Critique a chaud de fou, je sors a peine de la séance. Donc y’a moy que je la modifie au fur et a mesure du recul que je prendrai sur le film et des discussions que j’aurai autour


Si on connait un peu le personnage, on sait que Dupieux c’est quelqu’un de peut-être un peu reac sur les bord, qui pète clairement plus haut que son cul, et qui est assez hautain dans sa vision des choses et dans ses propos (en tout cas c’est ce qui ressors de lui au travers de ses différentes apparitions)


J’ai toujours trouvé que ses films dépeignaient toujours très bien la vision que j’avais de Dupieux, qui sont donc tout comme lui toujours dans un entre deux a la frontière du rire et de l’exaspération.


Dans Rubber par exemple, je trouvais que le film se la racontait beaucoup pour un film qui se prétendait « sans prise de tête, con, et sans aucun but ». Au final tout ce que Dupieux développe dedans avec toute la partie sur les spectateurs sonnait comme un aveu d’échec d’un cinéaste qui n’assume pas vraiment les absurdités qu’il nous présente. Comme s’il était obligé de se justifier de faire le cinéma qu’il fait. Et ce contraste se trouve dans tous les films de Dupieux, et ce quasiment tout le temps sous la forme du « meta-film » (qui apparait souvent de nulle part dans l’unique but de parler au spectateur de rapport aux images, au spectacle, et le questionner sur la véritable pertinence de ce qu’il regarde, ce qui prend toujours beaucoup de place dans ses films. Parfois il le fait de manière intéressante et qui semble moins avoir pour but de se justifier de quelque chose (dans Réalité par exemple qui est juste un n’importe quoi incompréhensible) mais parfois ça empoisonne beaucoup trop le récit.


Vous l’aurez compris, je n’aime pas tant le Dupieux absurde. Je pourrai l’aimer et parfois je l’aime, mais je trouve qu’il ne produit pas de choses nécessairement cinématographiquement interessantes (même s’il essaye de faire croire le contraire tout en répétant en boucle qu’il ne le fait volontairement pas (en gros il prétend faire uniquement de l’absurde mais pourtant ses films montrent sans cesse que son absurde veut parler de quelque chose et bien souvent de cinema et de rapport au cinema, sans rien dire de nécessairement interessant et en s’assumant tellement grossièrement que ça parasiter son absurde qui devrait effectivement ne rien avoir a dire explicitement (comme le fait Lynch par exemple)).


S’il y a bien une chose qui transparaît énormément de la pensée de Dupieux au travers de ses diverses apparitions, c’est qu’il trouve que le cinéma n’est pas quelque chose d’important. Il dit explicitement qu’il n’y a plus vraiment besoin de faire des films, que c’est relativement inutile, et au final on comprend donc que ses films sont en réalité plutôt des terrains de jeu pour lui. Quand on regarde un Dupieux on a un peu l’impression de voir des enfants s’amuser a faire strictement n’importe quoi et honnêtement c’est assez plaisant et ça passe par la chose la plus fondamentale de son cinema: les comédiens.


Un film de Dupieux est toujours porté par ses comédiens, il consolide cette approche depuis son retour en France avec Au Poste (même si ses films précédents mettaient déjà beaucoup en avant le rôle du comédien dans la mise en scène également). Un film de Dupieux c’est toujours un casting, et donc un casting qui nous donne envie de voir ses films rien que par l’idée de voir ses acteurs participer aux golmoneries de Dupieux. Une grande partie de la mise en scène (et même du scénario) passe par les comédiens, et c’est une des forces du cinéma de Dupieux.


Et on dirait qu’il l’a compris puisque depuis quelques films (Le Daim, et Yannick) Dupieux s’encre de plus en plus dans le réel. Cette affirmation pourrait faire penser qu’il aurait donc perdu tout ce qui fait sa singularité mais je trouve qu’au contraire, c’est de cette manière que je trouve un vrai regard de cinéaste chez Quentin Dupieux.


S’il y a bien quelque chose qui pourrait caracteriser le cinema de Dupieux, c’est que c’est un cinema de dialogue, et en s’encrant dans le réel Dupieux fait toujours se jouer des rapports sociaux qui passent par le dialogue d’une manière purement cinématographique: l’utilisation du dialogue en tant qu’acte.


Yannick éveillait chez nous un plaisir cathartique enfoui d’une arrogance absolue, Incroyable mais vrai nous donnait a penser nos rapports sociaux sous un prisme intéressant dans cette question du dialogue qui en faisait une gestion lente, éparpillée, et qui s’éternisait autour de questions planantes et en réalité futiles.


Et nous en venons a ce film, qui semble être dans cette continuité que j’aime beaucoup chez Dupieux.

Dès le début du film Dupieux nous enferme dans un dialogue interminable entre deux personnages, dans un travelling de quasiment 10 minutes qui laisse se construire une discussion banale mais qui deviendra vite assez captivante a suivre. Au debut on se demande où est ce que Dupieux veux nous emmener et il nous donne assez vite des réponses en présentant l’intérêt de la scene: les dynamiques entre Raphael Quenard et Louis Garrel. Raphael Quenard exprime tout ce qu’il pense en s’enfonçant totalement dans ses propos tandis que Louis Garrel est dans une retenue qui se caracterise dans une immobilité de jeu qui vient en contraste avec le jeu plus expressif de Quennard. Les deux personnages sont caractérisés et si on pourrait penser que l’interet de la scene residerait dans leur divergences d’opinion, en realité elle se soustrait sous le regard de la camera diegetique qui intervient pour reunir les 2 personnages sous le même enjeu et donc les opposer tout en créant une complicité chez eux. Ils vont devoir s’unir dans leur différents pour un objectif commun: avoir une bonne image, rester une bonne personne.


