L'année 1952 fait date dans l'histoire du cinéma avec la sortie de Bwana Devil, premier long métrage réalisé en 3D. Une innovation technique dont l'intérêt commercial n'échappe pas aux grands studios qui y voient le moyen de faire revenir en salles un public de plus en plus captif de son petit écran. C'est ainsi que la Warner lance l'idée d'un remake en relief de Mystery of the Wax Museum, sorti deux décennies plus tôt. Pourquoi ce film-ci en particulier ? Et bien tout simplement parce qu'il s'agit d'un des derniers films tournés en Technicolor bichrome et que l'on peut donc facilement communiquer dessus. On remarquera au passage que ces réflexes commerciaux ont perduré sans dommage jusqu'à aujourd'hui et c'est peut-être cela le plus navrant. Comme il faut aborder avec un minimum de sérieux la question artistique, on confie le bébé à André de Toth, travailleur consciencieux qui s'est déjà exercé aux contraintes de la série b. Mais au-delà de son aspect économique ou technique, House of Wax a la saveur du challenge personnel pour un cinéaste, borgne faut-il le rappeler, qui aime imprimer sa patte sur les différents univers qu'il croise (western, film noir...).
Reprenant les grandes lignes de la trame initiale, l'intrigue écrite par Crane Wilbur se distingue par son refus de créer tout suspense autour de l'identité du meurtrier. Même si celle-ci n'est véritablement dévoilée qu'a la fin du métrage, rien ne sera entrepris pour semer le doute dans l'esprit du spectateur. Un parti prit plutôt judicieux car il permet de concentrer les enjeux du film et d'investir pleinement la dimension esthétique. Faute de suspense, c'est le mystérieux qui vient charmer notre rétine en colorant une atmosphère digne du cinéma gothique des années 30 : le jeu sur les luminosités, le travail sur la couleur et les angles de vue vont venir exalter une ambiance gentiment anxiogène, qui servira de modèle en quelque sorte à la Hammer pour ses films à venir. On retiendra ainsi quelques scènes joliment esquissées comme l'incendie dans le musée de cire, au pouvoir suggestif convaincant, ou encore cette poursuite dans des ruelles sombres, au cours de laquelle notre imaginaire est mis à mal par le jeu sur la profondeur de champ. Visuellement soigné, House of Wax dégage une atmosphère qui satisfera les amateurs d'épouvante old school : tout y passe, ou presque, du festival de figures inquiétantes (ombres maléfiques, sbire à la mine patibulaire (hello Mr Charles Bronson!), tueur mystérieux tout de noir vêtu, digne d'un Giallo) jusqu'au cadre dont l'étrangeté est parfaitement soulignée (milieu urbain brumeux, ténébreuses bâtisses au style victorien...).
On regrettera le recours à des effets sonores outranciers (musique, cris...), des personnages archétypaux parfois désespérants (les femmes réduites à l'état de demoiselles en détresse) et l'utilisation d'un humour qui tombe aussi lourdement que cette visiteuse qui tourne de l’œil en plein musée. L'emploi de la 3D, argument prépondérant du film quand même, s'apparente à un gadget de luxe qui renforce agréablement l'esthétisme de certains passages (la scène de l'incendie notamment) mais ne sert nullement l'intrigue. Les scènes dédiées à cet effet (le music hall, le joueur de jokari) ponctuent artificiellement le récit et ne participent jamais à l'action. Une fois sa curiosité technique déflorée, House of Wax peine à masquer ses nombreuses faiblesses : le rythme est mal maitrisé, les passages dialogués s'étirent inutilement, la mise en scène demeure relativement plate, comme l'intrigue qui perd vite de son intérêt.
André de Toth essaie tant bien que mal de développer un fond dramatique en mettant en parallèle destin humain et représentation artistique : une fois privé de toute beauté (idéologique comme physique) notre homme met son talent au service du sordide, plaçant l'horreur au cœur de son musée, transformant le meurtre en œuvre d'art. Seulement, si le jeu sur les apparences (confusion entre mannequins de cire et être de chaire) donne un peu de piquant à l'histoire, ces bonnes intentions ne perdurent pas et ne peuvent sauver le récit d'une relative indifférence. House of Wax demeure une petite curiosité, à voir pour son ambiance et son acteur vedette, Vincent Price, créateur de relief à lui tout seul.