Adèle a un charme fou. Son regard nous déshabille. Ses larmes roulent sur nos joues. Ses sanglots nous perforent. L’amour embrasse tout : il est charnel et passionné. Il sue par tous les pores de la peau. L’amour est cruel : il nous obnubile et nous torture. Il nous dévore. Il dévore la pellicule de Kechiche. Il la consume.

Adèle Exarchopoulos habite le film, elle le fonde et l’élève. Sans elle, Kechiche – quels que soient par ailleurs son génie et sa virtuosité qui rayonnent à chaque plan – aurait été nu. À côté d’elle, Léa Seydoux, pourtant ô combien talentueuse, paraît transparente. Après Sara Forestier dans L’Esquive et Hafsia Herzi dans La Graine et le mulet, Kechiche aura su trouver l’outil qu’il fallait pour sertir sa pierre précieuse.

Kechiche peint les corps. Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos fusionnent dans sa toile de maître. Il glisse sur leurs hanches, caresse leurs peaux, embrasse leurs lèvres. On est imbibé de ces corps en gros plan. Kechiche démontre une nouvelle fois, après Vénus Noire, que la chair est l’âme de son cinéma. Et la chair, chez Kechiche, est sentiment, au-delà de la trivialité et de la voracité de sa caméra. On est retourné par l’intensité de ceux de ce couple de jeunes femmes : leurs émotions transpercent la toile et nous agrippent pour ne plus nous lâcher.

On ressort lessivé de trois heures d’un film fleuve, dont les flots proviennent des larmes d’Adèle qui inondent l’écran.
EleuthereJ
9
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le 12 oct. 2013

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