Je n'oublierai jamais ma première rencontre avec les gorilles. J'entendis, je sentis avant de voir : le bruit d'abord, puis une puissante odeur musquée, une odeur de basse-cour et en même temps, une odeur presque humaine.
Michael Apted signe avec Gorille dans la brume une oeuvre absolument magnifique relatant la vie de Diane Fossey. Sortie en 1988, Diane Fossey avait donné son autorisation pour ce film car elle voulait un véritable impact auprès du public, pour qu'ils sachent ce qui se passe hors de leur vie pépère. Ce qui est en soi assez dramatique, c'est que ce biopic fera augure de biographie, car peu de temps après avoir donné son accord pour la mise en chantier de sa vie sur pellicule, elle fut assassinée. À la suite de cette nouvelle, le réalisateur Michael Apted laissera tomber le scénario de base et adaptera plutôt le livre tiré des mémoires de Diane Fossey, écrit par elle-même, afin de lui rendre en quelque sorte hommage.
Afin de mieux nous plonger dans sa vie extra ordinaire et de son combat constant et acharné pour la préservation des gorilles auquels elle voue un amour sans limite. Le cinéaste fera un boulot remarquable et restera le plus honnête possible, relatant sur le grand écran avec beaucoup de sincérité la vie de ce personnage atypique. En sortira une oeuvre percutante et touchante dont il est compliqué de rester insensible, tant le spectacle frappe au ventre.
Voir ainsi une simple anthropologue menée une lutte acharnée contre le braconnage au cœur du continent Africain, pour devenir un véritable rempart pour la survie des gorilles en fait vraiment l'une des personnes les plus importantes du 20e siècle. Un grand respect pour cette femme qui n'a pas attendu que l'on décrète l'égalité homme/femme pour être importante.
Côté réalisation je vais faire simple, ce long métrage est le meilleur travail de Apted fais à ce jour. C'est sincère, cru et authentique. La mise en scène est surprenante, proposant une manière de filmer intelligente avec une approche par moment "documentaire", pour mieux renforcer l'implication du spectateur, sans pour autant perdre l'attrait d'un film cinématographique. Malgré les années, Gorille dans la brume reste incroyable tant le sujet abordé est important mais aussi tant l'émotion véhiculée sonne vrai.
Les séquences sont constamment filmées du point de vue de l'héroïne, ce qui est un bon point pour la compréhension de cette femme hors normes. Néanmoins, je trouve cela péjoratif sur quelques petits points. En effet, le fait que le contexte politique de l'époque en Afrique soit peu mis en avant occulte une partie du contexte important, à savoir ''la famine''.
Ce n'est pas pour leur trouver des excuses (loin de moi cette idée) mais les braconniers ne sont pas forcément des gens mauvais. C'est aussi des gens désespérés qui meurent de faim, n'ayant pour seul revenu pour faire survivre leurs familles que le braconnage. Le problème à mon sens, vient surtout de ceux achetant et commandant les pièces aux braconniers. Un sujet qui mérite une longue réflexion sur notre consommation du monde.
C'est pourquoi je trouve dommage que ce point soit peu développé car ce débat est pour certains une vraie dualité de la vie. Manger ou être mangé. Ce n'est jamais tout blanc ou tout noir. Ce film esquive assez ce point qui me parle beaucoup, mais je le comprends, car c'est avant tout centré sur l'action honnorable de Diane Fossey.
Un point bluffant de l'oeuvre vient des décors qui sont majestueux ! Michael Apted nous plonge dans l' Afrique de formidables manières, au travers de cette jungle luxuriante et verte à souhait. Une reconstitution superbe, harmonisée par ces paysages tous plus magnifiques les uns que les autres, avec des points de vue dominants grandioses, nous faisant comprendre à quel point cette jungle est sauvage, vaste et encore intacte.
Les différents plans ont été tournés au Rwanda et au Kenya durant l'été 1987, dans des conditions extrêmes à 4000m d'altitude, avec en plus une équipe réduite de seulement 6 personnes pour les scènes avec les vrais gorilles. Un travail qui impose le respect.
