La Vie privée de Sherlock Holmes est un petit miracle à lui tout seul.
Affrontant une légende aux adaptations multiples, il arrive à la fois à être fidèle à l'esprit du corpus et à démythifier complètement le personnage en jouant sur ses plus célèbres caractéristiques.
Film policier, chasse au trésor, film d'aventures, comédie hilarante, film d'espionnage, touchante histoire d'amour, le film réussit à exceller dans chacun de ces domaines sans jamais nuire aux autres, une véritable gageure. C'est d'ailleurs de ce mélange de franche comédie et tragédie que le film retire cette très subtile mélancolie qui en fait tout le charme.
Le scénario est ciselé aux petits oignons, chaque petit détail plus ou moins insignifiant verra son existence justifiée pleinement à un moment ou l'autre du film.
Sans jamais se prendre plus au sérieux qu'une bonne BD, le film tire de sa légèreté apparente une force étonnante, qui, personnellement, me bouleverse à chaque fois.
Les dialogues sont magnifiques, et d'une drôlerie rare, superbement servis par un casting parfait.
Sans atteindre la perfection d'un Jeremy Brett insurpassable, Robert Stephens nous propose un Sherlock assez original, tout en langueur et flegme, et il raconte les anecdotes misogynes comme personne...
Colin Blakely, lui, tient ici le rôle de sa vie. Trublion truculent et lascif, il me propose le meilleur Watson que j'ai pu voir interpréter, contrepoint parfait de Holmes, et sachant retrouver toute sa dignité lorsque la situation l'impose. En outre, il n'a pas son pareil pour beurrer une tartine ou sucrer une tasse de thé, deux qualités indispensables au rôle.
Pas particulièrement jolie, Geneviève Page compense ce petit défaut de sa voix sensuelle qui fera vibrer le petit britannique frigide qui sommeille en chacun de nous.
A noter que Christopher Lee, que l'on a vu chez Terence Fisher en Sherlock, joue encore un Holmes et impose en Mycroft sa haute silhouette longiligne.
Il semblerait que la nature extrêmement particulière du film peut laisser certaines personnes insensibles à ses charmes. Pour ma part, j'ai du le voir une demi-douzaine de fois, et, ce soir encore, la magie a opéré, du rire aux larmes.