Le titre de cette critique est une sentence assennée par Gilles (Olivier Gourmet, présence indéniable encore une fois, malgré un second rôle) à Gary (Tahar Rahim, très crédible lui aussi) qui vient de trouver un travail dans une centrale nucléaire (quelque part dans le sud de la France) et qui va travailler dans son équipe. Ayant lu et apprécié la critique de Sparfell :


(http://www.senscritique.com/film/Grand_Central/critique/21719263)


après avoir vu le film, j’ai appris que la réalisatrice Rebecca Zlotowski (deuxième film après Belle épine) annonce qu’il s’agit avant tout d’une histoire d’amour sur fond de travail dans une centrale nucléaire et non l’inverse. Malgré l’intention, comme Sparfell j’ai été nettement plus intéressé par la description du milieu nucléaire que par l’histoire d’amour pas franchement originale.


L’industrie nucléaire française fournit une bonne part de l’énergie électrique, mais on en connaît peu le fonctionnement. Le film évite l'aspect scientifique rebutant, il évoque les conditions de travail avec ses conséquences. C’est donc un aspect social lié aux risques encourus, ce que le film le montre plutôt bien. Gary est un homme jeune en parfaite santé qui a besoin de travailler pour vivre sa vie. Malheureusement, il n’a pas de qualification particulière. Il arrive d’on ne sait trop où et passe un petit test d’embauche, à la suite de quoi il suit une formation axée avant tout sur la sécurité semble-t-il. Il obtient alors la certification DATR qui pourrait signifier « Dose antérieure très raisonnable » ou de façon plus pragmatique « Déclaré apte au travail risqué ».


Le film montre ce que font ces hommes (et quelques femmes dans des situations moins risquées) dans la centrale, à savoir un travail de maintenance et de manutention. Un travail à première vue facile et dont les risques ne sont perceptibles que par les attitudes de ceux qui savent à quoi s’en tenir. Il y a l’utilisation des combinaisons, les douches et l’ambiance générale. Il faut constamment se méfier, car être en contact avec un matériau radioactif peut signifier recevoir la dose maximale autorisée. Dans ce cas, on ne peut plus accéder à certaines zones. Une mesure élémentaire de sécurité qui peut signifier le chômage technique voire l’interdiction de travailler dans le secteur nucléaire pour une durée plus ou moins importante. Le temps (d’exposition à la radioactivité) c’est de la dose (reçue) ! Quand on n’a pas d’autre emploi en vue, non seulement on fait attention mais on apprend aussi le travail en équipe, la solidarité.


Là où le film laisse un peu le spectateur sur sa faim, c’est qu’il évoque les petites combines des uns et des autres en insistant seulement sur celle de Gary qui aura de véritables conséquences. Il y a un certain flou (artistique ?) dans les relations qui se nouent et se dénouent. L’important est la place tenue par Karole (Léa Seydoux) qui doit prochainement épouser Toni (Denis Menochet) alors que celui-ci est dans l’incapacité de procréer. Rebecca Zlotowski montre bien la place tenue par Karole dans ce milieu. Sur son visage on lit une certaine forme de résignation (voir les poches sous ses yeux), ce qui ne l’empêche pas d’afficher un mélange de force et de faiblesse. Un physique qui ne passe pas inaperçu, bien mis en valeur par un short court et un débardeur quand elle se place à côté de Gary à l’arrière d’une voiture où ils se retrouvent en contact inattendu. L’attirance réciproque saute vite aux yeux et la caméra montre en particulier la sensualité de Karole liée à la texture de la peau de son interprète (cheveux courts tirés en arrière). Le film associe bien la luminosité du sud avec l’éclat de la jeunesse sexy de Léa Seydoux. On remarque également la présence imposante des tours de refroidissement de la centrale, repères oppressants malgré l’esthétique des formes.


La B.O. signée Rob contribue à faire de ce film une réussite qui doit à sa crédibilité scientifique. D’ailleurs, la réalisatrice n’hésite pas à dire que son inspiration doit au roman La centrale d’Elisabeth Filhol dont je recommande la lecture. Même si le film n’est pas une adaptation du roman, les deux œuvres en disent beaucoup sur ceux qui travaillent dans le milieu nucléaire, sans faire dans le pro ou l'anti. Un film à voir mais probablement pas à revoir. En d’autres termes, en ce qui concerne le nucléaire, j’ai eu ma dose !

Electron
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le 30 août 2013

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