Le désarroi de la jeunesse tunisienne

Très belle surprise avec ce film, en premier lieu une chronique sociale de la Tunisie actuelle, portant notamment sur la jeunesse de ce pays. L'action se situe trois ans après le printemps arabe, qui a vu le départ de Ben Ali, poussé dehors justement par cette jeunesse.

Si M.A.M ne vient plus acheter des appartements défiscalisés au nom de ses parents et si Eric Besson a divorcé de la nièce du dictateur déchu, s'est aussi installée avec le départ de ce dernier une forme de crise économique larvée : les industriels français sont allés implanter leurs usines low cost au Maroc, jugé plus stable politiquement, et Peugeot voit ses ventes chuter. C'est pour cette raison qu'Hedi - commercial chez le constructeur automobile - part prospecter et rencontrera Rim. Le film nous dépeint avec beaucoup de finesse une société comme figée à mi-chemin dans son évolution vers l'occidentalisation (à forte teneur coloniale tout de même) alors que perdurent les structures et les pratiques traditionnelles : religion, famille, bakchichs.

Rim est animatrice-danseuse dans un club de vacances pour touristes allemands, quasi déserté pour cause de terrorisme. Elle est émancipée, indépendante mais doit faire des piges dans tous les pays méditerranéens pour subvenir à ses besoins. Hedi travaille pour une entreprise française, mais les vents de l'économie lui sont défavorables. Tous ses potes sont au chômage. Quant à la promise d'Hedi, si elle est d'un milieu aisé, c'est avant tout une jeune fille "traditionnelle" que l'on marie en échange d'une dot, après maintes réunions des familles au grand complet. Enfin, le grand frère d'Hedi, immigré en France et marié à une française, ne revient au pays que seul et lorsqu'il ne peut pas faire autrement.

Les acteurs sont très bon et jouent juste.Le film dépeint avec beaucoup de sensibilité et de sobriété la relation naissante entre Hedi et Rim, et la fin, poignante, est ouverte. Sans délivrer aucun message définitif : l'histoire de Rim et d'Hedi, mais aussi celle du pays, reste à écrire.