"Je sais! La guerre des boutons!" "Ta gueuleeeeeeeeeee! Viens ici sale enculé!"

Pause navet aujourd'hui avec la critique du dernier film de Christophe Barratier (Les Choristes, Faubourg 36). Vous n'êtes pas sans savoir que le film est sorti à une semaine d'intervalle d'une autre adaptation de la Guerre des Boutons, cette fois-ci réalisée par Yann Samuell. Bien entendu le choix de sortir deux versions du célèbre livre de Louis Pergaud est douteux et cette guerre marketing n'est en rien constructive. Ceci dit j'étais intrigué de voir au moins un des deux films pour voir si on pouvait s'attendre à quelque chose d'au moins correct ou juste une adaptation qui urine avec joie sur le livre original. J'ai déjà trahi mon opinion dès la première ligne, mais je vais quand même me lancer dans l'analyse de ce carnage cinématographique.



La Guerre des Boutons a déjà fait l'objet d'une très célèbre adaptation signée Yves Robert au début des années 1960. Si l'esprit du livre était un peu édulcoré, le film n'en demeurait pas moins tendre, rafraîchissant et possédait un charme fou tout en conservant quand même une part du propos du livre de Pergaud. Là ce n'est même pas le cas, cette nouvelle guerre des boutons est dénuée de tout capital sympathie tant celle-ci semble s'être vue accorder un soin minimal à des fins purement commerciales.

Concernant une adaptation de livre, je ne pense pas que ce soit nécessaire de faire un copié-collé de l'oeuvre originale mais tout du moins de garder au moins l'esprit du livre, ce qui en fait son essence. Mais ici ce n'est absolument pas le cas. Barratier reprend juste la trame principale du livre qu'il retranscrit en pleine Occupation mais il n'a pas su en discerner les enjeux. Le livre abordait le chauvinisme et surtout la féroce bêtise du monde des enfants qui en fin de compte est très ressemblant au monde des adultes. Là tout semble tout beau tout rose alors que dans ce contexte d'Occupation (ce qui n'était pas une mauvaise idée en soi) on aurait pu s'attendre à quelque chose de plus sale encore. Mais c'est bien simple, ici tous les habitants sont des résistants et par contre les deux collabos sont moches et en plus cancres. Barratier nous ressort son rouquin rebelle des Choristes pour jouer le rôle d'un collabo sous un jour on ne peut plus caricatural. Ce raccourci est con, Barratier a juste négligé l'écriture de ses personnages, ce manichéisme inutile ne sert en rien l'histoire et n'apporte aucune force au récit.



Alors déjà on part sur une bonne base, youpi. Allez je suis sûr que le film contient quand même quelques qualités... Allez parlons d'abord de la technique du film car c'est bien simple sur ce point-là, des qualités, il n'y en a pas... C'est tout bonnement catastrophique même. Barratier nous sert une photographie d'une laideur sans nom, c'est bourré de filtres, ça transpire le retouché, c'est juste hideux. Pareil pour les scènes intérieures, ça pue le studio à plein nez avec ce sur-éclairage tout moche.
Au niveau de la mise en scène c'est guère mieux même si Barratier a quand même réussi un exploit que peu de gens ont su réaliser: il arrive à rendre illisibles des scènes de batailles entre mômes. Franchement j'avais hésité à applaudir dans ces moments-là car ça en devenait franchement risible. Je crois qu'à la base le tonton Barratier a oublié qu'il s'agissait de batailles d'enfantS et non d'arrachage de tripes en règle à la mode hollywoodienne. Et puis voilà c'est ça que je reproche surtout à cette nouvelle guerre des boutons: ça tente de se donner un air épique alors que c'est complètement foiré et hors-propos.

