À la vue de "Frankenstein", j'ai pensé au Dracula de Coppola : une adaptation théâtrale mais très fidèle d'un monument du genre fantastique. Puis j'ai vu les noms au générique et j'ai compris : Coppola est producteur du film. Après quelques recherches, j'ai appris que c'était lui qui devait adapter l'oeuvre de Mary Shelley à l'origine.
La comparaison avec cette oeuvre est flatteuse : le but des scénaristes (parmi lesquels le grand Frank Darabont) est de s'éloigner des adaptations vues et revues au cinéma de l'oeuvre fantastique pour se rapprocher du livre d'origine.
Et il est vrai que, malgré quelques libertés, l'histoire qui nous est contée semble presque originale tellement elle s'éloigne de ce que l'on a l'habitude de voir alors que finalement ce n'est que le film le plus fidèle au roman !
La créature de Frankenstein, incarné par un Robert de Niro très surprenant, n'y est plus si monstrueuse. Le vrai monstre ici, c'est Viktor Frankenstein qui a donné vie à un homme qui n'avait rien demandé et qui est d'une tristesse infinie face au rejet de tous les autres humains.
L'évolution de la créature (puisqu'elle n'a pas de nom) est complexe mais passionnante. Elle n'a rien de factice. Ce sont les mécanismes psychologiques que l'on peut retrouver aujourd'hui en criminologie : notamment l'école de Chicago sur la délinquance juvénile a démontré que lorsque l'on rejette un groupe de personnes, ce groupe a tendance a revêtir le comportement que l'on projette sur eux. Autrement dit, des personnes rejetées par une société qui les identifie en tant que délinquants (même si à ce stade, ils ne le sont pas) deviendront délinquants parce qu'ils adopteront le comportement que la société attend d'eux ("quitte à ce que les gens me rejettent parce qu'ils pensent que je suis un voleur, autant le devenir", grosso modo). C'est le même ressort qui est à l'œuvre dans "Frankenstein", ce qui démontre que l'évolution du personnage n'a pas été prise à la légère par les scénaristes qui s'y sont beaucoup plus penchés que Mary Shelley.
Bref, l'histoire est passionante et bien documentée.
Quant à sa mise en scène, elle bénéficie de la formation théâtrale de Kenneth Brannagh, ce qui lui assure de nombreux plans très recherchés et très beaux.
Mais ce qui m'a le plus marqué, c'est la qualité des maquillages. Je le remarque rarement mais le travail des maquilleurs mérite absolument d'être souligné car le film ne serait vraiment pas ce qu'il est sans leur talent.
Ils ont également permis au film d'être d'un réalisme assez déconcertant. Parce qu'il ne faudrait pas oublier que l'on parle tout de même d'un homme qui démembre des cadavres et les assemble pour former un être vivant.
"Frankenstein" est donc une adaptation particulièrement réussie du roman et mérite le coup d'oeil pour tout amateur des classiques de la Universal ou de la Hammer.