1963. Paris. La place Clichy, Montmartre, Pigalle... Sous l'influence de la Nouvelle Vague, Jean Eustache promène sa caméra dans les rues et les cafés de la capitale où œuvrent deux pathétiques losers en chasse à la "souris". Abordant une jeune femme dans la rue, ils l'invitent dans un dancing où elle se voit invitée par un inconnu à esquisser quelques pas de danse. Blessés par la situation, les deux hommes se vengent lamentablement.
D'une modernité effarante, Du Côté De Robinson dissèque en moins de 40 minutes la petitesse humaine dans toute sa médiocrité. En accostant cette jeune "souris", mariée et mère de deux enfants qui souhaitent simplement passer un bon moment dans un dancing pour oublier, durant quelques instants, ses soucis quotidiens, les deux "chats de gouttière" s'égarent dans leur combine d'approche où se reflète leur propre insignifiance. La traque est vaine mais les têtes restent hautes, malgré leur aveu à être "deux pourris".
Après l'inachevé La Soirée, Jean Eustache filme avec compassion ces deux êtres ridicules qui hantent, toujours et encore, nos rues et nos campagnes et offre un premier moyen-métrage aussi abouti dans sa forme que pertinent dans son fond. On y discerne bien évidemment les influences de Godard et de Rohmer et l'on se laisse emporter par les virevoltants mouvements de caméra où Paris devient un personnage à part entière, terrain de chasse idéal pour deux losers pas loin d'être magnifiques.