait aussi vite (en un sens, tant mieux). Bon, après tout, Dracu joue aussi au loup-garou, au hibou et se transforme en nuée de mouches, alors on n'est plus à ça près. Dans le monde d'aujourd'hui, il faut avoir plusieurs cordes à son arc.

Passons sur les détails comme le générique foireux (j'aimais bien le lettrage en 3D quand je m'amusais avec Wordart sous Windows 95, depuis, ça m'a passé), la musique qui fait fait penser à des séries z des années 50 (Ed Wood pas mort... oui, la musique aussi est ratée, et oui, là aussi, c'est un comble pour Argento), la scène de sexe du début, calamiteuse autant qu'inutile, toutes les scènes à la gare, qui font penser à un décor de carton-pâte ("les décors sont de Roger Harth ..."), les scènes dans la forêt, qui semblent filmées au camescope.

Ce qui est vraiment embêtant, c'est qu'on a du mal à croire à quoi que ce soit. Thomas Kretschmann ne risque pas de faire de l'ombre à Christopher Lee en tant que Dracula, tant il semble s'ennuyer. Éternel refrain, lui qui était très bien dans le Syndrome de Stendhal, il y a vingt ans, joue ici comme une savate. Mal dirigé, probablement.
Bon, il n'est pas le seul.

Unax Ugalde (Jonathan Harker) est a peu près aussi habité par son rôle, et aussi convaincant. Je ne connaissais pas cet acteur, mais au vu de ses récompenses en tant que meilleur acteur (dans d'autres films, bien sûr ... ), j'imagine que lui aussi a fait ce qu'il a pu, mais bon, on n'est pas des bœufs.

Myriam Giovanelli, qui joue Tania, la première victime du comte dans le film, ne risque pas de remporter d'Oscar, sauf s'il existe une catégorie du plus joli décolleté.

Du point de vue du jeu d'acteurs, tout n'est cependant pas si mauvais. Les acteurs secondaires sont très corrects pour la plupart. En ce qui concerne les rôles principaux, Marta Gastini, qui joue Mina, est très bien et apporte, peut-être par son physique, ou par son style, une petite touche rétro, qui en un sens n'aurait pas déparé un film de la Hammer.
Asia Argento, qui joue Lucy, a une beauté et un style un peu bruts, qui détonnent par rapport à son rôle : le personnage de Lucy est généralement associé à une image de fragilité, et si on avait voulu respecter la trame du Dracula originel, Marta Gastini aurait été bien plus adéquate ; mais ça fait longtemps que l'on a fait une croix sur la nature originelle des personnages, et n'était le pieu, Bram Stoker n'aurait pas fini de se retourner dans sa tombe. Finalement, son charme et son charisme l'emportent cependant et sa prestation est convaincante.

Rutger Hauer a pour lui sa gueule, une certaine présence et dans l'ensemble tient lui aussi bien son rôle, mais dans les toutes premières scènes, il m'a semblé un peu hésitant. Résultat, j'ai passé un moment à scruter d'autres hésitations ... qui ne sont pas venues.

A côté de ça, on notera les clins d'oeil à l’œuvre originale (les citations de Stoker sur les enfants de la nuit, malheureusement intégrées au chausse-pied) ou à d'autres œuvres d'Argento, comme la scène des mouches, qui se termine malheureusement par la disparition des mouches dans la peau du comte, d'une manière assez peu ragoutante), façon Phenomena, ou la vue sur la fenêtre d'où Asia/Lucy scrute la nuit (voir Suspiria).

Voilà, j'ai du mal à tirer beaucoup d'éléments vraiment positifs du dernier film de Dario Argento. Ça me fait mal au cœur cependant de le descendre en flammes. Même si j'ai du mal à admettre qu'il ait pu pondre un film aussi peu convaincant, y compris en ce qui concerne ce qui était traditionnellement, dans ses belles années, des points forts, , pour tous les frissons qu'il a su nous donner dans ses chefs d’œuvre, je serai relativement indulgent et ne mettrai que 4.

Créée

le 17 mars 2013

Modifiée

le 17 mars 2013

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Jean-LucL

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