Roooooooaaaaaaaaaaarrrrrrrh ! (Ceci est un synopsis)

— Dis John, c’est comment le Godzilla de 2014 ?
— C’est marrant que tu me demandes ça, mon petit. Je suis pas expert en films de monstres, j’ai même pas vu le film original de 1954…
— Tu dois bien avoir un avis, non ?
— Ah oui, ça, un avis, j’en ai un ! Tu sais quoi ? J’ai envie de refaire une critique, et tu vas m’aider à la structurer, mais je te préviens : va y avoir du spoil. De toute façon j’ai envie de dire que le titre et le type de production (blockbuster) te spoilent tout le film. Je t’expliquerai ! À ton avis, qu’est-ce qu’il faut dans un film de Godzilla ?
— Un gros monstre ?
— Ah oui alors pour ça tu ne seras pas déçu. Il est gros, il est bien moche, et il est bien foutu. Franchement, niveau monstres, ce film, c’est d’la bombe visuelle comme tu en as rarement, voire jamais vu. Mais bon premier truc bizarre, des monstres, ben ici il y en a trois. What the beep tu dis ? En effet ! J’ai lu un peu, j’ai peut-être zappé un truc, mais il me semble que ça, ça sort de nulle part ! Bon je ne m’en plains pas, ils sont plutôt sympas. Avec un look à faire peur comme je les aime (ils font penser aux créatures créées par Neville Page pour le Super 8 d’Abrams ou le Cloverfield de Matt Reeves, mais ce n’est pas le créature designer qui s’est attelé à la création de monstres ce coup-ci), c’est papa et maman “Muto” qui tentent de se refiler la petite graine et d’aller mettre des bébés muto partout aux USA (tiens donc…). Oui, donc, tu sais, je dis ça mais faut aussi savoir pourquoi… Ça se passe où Godzilla au départ ?
— Au Japon non ?
— C’est ça, enfin, dans le pacifique. Godzilla, même s’il ressemble à un dinosaure, c’est avant tout un monstre marin, hein… D’ailleurs, tu sais d’où il vient exactement ?
— Ben c’est un dinosaure qui dormait ou un truc comme ça…
— Ah non ! Godzilla c’est un peu le Hulk des lézards, tu vois, un rampant irradié qui s'est fâché et a grandi, grandi, grandi… Alors ça donne deux choses importantes à dire : d’abord, Godzilla c’est aussi un peu un dragon radioactif, parce que ça tu le verras en 2014 mais j’ai vérifié, c’est bien une de ses armes déjà dans le film de ’54 : ce lézard géant, il crache aussi un feu bizarre. Ensuite, fallait bien justifier la nouvelle histoire d’une façon ou d’une autre et surtout, fallait aussi que les humains aient un minimum leur place dans ce choc de titans. Du coup, les muto, ils s’alimentent de radiations atomiques (ce qui explique qu’ils dormaient près du centre de la Terre depuis des siècles) et ils poursuivent une bombe nucléaire que l’armée américaine trimballe un peu partout par tous les moyens qu’il sera possible et même facile pour ces monstres d’arrêter. Ça c’est la première chose vraiment débile sur laquelle je m’arrête. Elle ne vient pas forcément dans l’ordre chronologique du film hein, y a du débit plus tôt. Bref : donc, tout ça ça veut dire que ces monstres, qui détectent les radiations et les pourchassent… ils sont pas foutus de se rendre compte qu’il y a des silos partout dans le monde où ils peuvent aller chercher leur bouffe immatérielle ? Où alors on s’imagine que nous, le public, on a tout simplement oublié leur existence. Puis de toute façon, moi si j’étais papa muto dans ce film, je retrouverais maman et on courrait bouffer Godzilla en amoureux, point barre. Enfin bon. P’têt’ qu’après tout, l’instinct de survie des kaiju (ah oui, j’aurais p’têt’ dû utiliser le terme plus tôt, parce que c’est un peu la base du mythe de Godzilla, qui était le premier : un kaiju, c’est un gros monstre marin dans l’imaginaire japonais. Tu peux aussi en voir dans des films comme Pacific Rim, de Guillermo Del Toro) ça n’est pas de chercher le truc à bouffer le plus mieux que tu peux trouver, surtout si ce n’est “que” pour nourrir ta progéniture… Ah oui donc, j’en suis parti longtemps, mais je reviens vite fait sur la localisation : donc Godzilla vient du Japon, mais comme il poursuit les muto, qui eux-mêmes suivent la bombe, ben ils se retrouvent tous très vite… aux États-Unis. Forcément. Ça aussi, “fallait bien.”
