J'ai découvert "Get Carter" pour la première fois il y a 15 ans. J'étais un peu passé à côté, le considérant comme un polar bien fichu, sans plus. Je le revois aujourd'hui, le réévaluant largement.

Est-ce parce qu'entre temps je suis devenu plus mature ? Parce que j'ai vu des œuvres qu'il a inspirées ("The Long Good Friday" en tête) ? Une copie de meilleure qualité ? Ou parce que je savais cette fois à quoi m'attendre, ayant été déstabilisé par la lenteur du début lors de mon premier visionnage ? Toujours est-il que j'ai passé un très bon moment en le revoyant.

Qu'on l'apprécie ou pas, il faut reconnaître l'audace du projet. D'une part, la violence et surtout le sexe assez crus. J'ai peine à croire que certaines scènes soient passées à travers la censure de l'époque. Peut-être la HD moderne laisse-t-elle voir des détails passés inaperçus à sa sortie. Telle cette gâterie rapidement mais clairement visible en arrière-plan dans l'introduction, lorsque les gangsters matent des photos pornographiques...

D'autre part, le portrait du monde criminel, radicalement différent de ce que le cinéma britannique offrait jusqu'alors. Ici pas de gant blanc, pas d'atmosphère londonienne classe. L'ensemble se déroule à Newcastle, et c'est filmé "au naturel", à coups d'images froides, industrielles, et poisseuses. Et les règlements de compte n'ont rien de propret.

L'intrigue est volontairement alambiquée. Se composant d'une épais brouillard de personnage que notre protagoniste va devoir percer pour découvrir qui a fait tuer son frère. La mise en place se fait doucement, mais ça reste prenant, parfois en non-dits et en confrontation faussement civilisées.

Michael Caine n'a cependant rien d'un héros. Froid, cynique, arrogant, vicelard, parfois cruel, il exploite et manipule sans sourciller son entourage (souvent les femmes d'ailleurs). Se souciant peu des victimes collatérales, et prenant presque plaisir à se venger.

Etonnant que l'acteur alors célèbre accepta un rôle aussi antipathique. Il semble qu'il ait été attiré par l'opportunité de jouer un criminel réaliste, loin des conventions et proche de ce qu'il avait connu dans son milieu de jeunesse populaire. Toujours est-il qu'il convient bien à ce personnage désormais difficile à dissocier de l'acteur (et oui désolé Stallone, tout le monde a oublié ton remake).

Je terminerai en évoquant la qualité de la mise en scène. Très inventive, a fortiori pour un premier film ! Des séquences qui alignent les allusions sexuelles plus ou moins explicites. Des points de vue originaux. Et des passages en montage parallèle astucieux.

Dommage que la suite de la carrière de Mike Hodges n'ait pas suivi ce niveau qualitatif.

Redzing
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Créée

le 2 août 2020

Modifiée

le 20 mai 2024

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