Défense de l'art culinaire

Aujourd'hui, L'Aile ou la cuisse est devenu une comédie très populaire dans l'esprit des gens, mais personnellement dans la filmographie de De Funès, je ne le place pas au même niveau que les films de Gérard Oury, ou encore Jo, le premier de la série des Gendarme, le Grand restaurant ou même le Tatoué... Son comique n'est pas toujours subtil ni très fin, mais il est vrai qu'il réserve de très bons moments et quelques scènes mémorables, comme celle de la visite intempestive de l'usine Tricatel où De Funès et Coluche découvrent effarés les secrets de fabrication d'un gargotier qui produit une nourriture infâme. A noter que Julien Guiomar campe un remarquable portrait de ce genre d'individu sans scrupules qui prétend produire de la nourriture saine et pratique. Il faut saluer donc le propos du film qui tentait une des premières dénonciations de la malbouffe en France, et ce bien avant l'apparition des McDo et autres chaînes de fast-food, c'était innovant.
On retient surtout de ce film la rencontre entre 2 grands comiques, 2 conceptions du comique différentes mais qui se révèlent ici complémentaires et qui font donc bien fonctionner une intrigue au scénario plutôt original qui laisse libre cours à leur fantaisie d'acteur. A l'époque, Coluche était surtout connu pour ses prouesses au music-hall et ses sketches fameux comme "le Schmilblick" ou "C'est l'histoire d'un mec"... Ce film est son second puisqu'il avait tourné juste avant les Vécés étaient fermés de l'intérieur avec Jean Rochefort, et il lui donnera finalement l'envie de faire du cinéma. Son association avec De Funès est donc réjouissante, le grand comique dans le rôle d'un expert en gastronomie qui n'est pas sans rappeler les célèbres Gault & Millau (rédacteurs d'un fameux guide gastronomique redouté des restaurateurs), est encore dans un personnage excessif, mais il le joue plus léger car il sortait d'ennuis de santé graves dont il s'était remis peu avant le tournage. L'entente avec Coluche fut parfaite et respectueuse des deux côtés, c'est ce qui donne aussi à ce film son côté attachant de classique de la comédie française.