— Mais je préfère quand tu parles de Godzilla tout seul, moi… il a pas un cri spécial aussi ?
— D’accord. Ben si, d’ailleurs les studios qui ont enregistré le son original pour le film de ’54 ont envoyé ce son devenu culte aux ingénieurs du son du film américain de cette année. Ils l’ont modifié pour qu’il fasse encore plus peur. Et tu vas l’entendre quatre fois, parce qu’ENCORE, ça aussi, faut bien. On ne te l’aura pas fait comprendre assez avec les jeux d’échelle, des trucs qui cassent comme des allumettes alors que ces trucs, c’est des porte-avions américains ou des gratte-ciels entiers,… ; Godzilla, il est grand, très grand. Et du coup il fait beaucoup de bruit. Et il t’en pète les tympans. Prends des boules Quies®. D’ailleurs c’est marrant, je parle d’échelle… Encore un truc débile : on essaie de faire coexister les minables humains avec les béhémoths, ça je te l’ai dit, mais ça marche de plusieurs façons. Par exemple, on tente de créer un lien émotionnel entre Aaron Taylor-Johnson (je vais t’en parler, de ce gars-là, c’est promis) et les monstres par le regard. D’abord avec la maman muto, très fâchée sur lui mais je ne vais pas te dire pourquoi (je veux bien que j’ai prévenu pour l’éventuel spoil, mais faut pas abuser tout de même), puis avec le Roi des monstres lui-même. Alors c’est marrant mais moi je me dis directement que… Tu sais, Godzilla il mesure genre un demi-kilomètre de haut. Et il regarde notre acteur dans les yeux, alors qu’honnêtement, je pense pas que ce soit possible pour lui de distinguer son cuir chevelu de ses pieds d’aussi loin. Et après, je remarque un autre truc encore lié à ça. C’est peut-être mon imagination qui va trop loin (ou pas assez ?) hein, je te préviens. On assiste au même genre d’actions (ou d’inaction) synchronisées entre Godzilla et Taylor-Johnson, genre ils trébuchent en même temps. C’est super subtil comme moyen pour faire ressortir le caractère hyper-héroïque des deux personnages et le lien très fort qui existe entre les deux (tu le vois, le sarcasme, là ?).
— T’as pas l’air content, là…
— Ben non ! C’est lourd, c’est pas fouillé pour un sou, et franchement ça échoue largement parce que c’est pas ces astuces superficielles qui donnent de l’importance à n’importe lequel des personnages. En plus, j’arrête pas de dire que Godzilla est très grand et tout, mais du coup le parti pris du réalisateur, c’est de n’en montrer que des morceaux pour essayer d’insister sur sa taille et de te faire peur. Donc tu ne verras pas tant de Godzilla que ça, au final… Moi j’ai trouvé ça dommage, mais si ça t’intéresse, tu peux aller lire la critique de bauer à ce sujet, que j’ai trouvé bien foutue et qui a l’avis opposé [et qui a l'air de ne plus exister, pardon] : http://www.senscritique.com/film/Godzilla/critique/26902947.
— Quoi c’est un mauvais Godzilla, alors ?
— Je n’irais pas jusque là, non. Franchement ça vaut la peine de le voir, c’est vraiment beau, les couleurs et la photographie sont vraiment intéressantes, le design des monstres est chouette et puis, franchement, tu ne t’ennuieras pas beaucoup. Pour un Godzilla, tu as ce qu’il te faut : les gros monstres, le fameux cri et des bâtiments qui pètent. Mais bon, désolé, moi j’avais des choses à dire quoi parce que ça me semble loin d’être parfait, loin d’être suffisant pour en faire ce qui, pour moi, est un vrai bon film. D’ailleurs si tu as le temps, j’en ai encore, des choses à dire.
— Bah tu sais, vu où on en est déjà…
— Hahah je sais, j’ai TROP de trucs à dire… Ben si tu veux, pour moi, Godzilla, c’est un grand mythe, tu vois ?
— Genre comme les super-héros ?
