Je suis un peu étonné du manque d’enthousiasme qui entoure cette très chouette production AIP (à qui l’ont doit les remarquables adaptations de Poe par Roger Corman avec Vincent Price) qui lorgne très clairement vers les réussites de la Hammer. Faussement inspiré d’un récit d’Edgar Allan Poe, ce récit emprunte, en revanche, beaucoup à l’univers de l’écrivain américain (malédiction, enterrement vivant, folie, etc.) en y ajoutant de nombreux éléments du cinéma fantastique (rite vaudou, profanateur de sépultures, docteur aux sombres méfaits, etc.) pour accoucher d’un film qui tire un pont parfait entre le cinéma fantastique américain et le cinéma fantastique anglais. Le résultat, s’il peut paraître foutraque à certains, démontre une véritable maîtrise et une réelle capacité à réutiliser un ensemble de thèmes hétérogènes.


Porté par Vincent Price et Christopher Lee, qui se retrouvaient pour la première fois devant la caméra, Le Cercueil vivant délivre un récit dense qui est un véritable hommage. Entre Poe, les films de la Universal et ceux de la Hammer, il brasse ses thèmes avec efficacité même si cela conduit parfois son scénario à emprunter des chemins détournés. Les séquences dans un bouge peuplé de personnages interlopes n’ont ainsi aucun lien avec le récit principal mais donnent l’occasion d’une plongée dans les villes sordides de l’époque victorienne. On sent bien que les auteurs ont voulu multiplier les lieux et péripéties propres à tous leurs modèles mais cela fonctionne parfaitement bien. Des balades bucoliques dans la lande aux plongées urbaines en passant par les fêtes données par la haute société, rien n’est oublié.


Quant au récit lui-même, il déroule une vengeance sanglante menée par un frère caché aux yeux de tous qui rappelle aussi bien des classiques historiques qu’une rhétorique plus contemporaine qui n’est pas loin d’évoquer le futur slasher, l’angoisse et l’hémoglobine en moins. Car le vrai point faible du film est certainement dans son incapacité à créer une véritable terreur. Avec son sang grand-guignolesque et ses tristes effusions lors des séquences d’égorgement, on voit bien que la production ne peut pas aller au bout de ses idées. C’est dommage car l’atmosphère gothique est une grande réussite et la réalisation, extrêmement soignée, ne manque pas d’imagination, notamment pour cacher le plus longtemps possible cette laideur qui se cache sous un chiffon rouge. Une véritable curiosité à découvrir que ce très habile film méconnu.


7,5

Play-It-Again-Seb
7

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Liste et classement des films que j'ai vus ou revus en 2024

Créée

le 8 févr. 2024

Critique lue 26 fois

7 j'aime

3 commentaires

PIAS

Écrit par

Critique lue 26 fois

7
3

D'autres avis sur Le Cercueil vivant

Le Cercueil vivant
Jean-Mariage
6

Une curiosité qui vaut le détour.

Il faut d’abord, pour avoir envie de défendre le film, passer l’éponge sur l’escroquerie qui consiste à prétendre qu’il s’agit d’une adaptation d’une nouvelle d’Edgar Poe. En effet, s’il y a bien...

le 23 oct. 2022

2 j'aime

Le Cercueil vivant
Fêtons_le_cinéma
2

Le couteau saigne

The Oblong Box est un périlleux exercice de remplissage qui, une heure et demie durant, essaie de nous occuper par des intrigues familiales et des gros plans. Si la réalisation impose dans...

le 24 mars 2022

1 j'aime

Du même critique

Astérix et le Griffon - Astérix, tome 39
Play-It-Again-Seb
7

Le retour de la griffe Goscinny-Uderzo

Depuis la reprise de la série par Ferry et Conrad, nos amis gaulois avaient une sacrée gueule de bois. La disparition de René Goscinny avait déjà très sérieusement entamé la qualité des albums même...

Par

le 22 oct. 2021

24 j'aime

23

L'Emmerdeur
Play-It-Again-Seb
9

Pignon, ce roi des emmerdeurs

Premier film mettant en scène François Pignon, L’Emmerdeur est déjà un aboutissement. Parfaitement construit, le scénario est concis, dynamique et toujours capable de créer de nouvelles péripéties...

Par

le 12 août 2022

22 j'aime

10

L'Iris blanc - Astérix, tome 40
Play-It-Again-Seb
4

La philosophie sur le comptoir

Aïe, aïe, aïe... L'arrivée de Fabrice Caro en lieu et place de Jean-Yves Ferri qui venait, à mon sens, de signer son meilleur Astérix dans le texte, était pourtant annoncée comme une bonne nouvelle...

Par

le 14 nov. 2023

21 j'aime

22