L’affaire SK1 retrace l’affaire Guy George, un tueur en série très violent s’attaquant aux femmes qu’il viole puis poignarde durant les années 90 à Paris. Choisissant en angle d’attaque de s’intéresser à la fois à la traque policière qui fut compliquée puisque plusieurs brigades différentes enquêtaient sur les crimes du même tueur sans forcément les rapprocher, et en même temps au procès très médiatique et saisissant.

5563810.jpg-r_x_600-f_jpg-q_x-xxyxxS’inspirant d’un livre sur la traque policière, et adoptant un point de vue hyper réaliste, le film ne choisi pour autant pas véritablement de héros. Il y a ce flic qu’on suit, Charlie, qui fait figure de héros pendant 90% du film, mais durant le procès il n’est qu’un simple spectateur qu’on fait revenir à la fin pour la conclusion. Il n’y a même pas cette relation entre procureur et flic comme on peut l’avoir dans la série Law and Order à laquelle j’ai pensé car la trame narrative est assez proche ainsi que l’aspect très factuel de l’enquête. Je pense que l’aspect réaliste est à la fois bien fait, la retranscription historique, le Paris des années 90 fonctionne très bien, mais presque trop, certaines scènes auraient pu être éludée pour dynamiser le récit et ne semblent être présente que pour démontrer le soin apporter au décor parisien. L’autre problème posé par cet hyper réalisme c’est qu’il enclenche un côté factuel. On sent une volonté quasi documentaire, et du coup, les personnages peu humanisé, peu investi par le film, ne sont que des gens dans une enquête.

l_affaire_sk12Retransmettant avec soin tous les détails de l’enquête, la guerre des polices entre les différentes brigades, faisant même un petit écart avec les attentats du métro Saint Michel, le film se perd souvent dans des détails. Et pas que. La narration est hésitante. Au début on voit la brigade dans son intimité, on comprend que l’affaire piétine et les ronge, et puis on s’éloigne de cela, on rentre dans la guerre des polices et chaque meurtre devient juste des faits, des détails sordides auxquels Charlie s’accroche avec désespoir, mais à ce moment il n’est déjà plus qu’une silhouette, il n’y a pas vraiment de héros, juste des faits qui s’allignent les uns après les autres. Ensuite il y a Elisabeth, la victime qui a survécu. Mais elle aussi est traitée puis digérée. Et puis il y a le procès. On dirait des blocs distincts collés les uns aux autres. Le film aurait gagné à ne traiter qu’un seul point de vue, et si l’enquête est plutôt bien traitée, le procès lui est bien plus intéressant.

l-affaire-sk1-marianne-denicourtA l’enquête, il manque le point de vue des victimes. Toutes sont juste des corps ou des photos. Si l’on avait eu des scènes montrant les victimes avant leur mort ou subissant les actes infâmes de leur bourreau et meurtrier je pense qu’on aurait gagné en intensité émotionnelle. Peut-être qu’il aurait fallu plus fictionnaliser la chose, moins s’en tenir aux faits, essayer de coller véritablement à la peau de l’enquêteur et plonger dans sa psyché, comme ça a pu être fait dans Le silence des agneaux par exemple. (D’ailleurs petit détail, mais vu la finesse de la reconstitution des décors, les scènes de crime sont un peu propre au niveau des murs, on nous dit qu’il y a du sang partout mais quand on visite une scène de crime il y a bien souvent qu’un corps très abimé mais le reste est nikel propre.)

648x415_adama-niane-nathalie-baye-affaire-sk1Quand au procès, narrativement il aurait mieux valu choisir de le mettre en parallèle avec les aveux uniquement. Car ce qui est tout à fait glaçant, c’est le fait que le tueur ai tout avoué à la police leur demandant quasiment de ne jamais le laisser sortir, puis au procès il nie tout en bloc, fanfaronne presque, charme tout le monde (ce qui n’est pas retranscrit dans le film d’ailleurs) pour céder devant les analyse de sang et un geste malheureux qui le trahit (lui en revanche est bien mis en scène) et tout avouer. C’est cette ambivalence qu’on retrouve aussi dans sa description des meurtres, la manière dont il approche ses victimes tout en sachant ce qu’il va leur faire, son absence d’explication mais sa conscience de ce qu’il va faire, qu’il fera toujours, il le dit lui même, si je sors, je tue à nouveau.

Malheureusement ce point là n’est traité qu’à la fin dans les 30 dernières minutes. Dommage. A mon sens on est passé à côté de l’essentiel de la chose. La faute à une hésitation entre fiction et documentaire, à un manque de décision sur ce qu’on traire, vouloir tout faire donne forcément quelque chose de bancale. D’autant qu’il manque de nombreux éléments qui avaient fait polémique à l’époque. En bref, s’il est quand même bien foutu, techniquement parfait, la narration fait défaut, les choix de traitement et de point de vue pas assez pointu, le scénario il aurait mérité d’être mieux fichu. Tout n’est pas à jeter, mais L’affaire SK1 est avant tout frustrante, ne parvenant à correctement traiter son sujet.
Sophia
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le 6 févr. 2015

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