Je n'avais jamais revu Elisa depuis sa sortie au cinéma en 1995 mais j'en gardais un vague mais plutôt bon souvenirs. Douze ans après L'Été Meurtrier le réalisateur Jean Becker embarquait donc Vanessa Paradis pour son second grand rôle au cinéma six ans après Noce Blanche de Jean Claude Brisseau pour une histoire de jeune fille en quête identitaire sur fond de vengeance. Car dans le fond on a parfois la sensation que Jean Becker a voulu nous refaire le coup gagnant de L'Été Meurtrier avec en plus un hommage sous jacent à Gainsbourg disparu quatre ans avant la sortie du film, sauf que l'ensemble tient difficilement la route et ne trouvera son point d'équilibre précaire que lors des trente dernières minutes du film.


Elisa c'est donc l'histoire d'une jeune fille abandonnée par son père et dont la mère s'est suicidée un soir de Noël après avoir tenté de l'étouffer. La jeune fille vivote alors avec Solange son amie de la ddass et Ahmed un gamin de banlieue, une petite bande débrouillarde avec laquelle Marie pratique des petits actes de délinquance pour survivre. Mais Marie est surtout rongée par la quête obsessionnelle pour retrouver son père et venger la mort de sa mère.


On retrouve donc dans Elisa de nombreux éléments qui étaient déjà présents dans L'Été Meurtrier avec cette jeune femme assez provocatrice et libre rongée par le traumatisme de son enfance et la violence qu'aura subit sa mère et qui tente de se reconstruire par la vengeance. Sauf que derrière L'Été Meurtrier il y-avait l'écriture du romancier Sebastien Japrisot et que pour Elisa on se retrouve avec le scénariste Fabrice Carazo qui depuis le film de Becker n'a signé qu'un autre film avec Le Père Noël en 2014. Et Si Elisa fonctionne si mal c'est bien avant toutes choses pour ses nombreux défauts et faiblesses d'écriture. Pendant plus d'une heure nous allons donc suivre les 400 coups et les petites arnaque de cette bande de gentils délinquants et amis entrecoupés de nombreux flashbacks lourdement explicatifs. Même si le trio Marie (Vanessa Paradis), Solange (Clotilde Courau) et Ahmed (Sekkou Sall révélé par IP5) fonctionne plutôt bien, jamais il ne s'en dégage l'osmose et la force d'une véritable cohésion et surtout 90% de ce que l'on verra faire à l'écran par ce trio n'aura strictement aucun intérêt dans la construction globale du récit. Un sentiment de remplissage d'autant plus creux que si les trois personnages sont objectivement assez justes et attachants leurs faits d'armes eux sonnent complétement faux à l'écran. Qu'ils volent des fringues, arnaquent un commerçant, échappent à un viol ou foutent le souk dans un mariage de petits bourgeois hypocrites pour marquer combien ils sont libres et rebelles , rien ne sonne tout à fait juste, le point d'orgue étant la très embarrassante séquence durant laquelle Marie se venge de ses grands parents qui avaient refusé de les accueillir elle et sa mère 15 ans plus tôt (comme si elle pouvait s'en souvenir). Même si Vanessa Paradis est absolument sublime en ange cabossé sous le regard amoureux de Becker, même si Clotilde Courau est touchante en fille paumée un peu facile et que Sekkou Saal fait ce qu'il peut en gosse de banlieue rigolo, l'osmose du trio ne décolle jamais la faute à une succession de situations bien trop grossièrement écrites et de dialogues faussement branchés. Toute cette écriture pataude et maladroite se retrouve dans l'hommage poussif et un peu artificielle fait à Gainsbourg par l'intermédiaire d'un personnage interprété par le regretté Phillipe Léaotard qui singe le grand Serge dans des volutes de fumées de gitanes. On retrouves aussi dans ce premier acte le pauvre Michel Bouquet qui ne semble être incrusté à la truelle dans l'histoire que pour avoir un petit vieux complice et sympathique comme pouvait l'être Suzanne Flon dans L'Été Meurtrier.


Il faudra attendre le tout dernier acte du film débarrassé de personnages secondaires finalement sans aucuns intérêts pour que Elisa retrouve enfin un peu de consistance. Il faudra tout de même attendre encore une fois un bonne dizaine de minutes pour que le personnage interprété par Gerard Depardieu retrouve autant de sobriété que le jeu de l'acteur. Elisa se termine enfin sur une note touchante avec cette trouble relation amour/haine entre cette fille paumée et ce père à la dérive mais franchement que ce fût long et pénible pour en arriver jusque là.


Lorsque cette grande carcasse de Gerard Depardieu enlace la fragile Vanessa Paradis dans les embruns d'un océan de sentiments déchaînés on repense aux paroles d**'Elisa** : " Elisa Elisa Les autres on s'en fout" ; dommage donc que ce soit sur ces autres que reposent une trop grande partie du film parce que effectivement Les autres On s'en Fout !!

freddyK
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le 24 nov. 2021

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