Ce sont des enfants Christophe, des enfants merde! Nous sommes en 1944, très peu ont vu Braveheart je pense alors pourquoi diable est-ce que tu nous ressors les mêmes scènes hein? Ils n'ont pas encore de poil au zboub que tu décides de nous les faire passer pour des guerriers héroïques qui parodient les guerriers héroïques made in hollywood. Tu nous ressors les ingrédients repompés par les mauvais films d'action récents avec ta musique pseudo-héroïque sur une phrase de killer sortie de la bouche d'un Tony Montana des bacs à sable qui arbore son regard de killer accentué par sa cicatrice trop dark qui doit faire mouiller les minettes de 12 ans. Mais quel est l'intérêt de nous ressortir ces scènes pré-fabriquées dans cette histoire? (je me pose la question alors que j'ai déjà la réponse... Aucun, évidemment)
Le fait de placer l'intrigue dans un contexte de seconde guerre mondiale était, je trouve, une bonne idée. Il suffisait de savoir l'exploiter, chose que tonton Barratier n'a pas su faire. En fait c'est clairement anecdotique, on fait très peu écho entre les deux "conflits", ça n'a aucun intérêt dans l'intrigue. Enfin si on le fait une fois en comparant de manière trèèèèèès subtile (ironie) que Bacaillé ressemble fortement à un collabo. Donc autant dire que c'est nul, bête et méchant. C'est quand même fou de voir à quel point ce film peut être lourdingue.




J'ai apprécié les vaines tentatives de dénicher LA phrase culte. L'héritage du "si j'aurais su j'aurais pas v'nu" est visiblement dur à porter quand on réalise un film avec "guerre" et "boutons" à l'intérieur. Du coup on se tape le petite Gibus (totalement insupportable) qui te débite des phrases censées être drôles. Sauf qu'il joue comme un manche et semble réciter son texte à l'inverse du petit Gibus d'Yves Robert qui semblait jouer d'une manière tout à fait naturelle.
Le casting est aussi un point faible du film (bon je sais, il n'y a que ça dedans). Laëtitia Casta est assez convaincante, tout comme Kad Merad qui ne m'a pas donné envie de le baffer pour une fois. Mais alors le Guillaume Canet a du mal à masquer son malaise de tourner dans un étron pareil. Allez Guillaume, t'es beau gosse et en prime tu vas gagner des sous grâce à tonton Barratier et son film tout con tout moche.
Gérard Jugnot fait aussi une apparition anecdotique. Mais je n'ai pas encore parlé des enfants et c'est le drame... Je l'ai déjà mentionné vite fait mais le petit Gibus... Jamais je n'avais eu envie d'écraser la tête d'un gosse comme une pastèque en visionnant un film et là c'est le scénario que je me suis passé plusieurs fois dans la tête. Il récite son texte, il hurle, il ne sait pas jouer, il est insupportable... Et alors cette scène où il lit la lettre de son père parti au travail forcé en Allemagne est à pleurer de rire. Barratier pouvait très bien mettre un carton indiquant "SEQUENCE EMOTIOOOOON" juste avant tellement c'est peu subtil et archi académique avec les larmes aux yeux, les violons, tout ça... C'est avec ce genre de scènes que je me sens violé en tant que spectateur, qu'on essaie de me forcer à faire des choses que je ne veux pas faire, comme chialer pour ce sale morveux par exemple qui ne mérite que le bûcher.

Après dans le rôle de Lebrac on se tape un Tony Montana choisi uniquement pour sa cicatrice. Ses réactions sonnent tellement faux qu'il est franchement impossible de voir en lui un leader charismatique. L'acteur jouant l'Aztèc est le seul qui se démerde assez même si il n'a pas eu la tâche aisée avec la tournure que prend son personnage. La fin dans le village d'ailleurs est un sacré monument de connerie et de bien-pensance totalement stupide et hors-sujet.
Vous l'aurez compris, cette nouvelle guerre des boutons made by Barratier n'en vaut strictement pas la peine. Le livre de Pergaud est violé pour laisser place à une intrigue bidon remplie de sous-intrigues sans intérêt. C'est mal joué, mal filmé et sans âme ni passion, c'est juste fait pour le pognon. Pour conclure je résumerais en bref mon opinion de ce film à travers des mots compréhensibles pour le public que le film vise, à savoir les enfants: C'est du gros caca boudin!
Moorhuhn
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le 10 sept. 2012

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le 10 sept. 2012

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Moorhuhn

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