Les gorilles présents dans le film sont tous bien réels. De magnifiques animaux ! Même lorsque l'actrice tourne des scènes aux côtés des gorilles, ben ce sont des vraies. Hormis pour quelques scènes impossibles à mettre en place pour ses animaux, il y a eu des cascadeurs déguisés en gorilles pour les besoins du long métrage. Il a donc fallu une bonne dose de courage et un entraînement vigoureux de plusieurs mois pour pouvoir se tenir auprès de ces majestueux gorilles.
Si l'ensemble des séquences entre l'héroïne et les gorilles sont touchantes, c'est dû à cette volonté de fer du réalisateur de faire comprendre ce lien qui se met en place entre "elle" et "eux".
Un relationnel magnifié grâce à un accompagnement musical sublime, signé du compositeur Français Maurice Jarre. Il emploie de manière surprenante sa bande originale, accompagnant parfaitement le récit. Déjà que le film fait pleurer facilement de par les sujets mis en avant qui sont durs à voir, il faut que le compositeur Maurice Jarre en mette une couche supplémentaire.
Maurice Jarre: "Je veux voir déprimé, vous effondrer... pleurer ne me suffit pas ".
Tortionnaire !!! ^^
C’est avec une conviction et une implication inouïe que Sigourney Weaver incarne Diane Fossey. Elle déploie tout du long une immense performance d'actrice ! On la croirait possédée tant elle sonne juste. On a l'impression qu'elle est vraiment le personnage qu'elle incarne. On pleure avec elle, on rit avec elle... en bref, elle hypnotise et remue dans tous les sens le spectateur. Elle nous fait éprouver de la curiosité, de l’émerveillement, de l'amour, de la ténacité. Mais aussi de la rage, du désespoir, de la haine. Un carton plein !
Voir la comédienne ainsi épanouie au milieu de ces paisibles gorilles est impressionnant, surtout lorsqu'elle finit par faire face à la dure loi de la réalité: "la barbarie des braconniers". Un moment éprouvant pour elle et pour nous.
La voir jouer avec tant d'aisance et tant de charismes, me confirme qu'elle est bien mon actrice préférée. Que ce soi dans la saga Alien, SOS Fantôme, Gorille dans la brume, La jeune fille et la mort, L'oeil du témoin, Une carte du monde, Copycat... elle est à chaque fois parfaite. Elle est pour moi l'actrice la plus influente du 20 ème siècle. Ce que je comprends pas, c'est comment une actrice avec une telle filmographie, dont un talent d'interprétation incoyable, a pu être reléguée au second plan depuis 2002, c'est incompréhensible !
Tant que je suis sur un coup de gueule, j'ajouterai que je considère comme un scandale le fait que dans son rôle pour ce long métrage, Sigourney n'ait pas eu l'Oscar. Le film a été nominé à 5 reprises aux oscars, notamment dans la catégorie "Meilleure actrice", mais l'équipe est repartie bredouille à chaque fois (incompréhension totale). Il se verra couronné de 2 Golden Globes, 1 pour la "Meilleure actrice" dans un drame (bravo Sigourney tu le mérites) et 1 pour sa bande originale signée Maurice Jarre. Un minimum de réussite tout de même, même si l'oscar aurait été bien plus justifié.
CONCLUSION:
Gorille dans la brume est un vrai hymne à la protection animale signé de main de maître par un Michael Apted engagé et bourré d'humanisme. Un film aux images émouvantes, pourvut d'un scénario plus que solide, une fiction documentaire qui décrit avec brio les beautés du milieu animal mais aussi les horreurs qui s'y cachent. Une véritable réflexion sur notre vision du monde qui se veut par moments attendrissant, mais surtout révoltant, impossible de rester insensible devant ce spectacle. Sigourney Weaver livre ici sa meilleure prestation avec beaucoup de conviction.
Gorille dans la brume est un superbe hommage à la naturaliste Diane Fossey.