Feux croisés
6.7
Feux croisés

Film de Edward Dmytryk (1947)

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"Hating is always the same. It's hard to stop. It can end up killing men who wear striped neckties."

Je découvre un nouveau registre cinématographique grâce à ce "Crossfire" : le film noir didactique. Sentiment très inconfortable de regarder un film aussi prompt à faire de la morale sur le thème du racisme (antisémite en l'occurrence) au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, surtout de manière aussi directe, et donc balourde. Le principe du film noir est presque dévoyé, en un sens, afin de se focaliser sur le discours : un soldat juif démobilisé est assassiné, et on apprend très vite qui des trois soldats présents est l'auteur du crime. Le film est ainsi tourné non pas vers la résolution de l'intrigue, puisqu'on sait assez rapidement qui est le coupable, mais vers la progression de l'enquête pour identifier et acculer le meurtrier.


C'est un film avec beaucoup de Robert : Ryan, le coupable antisémite qui ne fait pas franchement dans la dentelle une fois passée la séquence d'exposition, Mitchum en sergent au service du bien et des innocents, et Young en enquêteur calme qui avance lentement mais sûrement vers son but. Beaucoup de bons acteurs, malheureusement au service d'un récit borné qui se contente de suivre le fil parfaitement rectiligne qui s'impose à chacun des personnages dans la fonction et le tempérament qui leur sont imposés. C'est assez peu engageant et mobilisant : pas de surprise, pas de nuance, pas de profondeur psychologique notable.


Il y a tout le potentiel que peut offrir le classicisme du film noir des années 40 (l'imbrication des flashbacks, les différentes versions des faits, la mise en scène des séquences-clés, le piège qui se referme sur Ryan à la fin avec jeux de miroir et ombres dans l'escalier), mais englué dans un sens de la leçon pédagogique qui ne sied absolument pas à un objet de cinéma : la cerise sur le gâteau, c'est quand même l'origine irlandaise et catholique de l'inspecteur qui dresse bien lourdement un parallèle entre l'assassinat de son grand-père par des protestants intolérants et le meurtre antisémite qui le préoccupe. Tout cela nuit pas mal à la description des traumatismes des démobilisés de l'époque, sur le thème de la réinsertion difficile de retour à la vie civile. Manque de rythme, de suspense, de liberté et de subtilité de ton en dehors du didactisme.


"Monty's kind of hate is like a gun. If you carry it around with you, it can go off and kill somebody."
"Ignorant men always laugh at things that are different."

Créée

le 25 juin 2021

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Morrinson

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