"Un cuento chino", le titre original, est à double sens: littéralement "une histoire chinoise", l'expression signifie également une histoire improbable, à dormir debout. Si dans la forme, le film est assez classique et ne surprendra qu'en de rares occasions, le tout est exécuté très proprement. Même s'il n'y a pas vraiment de quoi jeûner, sur le fond, il y a du Amélie Poulain dans "El Chino". Une poésie et un goût sucré pas désagréable en bouche. Et puis l'air de rien, Sebastián Borensztein aborde des thèmes sérieux, la solitude et le deuil en tête, avec en fond une critique assez frontale des institutions. Le charme opère de bout en bout. Une magie que l'on doit au caractère décalé de certaines situations, mais aussi à la distribution, impliquée et appliquée.

Roberto est interprété par Ricardo Darin. Il est incroyablement attachant et drôle en vieux garçon quincailler maniaque et bougon qui va recueillir un chinois à cause d'une vache. Méfiant au point d'enfermer son invité dans la chambre dans laquelle il l'a installé, les rebondissements vont rapidement s'enchaîner, sans temps-mort, jusqu'au final, réussi à défaut d'être inattendu. Ignacio Huang (ça ne s'invente pas !) assure aussi dans ce rôle d'asiatique perdu dans un pays dont il ne parle même pas la langue. L'alchimie entre les deux acteurs principaux est parfaite, le mélange est détonant, et les deux compères vont se retrouver dans des situations parfois hilarantes. Cela dit, pour ne pas s'exprimer pour des clous, il leur faudra bien plus qu'un cahier entre eux.

La grande surprise de cette heure quarante restera la maîtrise de Ricardo Darin dans le registre comique (il faut le voir jurer à tout bout de champ, en version originale c'est un pur régal !), alors qu'on l'imagine bien plus à l'aise dans des polars et autres films plus sombres dans lesquels on l'a déjà vu briller en de nombreuses occasions. Véritable feel-good movie malgré le sérieux de son sujet, "Un cuento chino" est une belle réussite argentine, et face à un Pékinois désemparé, c'est à Darin qu'échoit le rôle du bouledogue, ou plutôt celui du dogue...argentin.
Gothic
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le 17 sept. 2014

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