Je suis allé voir ce film avec la naïveté d'un enfant. J'entends par là que l'évènement de 1983 m'était presque totalement inconnu, et on ne peut pas dire que la promotion du film ait beaucoup fait parlé d'elle, hormis pour la polémique liant le morceau de rap dont je ne parlerai pas ici, étant donné qu'elle n'apparait même pas dans le film. Bref c'est donc en complet novice que je me suis rendu à cette séance.

Cette "comédie dramatique" (genre qui ne le défini que partiellement), qui se dit s'être librement inspiré des évènements de 1983, se trouve être typiquement le type de film qui se trouve entre deux eaux, entre le docu-fiction et le film historique, entre la fiction, le drame et tous les autres qualificatifs que l'on a pu lui associer. C'est un film hybride, tout comme son réalisateur. Loin de moi l'idée de déconsidérer ce mélange des genres (ce serait même suicidaire après la visualisation de ce film, que de penser le mélange comme une mauvaise chose), cependant il est difficile d'analyser le contenu sans savoir concrètement ce que son auteur voulait nous transmettre. Et cette ambiguïté perturbe. Elle perturbe le regard, nous met mal à l'aise lorsque certains personnages se voient sur-impréter la personnalité qu'on leur donne, nous contrarie quand le pathos devient trop voyant. Ça dérange car on ne sait si c'est la direction des acteurs qui l'a voulu ainsi ou la réalité qui transparait. Cette ambiguïté était peut-être voulue par le réalisateur, mais en aucun cas elle ne sous-tend l'histoire.
Pourtant le film nous apparaît comme extrêmement humble et précis de prime abord ; les acteurs sont justes, les tensions palpables et prenantes, la solitude pesante et immersive, la bande son parfaite (travail remarquable de Stephen Warbeck, dont j'ignorais la présence dans l'équipe technique).
L'humour quant à lui fait gentiment sourire mais n'apporte pas grand chose. Jamel qui a aidé financièrement le projet serait presque de trop dans le casting. Mais on leur pardonne, simplement parce que l'épopée qu'il nous ait été présenté ici a une morale et un sujet qui transpire tellement que tout le reste paraît superficiel. Et c'est là où je voulais en venir, c'est qu'on ressort de la séance ému, instruit, justement de par le sujet qu'il aborde, mais peu ou pas du tout de par le regard que nous a montré Nabil de l'évènement. Le sujet très (trop?) prédominant occulte tout le reste. Et c'est aussi a postériori que l'ambiguité dérange, car cette prédominance du sujet porte à croire que son auteur importe peu. De la même manière, l'évolution des personnages qui nous paraissait juste au début, tend, à la manière d'un film choral, vers une personnification à la truelle où seul une qualité (ou trait de personnalité) suffirait pour décrire Mohamed, Sylvain ou Farid.
Ainsi je terminerai en disant que le film est à voir, pour le sujet qu'il aborde, parce qu'on trouve du bon dans ces acteurs plus que dans la direction qu'il en a été faite, parce que la bande son se suffit à elle-même. Mais Nabil Ben Yadir devrait prendre des sujets dont il mesure l'importance et l'aura, auquel cas son travail passe complètement inapperçu.

PS : J'aurais aimé ne pas avoir à noter ce film, jugeant que la critique se suffit à elle même. Il n'est ni bon ni mauvais, juste à voir. (D'où la note 5/10)
cR4p0
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le 28 nov. 2013

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