Ça tangue frère !
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le 24 oct. 2013
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Tourné 5 ans après le gouffre financier que représenta l'échec public du somptueux Heaven's Gate (La Porte Du Paradis), L'Année Du Dragon, produit par Dino De Laurentis et scénarisé par Oliver Stone, pourrait être considéré comme une sorte de suite indirecte du chef d’œuvre de Michael Cimino, Voyage Au Bout De L'enfer. Tant les sujets abordés semblent en phase avec leur époque.
Plutôt que de suite directe il s'agirait plutôt d'une continuation formelle de son grand manifeste sur la guerre et ses conséquences. Nous sommes au milieu des années 80, Stanley White (Mickey Rourke) dans ce qui est probablement l'apogée de sa carrière) interprète un flic dur à cuire et implacable qui mène une enquête suite à une série d'assassinats dans le chinatown New-yorkais.
Rourke endosse la défroque d'un policier d'origine polonaise, il pourrait être un descendant direct du Michael Vronsky à qui De Niro prête ses traits dans Voyage au bout de l'enfer, taciturne et totalement décidé il nage en permanence à contre courant. Il faut voir chacune de ses incursions dans le champs d'action d'une scène, où il semble entrer en force. Il se bat contre la pègre, mais aussi contre le système politique et policier qui a déjà baissé les bras, il endosse la carapace de l'ultime combattant seul face à la meute. En cela la scène où il affirme à son meilleur ami, flic également qui lui semble avoir baisser pavillon, "si je me débine, tout le système se débine" est lourde de sens.
Stanley White, nom d'emprunt, représentant l'intégration parfaite puisqu'il va jusqu'à changer son patronyme, affronte le chef d'une triade redoutable, Joey Tai, interprété par John Lone, vu entre autres dans Le Dernier Empereur de Bernardo Betolucci, un gangster de la diaspora asiatique New-yorkaise appartenant à la nouvelle génération. Il est la jeunesse qui veut prendre le pouvoir, moderniser l'organisation, quitte à se débarrasser de ses anciens leaders, et assouvir son implacable domination. Il est en son sens également totalement implacable, et représente d'emblée le parfait adversaire pour le flic joué par Rourke.
La notion de dualité, cher à l'univers du western sera présente tout au long du film, et trouvera son apothéose dans un final éblouissant et lourd de sens. Un face à face sur un rail, le chemin de fer dont la construction originelle fût l'apanage de la communauté asiatique notamment. Les allées-retour dans le temps sont une constante permanente chez Cimino. Et ce qui en découle, c'est la nostalgie d'un temps révolu, parfois pour les valeurs qu'il a laissé s'éparpiller sur le chemin, parfois pour les erreurs et les regrets égrainés par ses personnages centraux.
Ce qui est très fort et très Fordien chez Cimino, il en est d'ailleurs l'un des plus dignes héritiers, de ce cinéma minéral et ouvert à l'espace, c'est cette constance volonté de repousser les limites du champs pour avancer, mais toujours en sachant se retourner et ne pas oublier les racines originelles. D'où se constant aller-retour temporelle caractéristique de son cinéma.
Mais c'est également un cinéaste qui sait faire naître l'émotion par ce qu'elle a de plus simple, le rapport à l'autre. Rarement un cinéaste ne m'aura personnellement autant ému dans sa manière d'appréhender les relations intimes, amicales ou passionnelles, entre les gens.
En plus d'un polar de très haut niveau, L'Année Du Dragon est l'un des derniers représentants d'un cinéma Hollywoodien ouvert aux grands espaces et donc au champ des possibles, avec toujours un souci de se poser des questions tout en continuant à aller de l'avant, quitte à défoncer des portes et à être interprété et souvent mal interprété par une critique bornée et idéologiquement centrée.
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Créée
le 10 mars 2016
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