Un essoufflement inévitable ?

Lancée en 2001, la franchise Fast and Furious s’est construit un univers qui a depuis grandement évolué. Au départ basé sur l’univers clandestin des courses de voiture dans une ambiance teen-movie décontractée, la saga s’est depuis son épisode 5 complètement réinventée, entrant avec vigueur dans le monde du blockbuster hollywoodien.

De petit film « modeste » dans un milieu relativement fermé, Fast and Furious voit depuis ce fameux 5e film beaucoup plus grand, mettant ses héros face à de redoutables complots terroristes aux risques cataclysmiques. Si la conduite de bolides reste l’axe central de tous les films, c’est tout le reste qui s’est embelli voire métamorphosé : les scènes d’action, les moyens mis en œuvre, les intrigues, le casting.

Personnages centraux et emblématiques du 1er film, Paul Walker et Vin Diesel, après être un temps sortis de la saga, ont repris leurs rôles respectifs dès l’épisode 4. De film en film, Fast and Furious a vu son succès et l’engouement de ses fans grimper en flèche. Forte de sa réussite, la saga pousse à chaque nouvel opus la surenchère plus loin, que ce soit dans l’action, les péripéties ou l’évolution de ses personnages, faisant de ces derniers une véritable FAMILLE. Une famille à laquelle on s’est inévitablement attaché. Même si tout est improbable et irréaliste, les derniers films de la franchise n’ont cessé de nous faire vibrer, nous faisant vivre un vrai moment d’évasion une fois notre cerveau déconnecté.

Suite au décès tragique de Paul Walker en plein tournage de l’épisode 7, la FAMILLE a poursuivi l’aventure sans Brian O’Conner, scellant son départ par un hommage bouleversant, où l’on se laisse volontiers aller aux larmes.

Malgré l’absence de Paul Walker et de Jordana Brewster, l’épisode 8 tint toutes ses promesses, nous gratifiant de scènes d’action dantesques, d’une intrigue de qualité (pour un Fast and Furious) et d’une bonne écriture de ses personnages, en faisant l’un des meilleurs opus de la saga.

Si la FAMILLE F&F semblait être ressortie grandie du destin tragique de son héros, la suite nuancera ce ressenti.

Arrivés en cours de franchise pour le plus grand plaisir des fans, Dwayne Johnson et Jason Statham décident de tracer leur propre route, en offrant à leurs personnages respectifs un spin-off dérivé de la saga originale : Hobbs et Shaw. Conséquence directe : les deux acteurs ne seront pas de la partie pour Fast and Furious 9. Plus conflictuel, la sortie du 9e épisode de la franchise est repoussée de 2019 à 2020, en raison de la sortie préalable de Hobbs et Shaw, provoquant la colère de Vin Diesel et de Tyrese Gibson et un conflit affiché avec Dwayne Johnson.

Programmé initialement au printemps 2020, Fast and Furious 9 sort finalement le 14 juillet 2021, en raison de la crise sanitaire. Très attendu, le film permet-il à la saga de conserver sa qualité ?

Malheureusement NON. Et ce, malgré les moyens astronomiques mis dans le film.

Le principal défaut du film réside dans son écriture, ratée dans les grandes largeurs. Dans son obsession de rester bien ancrée dans la thématique de la FAMILLE, l’intrigue vire ici à la mièvrerie, chose que je n’avais jusqu’alors jamais ressenti dans un F&F.

Privé de 2 de ses personnages phares (Luke Hobbs et Deckard Shaw), le film tente de reconstruire son noyau de personnages en faisant revenir quelques anciens et en intégrant Jakob Toretto, frère de Dominic, incarné par John Cena.

Sans être mauvais, ce dernier ne convainc pas malgré ses gros bras. Jeu trop neutre, pas d’émotions dégagées, finalité trop évidente.

Quant aux anciens, ça pêche encore davantage. Mia revient comme une fleur, avec une explication foireuse pour justifier l’absence de Brian. Les scénaristes auraient clairement pu trouver mieux...

Déception également autour du personnage de Sean Boswell, héros de Fast and Furious 3. Souvent évoqué, longtemps attendu, son retour reste très superficiel, sans que le personnage ne prenne une réelle place dans l’équipe.

Grande méchante de l’épisode précédent, Cypher (alias Charlize Theron) revient dans ce nouvel opus mais avec peu de temps à l’écran, ce qui est regrettable au vu du charisme de l’actrice et de la place donnée au personnage dans Fast and Furious 8.

Remarquée dans ce dernier pour son apparition en tant Mrs Shaw, Helen Mirren revient pour une courte scène aux côtés de Vin Diesel. Bien que son personnage soit sympathique, son retour est purement anecdotique, n’apportant strictement rien au scénario.

Et plus déroutant, le retour abracadabrant de HAN ! Mort depuis la fin du 6e film (=3e film) dans des circonstances assez explicites, le personnage revient en cours de film de façon incompréhensible. On a bien droit à une explication mais celle-ci ne tient pas la route une seconde. Même si le personnage est sympathique et fait partie de la famille, son retour casse toute l’émotion autour de sa mort, importante et symbolique dans le scénario. A défaut d’être réaliste, la saga avait jusque-là toujours cherché à être un minimum crédible dans ses péripéties. Même le retour de Letty pouvait encore passer, même s’il était déjà tiré par les cheveux... La franchise part ici littéralement en roue libre, où l’on ne distingue plus la moindre cohérence.

Le film reste fidèle à l’univers de la franchise mais dans une version nettement inférieure à celle de ses derniers opus. Fast and Furious 9 marque un vrai essoufflement de la saga, qui n’a cette fois pas réussi à se renouveler.

Une vraie déception !