Après avoir subi le générique d’ouverture le plus pénible du monde où fondent les unes sur les autres des fleurs au gamma poussé à l’extrême sur une partition langoureuse de James Horner, le spectateur pourra se délecter d’un bien improbable jeu de miroirs entre deux âges de la vie d’une jeune femme dépravée devenue mère au foyer et qui se remémore la fusillade ainsi que, par bribes, les éléments d’un trouble plus profond. Au-delà du fait que l’on ne croit pas une seule seconde à cette histoire mélodramatique – pourquoi rester vivre dans la ville d’un traumatisme d’enfance ? –, l’inertie de La Vie devant ses yeux réside dans son incapacité à penser la transition entre le monde adolescent et le monde adulte comme un espace de chaos et pourtant de renaissance à soi : le collage des temporalités paraît forcé, et le choix d’emmêler récit cadre et récit enchâssé provoque une lassitude croissante. Pris entre le grand manège des émotions hollywoodien et le geste plus indépendant d’un Gus Van Sant dans Elephant, le film essaie de tirer à lui toutes les couvertures, aboutit à un produit bâtard et sans âme aujourd’hui tombé dans l’oubli, à juste titre.