Derrière ce titre bizarre "la Diligence vers l'Ouest" , se cache en 1966 le remake de "la chevauchée fantastique" de John Ford de 1939.
Ce remake a été fait par Gordon Douglas sur les bases même du western de 1939 en terme de personnages, de scénario et peut-être même de dialogues (ce point est à vérifier).
Il est de bon ton chez les spécialistes ou dans les milieux du cinéma de considérer que ce remake est inutile et donc mauvais car on ne refait pas un film "iconique" ; en fait, je ne comprends pas bien ce positionnement un peu absurde. De la même façon qu'au théâtre où un texte est joué par des troupes qui s'emparent d'un sujet puis cèdent la place à d'autres, je ne vois pas bien pourquoi le cinéma ferait exception.
Personnellement, j'ai bien aimé le "Stagecoach" de 1939 et j'ai bien aimé celui-ci. A propos de remake, il y en aura un troisième fait par Ted Post dans les années 80 mais celui-là je ne le connais pas ...
Pour revenir à notre remake de 1966, Gordon Douglas qui n'a certes pas la pointure d'un Ford mais qui est loin d'être un manchot en terme de mise en scène, a utilisé les moyens de son époque pour mettre en valeur cette histoire : le format en scope, la couleur, l'utilisation d'un hélicoptère pour mieux visualiser la fameuse poursuite ou pour donner une vue d'ensemble des paysages du Colorado.
D'abord le titre choisi par les distributeurs français n'est, une fois n'est pas coutume, pas inexact car la diligence part de la région de Saint-Louis (Missouri) pour se diriger vers Cheyenne (Colorado) et va donc bien vers l'Ouest.
Ensuite le scénario, bien connu, rassemble plusieurs personnes de conditions diverses dans une même diligence qui sera attaquée par des indiens très hostiles. Bien évidemment, certains personnages - a priori bien sous tous rapports - se révéleront être ou des lâches ou des voleurs. Et surtout, des personnes mises au ban de la société, un présumé assassin, une prostituée et un joueur vont se révéler des personnes indispensables au bon déroulement du voyage et développer des qualités comme le courage, l'abnégation et l'empathie.
En bref, c'est la belle histoire de Maupassant, Boule de suif, qui est une probable source d'inspiration de ce western. Je dis "probable" car John Ford l'aurait reconnu.
Là où le remake diffère quelque peu c'est dans le choix des acteurs effectué par Gordon Douglas.
Le personnage de Ringo qui était assuré par John Wayne qui, il faut bien le dire, crève l'écran dans Stagecoach 1939, sera interprété par un acteur, Alex Cord, qui est beaucoup moins connu. Personnellement, je trouve plutôt astucieux de ne pas avoir mis une star sur ce rôle. Quelque part, le western s'en trouve plus équilibré. C'est aussi plus conforme au personnage qui est un petit malfrat accusé d'infamie (il aurait tiré dans le dos de quelqu'un). En effet, il aura un plus long chemin à faire pour se réhabiliter aux yeux des autres et n'en aura que plus de mérite. De plus, il crée presque la surprise quand il prend, timidement, la défense de la prostituée (Ann-Margret)
Ann-Margret joue très bien son rôle. Son visage est maussade au début car elle sait qu'elle est méprisée et n'est qu'un jouet au regard des hommes. Dès lors qu'elle se rend utile pour assister l'accouchement de l'autre femme (Stéphanie Powers), épouse d'un officier et femme "bien" sous tous rapports, son visage est transfiguré. Non seulement, elle reprend sa place dans la société mais elle est reconnue par la femme qui vient d'accoucher et se prend à espérer à une vie positive avec Ringo.
En définitive, c'est presque plus beau que ces deux acteurs ne soient justement pas des stars.
Le duo Red Buttons et Bing Crosby est plutôt réussi en ajoutant une note comique dans le film. Red Buttons, c'est l'inoubliable Pocket dans "Hatari", le pendu de Sainte-Mère l'Eglise dans "le jour le plus long" ... Ici il joue le rôle d'un négociant en boissons fortes et le pourvoyeur involontaire en whisky à Bing Crosby qui joue le rôle d'un toubib ivrogne. Mais qui saura se dessouler avec du café fortement salé pour l'accouchement.
Mike Connors prend la défroque de John Carradine dans le rôle du gambler et nous offre une scène émouvante très réussie avec l'épouse de l'officier.
Et enfin, le rôle du marshall est tenu par Van Heflin qui a notablement vieilli. Il a toujours son allure renfermée et bougonne si caractéristique mais il semble un peu l'ombre de lui-même.
"La Diligence vers l'Ouest" est un western qu'on prend plaisir à regarder ne serait-ce que pour la mise en scène et les beaux paysages du Colorado. Les personnages sont plutôt sympathiques en particulier le petit couple Ringo/Dallas alias Alex Cord/Ann-Margret.