Pourquoi ai-je une furieuse envie de revoir la version Disney ?
Je ne connais pas la véritable histoire de la Belle et la Bête (si tant est qu'il y en ai eu une avant les films précédents celui-ci) et je n'ai pas vu la version de Cocteau, mais je connais celle des studios aux grandes oreilles et ses musiques magnifiques.
Si la Belle et la Bête de M. Gans jouit d'une esthétique très appréciable notamment pour ce qui est des décors, il pêche par tout le reste.
D'un point de vue du scénario, tout est prévisible à des centaines de kilomètres (et sans jumelles, s'il vous plaît). Que ce soit l'identité réelle de la biche "dorée", le devenir de la promesse du prince vis-à-vis de sa première belle, l'avenir de Perducas ou l'identité, à nouveau, de la narratrice, il n'y a absolument aucune surprise. De fait, on s'ennuie. Le seul point qui pourrait un poil surprendre, c'est sur la décision finale du prince [SPOIL](pourquoi rester dans son grand château au milieu des serviteurs quand on peut aller se vautrer dans la boue, du purin jusqu'aux genoux ?)[/FIN DU SPOIL]
D'un point de vue du rythme ensuite, c'est mal dosé. L'intrigue met trop de temps à se mettre en place et se perd dans des détails dont on se serait bien passé (la déchéance puis le retour en grâce du père, avec deux ou trois bémols en sus). L'histoire est sans cesse entrecoupée de l'apparition de ces enfants dont on connaît déjà l'origine et de ces gros plans sur une narratrice dont on connaît déjà le nom (donc, c'est inutile et ça brise la magie de certaines scènes). Et puis, c'est répétitif : Belle s'endort, la nymphe lui balance du pollen qui marmonne, Belle court au ralenti dans un décor torturé vers un miroir gigantesque et liquide, paf ! On voit le Prince sous son apparence originelle jouer de la flûte à son ex-donzelle. Et quand ce n'est pas ça, le spectateur a le droit à Belle qui se balade dans le château sans rien découvrir avant d'aller dîner, seule, face à une table garnie pour trente convives (faut dire, elle mange qu'une fois dans la journée, ça n'étonnerait personne qu'elle ait les crocs).
Si on enchaîne sur les personnages, c'est peut-être là où le bât blesse le plus. Entre Belle qui ne l'est pas, la Bête qui est laide sans parvenir à faire peur et le méchant qui ne l'est pas non plus, il y a de quoi, en effet, avoir une furieuse envie de se jeter sur le DVD de la version Disney du conte.
Personnellement, je ne trouve pas que Léa Seydoux soit d'une beauté renversante (et non, un corset bien serré ne rend pas une femme plus belle qu'elle ne l'est). Surtout qu'elle joue comme une truffe, passant de l'inexpressivité à la crise de nerfs en deux secondes et sans raison, rendant le personnage complètement tarte.
Pour la Bête, elle n'est rien de plus qu'un gros chat persan sur lequel on aurait apposé la voix de Vincent Cassel. Si je repars de la version Disney, la Bête est déjà une créature plus indéfinissable : mélange de lion, d'ours, de sanglier, de taureau et de cheval, elle a aussi une voix plus caverneuse qui colle avec la carrure de la bestiole (et qui n'a rien à voir avec celle du prince). D'ailleurs, c'est une bête plus qu'un humain : elle marche et court à quatre pattes, lape sa gamelle, détruit tout sur son passage, poussée par son instinct et sa rage intérieure de savoir qu'elle va peut-être passer sa vie sous cette forme hideuse. Chez Gans, nous avons un homme avec des poils sur le visage et un sérieux besoin d'une manucure, mais qui se déplace debout, qui parle normalement et qui, certes, de temps à autre, chasse un sanglier sous le portrait de celle qu'il a tuée sans le vouloir (alors là, ce passage, faut m'expliquer l'intérêt...). La Bête a tout perdu de sa monstruosité et de sa fragilité pour devenir une créature ridicule et hautaine.
Pour le méchant (ici, Perducas), il a le charisme d'une chaussette trouée, avec une balafre à peine visible sur le nez. Il pique bien deux-trois babioles dans le château de la Bête, suivi de sa troupe de larbins décérébrés qui se démultiplient comme par magie dès lors qu'il faut porter un bélier (avec un mec dessus, comme si c'était déjà pas assez lourd à trimballer), mais rien d'extraordinaire non plus. Et puis, il se coltine cette cartomancienne qui n'a pas été fichue de le prévenir pour sa blessure qui l'a défiguré et pour qui il n'a pas l'air d'avoir plus de sentiments que la Bête pour la Belle (je reviendrai là-dessus plus tard). Gaston était peut-être bête mais il avait du charisme, lui.
Et puis, il y a les autres : le père qui n'a d'yeux que pour sa dernière fille (sympa pour les cinq autres gamins), les trois frangins au caractère à peine esquissé (et dont on se contrebalance totalement de toute façon), les deux frangines ersatz d'Anastasie et Javotte (pénibles l'espace de deux secondes puis transparentes par la suite) et puis les... "tadums" (c'est ici que j'ai appris comment s'appelait ces trucs) : mélange étrange de chien et de singe qui n'ont absolument aucune utilité dans l'histoire et qui ne parviennent même pas à apporter la touche gnangnan qu'ils auraient dû amener.
En bref, trop de personnages mal exploités au final.
Je soulignais tout à l'heure l'absence de sentiments entre la Bête et la Belle. Plusieurs ici ont eu cette impression : l'histoire d'amour entre les deux tombe comme un cheveu sur la soupe. A aucun moment les deux personnages ne montrent ne serait-ce qu'une miette d'intérêt amoureux pour l'autre. La Bête m'a paru plutôt avoir toujours des sentiments pour sa femme malheureusement morte, tandis que la Belle ne s'inquiète finalement que de ses robes et son père. On n'y croie pas un seul instant alors que c'est quand même le sujet du film.
Pour le reste, il y a trop d'incohérences (des palmiers dans un jardin recouvert deux minutes plus tôt par la neige, sérieusement ?!) et de passages risibles (j'étais prête à voir apparaître le visage de Dieu façon Monty Python lorsque le dieu de la forêt se manifeste), pour que ce film acquiert ne serait-ce que la moyenne (d'autant plus après avoir revu la version Disney).