Une comédie pas totalement aboutie car elle cache mal sa nature morcelée. Il s'agit d'un film à sketchs qui ne peut pas totalement dissimuler cette structure sous son argument principal : "ne vous mariez pas".

D'autre part, elle se révèle très remuante, dynamique, parfois drôle grâce aux acteurs, à la mise en scène échevelée et surtout grâce aux bons mots de Michel Audiard.

Quel dommage que ce petit bien sympatoche soit un peu trop plombé par un seul élément fortement blâmable : sa partie avec Françoise Dorléac, Jean-Claude Brialy et Francis Blanche. Pour quelles raisons ? D'abord j'ai du mal à y croire. Peut-être qu'à l'époque le couple Dorléac Brialy pouvait encore être crédible aux yeux du grand public, aujourd'hui ce n'est plus le cas. Je souris, mauvaise langue. Non, c'est surtout le personnage joué par Françoise Dorléac, elle nous l'a déjà joué plusieurs fois par ailleurs, notamment dans L'homme de Rio et ici, elle est irritante. Trop chieuse, trop fofolle pour être vraie, trop fifille, trop fausse, trop trop. A la fin, on voudrait que Jean-Claude Brialy devienne meurtrier. Ce sketch est trop long, fatigant et pas vraiment drôle.

A la décharge de l'actrice il faut ne pas omettre de souligner que c'est sûrement Édouard Molinaro qui lui a demandé de jouer de la sorte cette hystérique. Tout le film est un peu à cette image, survolté, pétaradant. Le montage s'amuse à mettre un rythme très moderne pour le coup, haletant. C'est un style qu'on trouve chez le cinéaste sur nombre de ses premiers films. Sur la partie Dorléac, cela ne fonctionne plus. Il y a surcharge avec le jeu déjà nerveux par essence de la comédienne. Heureusement cette partie n'est que très courte, malheureusement elle clôt le film sur une mauvaise note.

Alors, focalisons-nous sur la bonne et majeure partie du film : une histoire faussement provocatrice, plus certainement naïve et un brin vulgaire qui présente les relations conjugales comme castratrices, ou du moins dévalorisantes, aliénantes à coups sûr... Pour l'homme ! Renversement social qui voit les hommes redéfinis comme des victimes des femmes. D'autant plus étonnant que le scénario est signé France Roche. J'ai du mal à dissocier son image de miss tiercé ou miss météo de la télé de mon enfance.

Ce n'est drôle que par le charme des comédiens et le talent d'écriture de Michel Audiard. Ce dernier a recours à son style le plus coloré, l'ironie et l'argot en armes maîtresses en bandoulière. Quelques saillies valent le coup d'oreilles.

Ce qui me plait sans doute autant de retrouver, outre la verve d'Audiard, ce sont les bouilles réjouies et la joie de vivre chez les acteurs. Jean-Claude Brialy est égal à lui même. Il y a aussi du Louis Jourdan chez ce type, de la facétie, un esprit primesautier, guilleret pour ne pas dire gai qui me plaît assez quand il joue avec ses copains. Il y a des accents de sincérité dans leurs échanges.

Claude Rich a cet œil qui frise qu'on lui connaît, cet amour du jeu qui peut aller jusqu'à un certain délire. J'aime beaucoup cet acteur, héros lunaire mais étrange, un peu inquiétant, souvent ironique et dégageant une pénétrante poésie.

Jean-Paul Belmondo dit drôlement bien son Audiard ! Son petit rôle de mac qui vire barman pour les yeux d'une blonde bourgeoise lui va comme un gant : il est fait d'esbroufe, de candeur, entre la grande gueule et le toupet du jeune mytho ou bien celui d'un bête con. Il est en tout cas juste formidable, très vif, très jovial. On voit bien qu'il s'amuse, mais il le fait très bien. J'avais oublié combien, il était un foutu bon acteur quand il voulait. Et là, il veut ! Il plonge à la baille en bombe, histoire d'éclabousser et faire rire ses copains.

Ne pas négliger la beauté extraordinaire de l'autre Dorléac. Je tiens à finir sur cette petite note très positive : le charme fou d'une jeune Catherine Deneuve qui joue la coquine à merveille.

Un film remuant, un peu inégal certes, mais au final rafraîchissant, pour qui aime le cinéma français de ces années là.
Alligator
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le 18 nov. 2014

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Alligator

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