On sort de Knight of Cups comme d'un long rêve. Il est difficile d’appréhender ce film autrement que comme une entité nébuleuse et insécable, où il est impossible de se remémorer une scène en particulier tant on est perdu pendant le visionnage. Nous sommes ainsi plongés dans la tête de Rick, scénariste trentenaire ayant sombré dans l'apathie et la débauche, sans doute depuis la mort de son frère. Fâché avec son père, brouillé avec son frère, errant de fille en fille, de fête en fête, il cherche désespérément quelque chose sans qu'il ne sache quoi. 
Une histoire banale, universelle même, mais qui nous est ici transmise presque malgré nous, sans qu'on ne s'en rende compte Rick nous devient familier, on apprend à le connaître. Son passé, son indifférence au monde qui l'entoure, sa fascination des femmes, tout nous est tantôt montré, tantôt raconté, la voix off s'estompant parfois au beau milieu d'une phrase pour donner le relais à l'image. Pourtant la narration apparaît comme quasiment secondaire, diluée dans le film, car ce qui nous frappe avant tout c'est l'extraordinaire beauté des images. Malick multiplie les effets de montages déconstruisant la chronologie du film, les plans sublimes et les techniques cinématographiques, de l'emploi de la courte focale aux films Super 8.
Malheureusement c'est là aussi que Knight of Cups trouve sa limite, car si nous sommes perdus, le film semble bien souvent perdu avec nous, ne sachant plus vraiment où aller ni quoi dire il se répète et ça se sent. De longues portions de film sont ainsi entièrement dévouée à la contemplation, ce qui à défaut d’être désagréable, signe un aveu de faiblesse de la part du réalisateur. A l'inverse certains passages deviennent douloureusement sentencieux, les personnages nous assènent de lourds "Où tout ça nous mène ?" et  "Qui sommes-nous ?" Ainsi que des généralités pseudos-profondes sur la vie dignes d'un journal intime de lycéenne.
Terrence Malick ne signe donc pas ici une de ses plus grandes œuvres mais réalise au moins un film onirique plaisant à voir et comportant quelques moments de grâce.
Sadrim
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le 2 sept. 2016

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