j’ai une tendresse particulière pour Hugo Cabret. Un film à des années lumières des films de gangster qui ont fait le succès de Scorsese. Hugo Cabret nous transporte dans le Paris de 1930, un Paris de carte postal totalement assumé : les couleurs ne sont pas réalistes et donne une ambiance féerique à une histoire qui ne l’est pas.
L’essentiel de l’intrigue se passe à la gare de Lyon. Dans ses entrailles inaccessibles aux voyageurs, habite Hugo, devenu orphelin. C’est là qu’il prend soin de l’horloge de la gare au milieu de ses énormes rouages. Et puis il y a l’espace public de la gare avec ses habitués, ses romances qui se tissent au milieu du flot incessant des voyageurs, la vendeuse de fleurs, l’inspecteur Gustave à la jambe de fer, blessé de la grande guerre, d’autre encore mais surtout, il y a… le grand George Méliès ! Tombé dans l’oubli, il tient une petite échoppe de jouet et vit dans l’amertume.
Ce film est avant tout un hommage à la période des films muets et tout particulièrement à Georges Meliès dont l’histoire se révèle peu à peu grâce à Hugo et la petite-fille de Mélies, Isabelle. Tous deux vont tenter de comprendre le mystère qui entoure le vieil homme jusqu’à découvrir le rôle essentiel qu’il a joué dans la naissance du cinéma.
Les clins d’œil et hommages sont nombreux : projection de nombreux extraits de courts-métrages, la célèbre scène de Harold Lloyd suspendu à une horloge qui est reproduite ici lors de la fuite de Hugo, la présence du mystérieux automate autour duquel se noue toute l’intrigue – Méliès, en effet, était passionné par les automates et en avait toute une collection – ; les séquences qui se déroulent dans le studio cinématographique en verre de Méliès rendant de façon très vivante la « folie » inventive et chaotique qui se déployait lors des tournages de ses film. Scorsese a choisi de recréer le tournage du Royaume des fées, qui est le court-métrage de Méliès que je préfère. Il a reproduit ce que Méliès appelait ses « trucs », tels les apparitions et disparitions de personnages ou les effets pyrotechniques qu’il utilisait généreusement.
Ce film est l’adaptation du roman : L'Invention de Hugo Cabret de Brian Selznick. C’est une histoire qui a personnellement touché Scorsese :
On m’a donné le livre voilà environ quatre ans, et ce fut un choc, une vraie révélation. Je me suis assis et je l’ai lu d’une traite. Je me suis tout de suite reconnu dans l’histoire de ce garçon, sa solitude, son lien avec le cinéma, les rouages de la créativité. (Scorsese)
La réalisation est superbe dès l’ouverture du film avec l’impressionnant travelling qui nous introduit dans le monde de la gare jusqu’au visage de Hugo observant ce qui se passe, caché derrière l’horloge ou bien encore la séquence spectaculaire de l’accident de train qui reproduit un événement qui s’est déroulé en 1895 à la gare Montparnasse et le superbe plan séquence qui clôture le film, elle répond au plan séquence d’ouverture mais cette-fois ci il nous introduit dans une maison chaleureuse, le nouvel lieu de vie de Hugo.
Hugo Cabret a bénéficié de grands moyens et le résultat est enchanteur du moins si on accepte le parti pris esthétique du film qui ne vise pas le réalisme. Comment rendre la « féerie » des films de Méliès sans adopter le même esprit ? Pour ma part, étant fan de Méliès, je suis touchée par cette œuvre de Scorsese où se mêlent drame, humour et histoire du cinéma.