"Sans un bateau, nous ne valons pas cher"

Le Crabe-tambour est un film qui prend son temps. Pour définir ses personnages, dessiner son intrigue, raconter son histoire. Le Crabe-tambour c'est une mélancolie, celle de militaires passés par les conflits de la décolonisation : Indochine, Algérie...


Oui, le Crabe-tambour est un film militariste, oui, le Crabe-tambour est un film qui dit la douleur de la perte des colonies et de la défaite et pour ces raisons, il est décrié par certains dont je ne suis pas. Le Crabe-tambour dit tout cela mais l'Histoire dit le reste et les deux ne sont pas incompatibles.


D'autant que le Crabe-tambour, s'intéresse bien plus aux hommes qu'aux événements. Si l'Indochine, le putsch des généraux ou l'enrôlement des Alsaciens dans l'armée allemande pendant la Seconde Guerre Mondiale sont évoqués, ce n'est que pour contextualiser le destin d'un trio et les décisions qui font qu'un homme choisit un bien ou un autre bien. Alors si certains s'arrêteront à un esprit militariste et colonialiste, je ne suis pas de ceux là et, d'une certaine manière, je les plains un peu, parce que c'est se priver d'un monument.


Finalement, Schoendoerffer filme surtout des hommes sur des bateaux. A l'économie. En faisant confiance à ses comédiens et à son directeur de la photographie, Raoul Coutard. Et, chose rare aujourd’hui, en ayant foi dans le spectateur. Contrairement au cinéma actuel qui montre tout, dit tout, explique tout jusqu'à l’écœurement, Schoendoerffer compte sur l'alchimie entre ses images, le jeu des comédiens, le texte et la sensibilité du spectateur pour, montrer tout ce qu'il ne montre pas, dire tout ce qu'il ne dit pas, expliquer tout ce qu'il n'explique pas...


En résulte un film grave, un film sérieux. Un beau film porté par un trio vibrant et des seconds rôles dont Jacques Dufilho fait office de sublime figure de proue.


“On passe sa vie à dire adieu à ceux qui partent, jusqu'au jour où l'on dit adieu à ceux qui restent.”
Véra de Talleyrand-Périgord

Créée

le 22 juil. 2019

Critique lue 1.4K fois

16 j'aime

4 commentaires

RunningJack

Écrit par

Critique lue 1.4K fois

16
4

D'autres avis sur Le Crabe-tambour

Le Crabe-tambour
SBoisse
10

L’honneur perdu du vieux crabe

Ce film est une incongruité. Comment un tel sujet a-t-il pu cumuler les récompenses aux Césars 1978 ? Trois officiers de marine évoquent, dans un huis-clos nautique, la figure d’un quatrième,...

le 5 sept. 2015

30 j'aime

7

Le Crabe-tambour
RunningJack
9

"Sans un bateau, nous ne valons pas cher"

Le Crabe-tambour est un film qui prend son temps. Pour définir ses personnages, dessiner son intrigue, raconter son histoire. Le Crabe-tambour c'est une mélancolie, celle de militaires passés par les...

le 22 juil. 2019

16 j'aime

4

Le Crabe-tambour
JeanG55
9

Engagement et fidélité

Le film de Pierre Schoendoerffer est sorti en 1977. J'ai vu ce film à sa sortie et j'ai, tout de suite, été fasciné par l'histoire romancée d'un officier "légendaire" de la marine, Willsdorf, le...

le 31 août 2021

12 j'aime

16

Du même critique

Jusqu'à la garde
RunningJack
9

L'Education sentimentale

J'ai regardé ce film seul, loin de ma femme et de mon fils. J'ai pleuré seul, avec violence. Pas les sanglots contenus de l'homme viril qui se donne une posture de mec sensible. J'ai chialé tout ce...

le 6 juil. 2018

54 j'aime

10

Ocean's 8
RunningJack
4

Flaque d'eau's 8

Ce film véhicule une idée fausse. Celle qu'un film de braquage géré par des femmes est moins bon qu'un film de braquage géré par des hommes. La seule vraie idée portée par ce film est qu'un film...

le 27 août 2018

35 j'aime

8

Excalibur
RunningJack
10

The King and the Land are One

Longtemps Excalibur est resté pour moi le film qui a bercé mon adolescence et qui a complètement construit mon goût immodéré pour les univers médiévaux, la légende arthurienne sous toutes ses formes...

le 11 mars 2019

28 j'aime

12