— Exactement ! C’est un peu un personnage avec une histoire type que des artistes, notamment des réalisateurs, s’approprient et mettent à leur sauce. Pour les super-héros, en ce moment ça cartonne, les gens font du bon boulot et les films sont rarement décevants, inventifs, pleins de clins d’œil pour les connaisseurs et les fans mais surtout, ils s’appuient sur les histoires déjà publiées dans les comics pour nous offrir une histoire nouvelle, adaptée à notre époque et qui nous amène une intrigue idéalement bien ficelée. Dans Godzilla, je me suis trouvé très déçu par l’histoire qu’on a, pour moi, tout simplement accolée au mythe sans considération. Déjà, j’ai effleuré la question plusieurs fois, les humains dans ce film sont pitoyables, inutiles. Franchement, ils nous auraient servi un film uniquement avec les monstres, pour moi, ç’aurait été pareil. Ils sont allés se chercher un casting plutôt sympa et ils ne l’exploitent pas. Je pense surtout à trois acteurs en particulier. Avant toute chose, Bryan Cranston.
— THE DANGER ! Heheh !
— Tu as regardé Breaking Bad ?! On t’a laissé ?! N’importe quoi ! Bref, de toute façon, le personnage qu’il interprète ici n’a rien de Walter White. C’est pour moi ce qui en fait un bon acteur : il peut jouer des personnages très différents. Malheureusement, son personnage, c’est le père de Ford (Taylor-Johnson, j’y viens) et il développe une relation typique avec son fils : après la mort de sa femme (dont, honnêtement on se fout. Mise en scène sympa, mais c’est insuffisant et trop court pour en faire autre chose qu’un détail), il sombre dans la tourmente et tente par tous les moyens de comprendre ce qui a causé l’accident à la centrale nucléaire (qui rappelle Fukushima ; tiens prends ça dans la tronche, Japon !) car il est convaincu que ça ne provient pas pas des réacteurs. Du coup son fils s’en éloigne et veut seulement oublier… et il rentre à l’armée. Ben tiens ! “Fallait bien !” Comme ça ça permet de faire le lien entre l’histoire humaine et l’histoire des monstres, parce qu’en plus d’avoir développé la relation conflictuelle ado ou jeune adulte versus parent (qu’on retrouve partout aujourd’hui et depuis des années, du dessin animé Epic aux comédies anthologies comme 40 ans toujours puceau, en passant par les super-héros eux-mêmes comme Ironman), le fils va évidemment se retrouver coincé avec l’armée là où sont les monstres. Donc on essaye de justifier un point de vue qui les suit. En plus, on lui invente une petite famille, dont la jeune Olsen, pour qu’on se soucie un minimum de son sort en plus du leur. Pour moi, ça ne marche pas, parce qu’on est bien embourbés dans le schéma typique du blockbuster et que personne ne meurt, c’est comme ça, j’vous l’dit. Et je reviens pour finir sur Cranston pour dire que si, quelqu’un meurt, et c’est lui. Mais comme c’était impossible de s’attacher au personnage si tôt dans le film, comme cette fin est tout à fait prévisible et mise en scène de façon évidente et inexpressive, ben c’est comme sa femme : on s’en fout. Et moi, m’en foutre que Cranston meure, ça m’fait du mal. Honnêtement. J’te déteste Edwards.
— Et c’est qui ton troisième acteur alors ?
— Le Japonais Ken Watanabe. C’est juste mon avis en fonction des films que j’ai vu, mais pour moi Ken Watanabe c’est le plus grand acteur japonais qui s’est intégré dans le cinéma hollywoodien actuellement. Regarde Inception et Le Dernier Samurai. Ben dans Godzilla, il est endormant, il a la même tête vaguement tracassée du début à la fin, et j’ai vraiment l’impression qu’il ne sert… à rien. C’est triste. Donc au final, les humains, on s’en fout ! C’est ce que je dis : Godzilla, c’est un vrai film de monstres, et JUSTE de monstres. Ne t’attends pas à une chouette histoire travaillée, à des personnages à la psychologie fouillée ni même à t’inquiéter pour les humains parce que ce n’est clairement pas fait pour ça. Vas-y, vraiment, mais sache bien que c’est juste pour te péter les rétines. (Petit bonus, la 3D… ne vaut pas la peine non plus, comme presque toujours…) Pour moi ça reste mieux que Pacific Rim, donc un point de plus. Et comme d’hab’, je suis gentil :)

Rungolion
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le 25 mai 2014

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