Il vaut mieux ne pas juger ce film à l'aune du reste de la filmographie de Mizoguchi, car la comparaison ne joue pas en sa faveur.


Il s'agit d'un film court (55 mn) sur la vie de Miyamoto Musashi, figure historique devenue l'icône du samouraï, personnage fascinant à la fois par son enseignement qui repose sur la quintessence de la doctrine zen et par son côté anticonformiste (il serait l'inventeur du style de combat à deux sabres). Personnage connu pour avoir défait à lui tout seul un clan venu le rosser, les Yoshioka, et pour avoir vaincu un colosse, Sasaki Kojiro, équipé d'un sabre gigantesque surnommé la "perche à sécher".


Ici, on s'en tient au squelette de l'histoire : le duel de Musashi contre les Yoshioka, puis il accepte à contre-coeur comme disciple deux jeunes gens (un garçon et une fille). Le garçon se fait tuer par Sasaki Kojiro, un très bon bretteur, hélas dévoré par l'ambition. Un an plus tard, Musashi le bat en duel sur l'île Funajima. Il part, laissant la jeune femme devenir bonne soeur, alors qu'il l'aimait.


Le style est assez heurté, comparé aux 47 ronins, ce n'est vraiment pas la même qualité : beaucoup de plans fixes, pas ou peu de grue. Cette fois il y a de la violence, elle arrive même assez vite, on ne passe pas les 10 premières minutes sans avoir le fameux combat au double sabre.


Un plan de Musashi au pied d'une cascade me fait penser au Siegfried de Lang.


Ho, le découpage reste bien, par exemple la scène où Musashi fait irruption dans le dojo désert où il espère trouver Kojiro. Mais que le film fait fauché ! Ou bien c'est moi qui projète en imaginant ce que devaient être les conditions de production d'un film dans le Japon de 1944 ?


Certaines chorégraphies au sabre ont vraiment mal vieilli : la mort de Genichiro ou le moment où Musashi est attaqué en traître, en sortant de son auberge, ne sont pas bien convaincants.


La scène où la barque de Musashi part et où la jeune fille lui dit qu'elle attendra là pour prier est émouvante : la caméra reste sur elle, abandonnée sur la jetée.


L'arrivée de Musashi sur l'île est délibérément étirée, ce qui respecte la lettre du roman et introduit une tension forte.


Un film qui semble de commande, où l'on reconnaît par moment la poésie de Mizoguchi (le départ des barques...), mais qui n'a pas grand-chose d'original et se laisse porter par une belle histoire. Le leid-motiv est qu'un combattant ne se bat jamais pour la vengeance : Musashi bat Kojiro non pour venger son disciple mort, mais pour mesurer son art à celui de son rival. Son côté ascétique est ici très accentué, là où le héros du roman de Yoshikawa était humain, anticonformiste.

zardoz6704
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le 8 mai 2016

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