Je vais pas me cacher derrière de futiles mensonges ou tout simplement tenter d'esquiver quoi que ce soit mais Steven Spielberg fait partie de mes cinéastes favoris. Oh bien sûr, sa carrière est entachée de films moyens voire tout simplement ratés. Mais comment ne pas prendre en compte le travail de ce faiseur de rêves. Qui n'a jamais ressenti de l'émotion devant l'une de ses oeuvres? Comment oublier le premier véritable blockbuster qu'était Les dents de la mer? Comment oublier son parc à dinosaures, Jurassic Park? Comment oublier l'émotion ressentie devant des films comme E.T. l'extraterrestre, où j'avoue toujours verser une larme sur la fin, ou pour La liste de Schindler?
Je ne vais pas m'étendre de trop sur Il faut sauver le soldat Ryan. Parce que je crois que j'aurai énormément de mal à être subjectif. Je me souviens encore de la première fois que je l'ai vu. Je devais avoir douze ou treize ans. Je me rappellerai toujours la façon dont le film m'a pris aux tripes. Cette violence qui vous prends à la gorge. Jeunes comme vieux. Je me souviens avoir vu cette oeuvre grâce à mes grands-parents qui m'avaient refilé à l'époque leur bonne vieille VHS. La scène du débarquement est probablement l'une de celles qui m'a le plus marqué dans toute l'histoire du cinéma. On est bien loin de ces soldats qui tombent de manière académique et héroïque dans Le jour le plus long. Non, l'horreur de la guerre rattrape le specateur. Dont moi, alors jeune ado... Encore aujourd'hui, cette même scène me prend toujours aux tripes. Je revois souvent ces soldats vomissant dans les barges de débarquement, ce gars dont les viscères pendouillent et qui hurle après sa mère, de ces quelques bougres prenant feu ou de ce type cherchant après son bras. A Omaha, environ 2500 américains meurent. C'est le jour le plus sanglant de l'histoire de l'Amérique depuis une bataille de la guerre de Sécession.
Ce qui me fait enrager, c'est qu'on reproche à Spielberg de faire un film patriotique. J'ai envie de répondre à ces gens que c'est totalement faux. Le metteur en scène ne montre que les Américains alors que des Canadiens ou des Britanniques ont débarqué me direz-vous. Je vous répondrai vrai, mais ils ont connu une si faible résistance que je ne vois pas comment on pourrait les montrer dans le film. Hormis peut-être les Canadiens qui perdront un homme sur dix. Mais on ne parle pas non plus des Américains à Utah. Oui, Spielberg débute et termine presque avec ce drapeau américain flottant dans le cimetière. Mais qui ne s'est jamais senti l'âme d'un patriote au moins une fois? Il y a le patriotisme que l'on montre et dont on ne nous oblige pas à adhérer et puis il y a celui qui parle d'une Amérique sauvant le monde. Et puis aux Etats-Unis, on est éduqué à devenir des patriotes. Avec les quelques indices laissés par Spielberg, je me permets de dire qu'il s'agit du premier cas. Au fond, il y a ce soldat sur la plage qui hurle de ne pas tirer sur des Allemands en train de cramer. Il y a aussi ceux qui veulent exécuter froidement un boche après la mort de leur médecin. Et puis il y a ce petit interprète qui, avec la guerre, perd ses valeurs et décide de tuer le même boche beaucoup plus tard. Foutue guerre...
Et puis je trouve tout de même que le film de Spielberg n'est pas vide de sens. Certes, ce n'est pas aussi fouillé qu'un Apocalypse Now ou encore que La ligne rouge. Mais tout de même: il y a ces interrogations de soldats quant au sens de la guerre. Risquer sa vie pour un homme à qui on lui promet de vivre. La guerre est remplie de paradoxes. Et puis au fur et à mesure de leur mission, ces hommes, à force de voir leurs amis tomber souhaitent eux-mêmes leur retour. On retrouve aussi de manière déguisée le thème de Spielberg (et là je m'avance beaucoup). L'enfance est souvent présente. Il y a cette fille que le soldat joué par Vin Diesel veut sauver. Il y a le capitaine Miller qui hurle à un de ses compagnons que c'est lui sa mère. Et puis il y a ces hommes face à la mort. Mourants. Ils redeviennent un peu des enfants qui ne souhaitent que revoir leur maman ou retourner dans un foyer qu'ils ne reverront pourtant jamais.
Et pour conclure, il y a cette phrase de Miller à Ryan, le premier est agonisant et le second le regarde. Miller lui dit: "Mérite-ça". Mérite le sacrifice de tous ces hommes. Mérite ta vie. C'est le message délivré à Ryan. S'il est pris dans un contexte intime ici, il est très facile de l'élargir. Que toutes ces vies sacrifiées permettent à d'autres de réussir la leur. De ne pas répêter les erreurs du passé. Ryan aura une vie des plus normales et se pose lui-même encore la question de savoir si c'était ça que Miller voulait, lorsqu'il regarde la tombe du capitaine.
Et puis il y a ce cimetière, avec toutes ses tombes, qui n'a rien de fictionnel. Spielberg invente une histoire mais n'oublie pas derrière le côté véridique. On notera que le cinéaste et ses collaborateurs ont réalisé un travail énorme quant au respect historique.
Bien sûr, je ne suis pas objectif. La guerre m'a toujours passionné. Ce film m'a pris aux tripes étant beaucoup plus jeune. Mais n'est-ce pas là l'apanage des grands films que de toujours convaincre dix, vingt ans ou bien plus tard encore? Il faut sauver le soldat Ryan fait partie de ceux-là.

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le 6 mai 2011

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batman1985

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