Il aura fallu presque vingt ans à The Plot Against Harry pour trouver son public, le film étant sorti dix-neuf années après sa réalisation grâce à différents festivals. C’est une aubaine que de pouvoir le découvrir aujourd’hui tant il constitue une singularité dans le paysage codifié d’un genre, le polar sur fond de mafia, qu’il croise avec celui de la comédie de mœurs. Michael Roemer articule deux milieux antagonistes, celui du marché noir et des paris illégaux au sein duquel ledit Harry tente de retrouver sa place après une détention longue, celui de la grande famille juive où il apparaît tel un étranger. Il s’agit alors, pour le personnage principal, de reconquérir ses droits et son territoire ; hanté par son statut de revenant, contraint à la posture de spectateur d’une ville en constante mutation, il se heurte pourtant aux limites de son ambition et au déboulonnage systématique de la statue qu’il essaie, tant bien que mal, d’ériger.

Le style alerte du long métrage, composé de séquences assez brèves et montées avec rythme, énumère les déconvenues essuyées dans une temporalité comme figée, sans repères de date, de jour ou d’heure. La préposition « against » révèle d’emblée l’acharnement du monde entier sur un individu persévérant, sans que le cinéaste ne s’y complaise ; et c’est certainement sur ce point que The Plot Against Harry tire sa plus grande force, dans le savant dosage entre drame et comédie occasionnant une suite de situations drolatiques mais jamais hilarantes – tonalité qui eût été ici malvenue. La clausule orchestre une réconciliation bienvenue de celui que l’on peignait sous les traits du Juif errant, au diapason d’une confession religieuse célébrant unions et réunions. Le recours à des comédiens amateurs confère enfin une authenticité dans l’interprétation, qui contribue à faire du film une franche et singulière réussite.

Créée

le 15 mai 2024

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