Je trouve que c’est une des meilleures scènes de Quentin Dupieux a ce sujet puisqu’elle arrive à créer des dynamiques de dialogue vraiment captivantes dans leur cheminement et qui présentent pour une fois un vrai propos cinématographique qui passe par de la mise en scène, et en vrai c’est drôle franchement. (Étonnamment je préfère Louis Garrel a Raphael Quenard dans ce film)


La dynamique entre Léa Seydoux et Vincent Lindon est assez intéressante également puisqu’elle vient presque en réponse à la précédente en présentant également deux personnages opposés dans tout mais qui ici vont chacun devoir s’unir, encore une fois pour le regard de la camera par soucis moral mais d’une autre manière. Ici c’est cette union pour la camera qui les divise, Lindon pense que le cinema ne vaut rien mais veut bien jouer la scene une fois qu’il sait qu’il va pouvoir tourner chez PTA, il ne pense qu’a la gloire alors qu’il fait crari la politique avant tout. Alors que Seydoux veut jouer pour l’art et ferme les yeux sur la politique. Une dynamique intéressante puisque les deux personnages sont unis dans leur rôle dans quelque chose de doublement faux. Les scenes où ils jouent le vrai texte semblent présenter 2 films qui se jouent dans le meme plan: celui qu’ils tournent, et ce qu’on s’imagine qu’ils pensent vis a vis du fait qu’ils se sont engueulés 2 secondes avant et qu’ils sont pourtant de train de jouer un rôle tout mignon et culcul de pere-fille. C’est des dynamiques vraiment interessantes et qui produisent quelque chose de cinématographique qui manque a beaucoup de films de Quentin Dupieux.


Bref je vais pas faire du scene par scène meme si les dynamiques seraient intéressantes a analyser dans les 50 premières minutes du film. Dupieux va sans arrêt reprendre le film qui se joue dans le film puis l’interrompre par des dynamiques entre les personnages qui vont les fracturer et les interchangés (au debut on est avec les duo Quenard & Garrel et Seydoux & Lindon puis apres on a Quenard & Seydoux et Garrel & Lindon, et ainsi de suite…), toutes ces interactions sont cool pour les raisons que j’ai cité, le dialogue en tant qu’acte, la construction des rapports sociaux et des discussions etc…


Ce qui semble se jouer dans ce film c’est l’opposition entre le vrai et le faux. Ces deux concept sont sans arrêt en train de se foutre sur la gueule dans le film c’est assez captivant a regarder.


Pourtant le film fait un grand naufrage sur sa fin en annulant quasiment tout ce qu’il entreprenait au début.


En gros le film qu’ils jouent est ecrit et realisé par une intelligence artificielle et en réalité c’est pas un film dans un film mais un film dans un film dans un film (ce qu’on regarde depuis le debut est également un film dans le film de Dupieux en gros)


Et autant ça aurait pu être intéressant, les IA représentant le faux par excellence, autant au moment ou sors le film ça parrait juste hyper reac pour rien. En fait deja ça detourne absolument tout ce que le film cree depuis le debut puisqu’on est en réalité un peu dans un film de sf dans lequel les IA sont suffisamment développées pour pouvoir faire des films en tant que real, donc on est plus exactement dans le réel. Et surtout ça veut dire que tout ce qu’on croyait réel depuis le début marche pas puisque en réalité c’était faux. Donc les personnages qu’on suit depuis le debut n’existent pas et sont créés par une IA (et donc encrés dans le faux) sauf que Dupieux nous parlait depuis le début de rapports humains, et des défauts humains notamment (arrogance, égocentrisme, faux-semblants…). Donc au final de quoi nous parle le film si tous ces sujets que le film nous presente et qui sont cinematographiqument intéressants ne sont pas le vrai ?


Et ben… pas grand chose. Que les IA vont detruire la magie du cinema ? Que le cinema va s’enfoncer dans le faux ? (C’est pas ce qu’il disait etre la meilleure forme de cinema ? Pourquoi il le critique maintenant ?) c’est des discours bateaux sur les intelligences artificielles qui sont honnetement pas interessants, pas pertinents, deja vus, et tres reac. Le fait que l’issue du film soit ça annihile totalement tout ce que le film construisait jusque la et me fait un peu à reculons réinterpréter les propos reac des personnages qui semblent un peu etre des propos enfouis de Dupieux qu’il exorcise a travers des avocats du diables que sont ses personnages (meme s’il retourne justement cette situation pour que le film se fasse bien voir et soit politiquement correct) je m’aventurerais pas sur ce terrain parceque c’est juste des speculations mais quand on voit les sujets qui ont l’air de vraiment le perturber.. y’a de quoi se poser des questions.


En parlant de sujets qui perturbent, le film tient a un moment une thèse portées par Vincent Lindon qui porte quasiment toute la vision de Dupieux du cinema, et en particulier de son cinema: la futilité du cinema.


Je suis totalement d’accord avec tout ce que Vincent Lindon dit dans le film a ce moment la, effectivement le cinema ça ne sers a rien, c’est pas ça qui va changer le monde, et il y a des choses plus importantes qui se passent en ce moment dans le monde. Et je trouve que cette vision se retrouve dans la mise en scene. On parle de ce film comme une « mise en abyme ». Effectivement c’en est une mais je trouve que ça en est surtout une vis a vis de sa mise en scene qui embellit les moments de fiction (le film nul qu’ils essayent de jouer sans y arriver), et un ton plus grave quand il s’agit des rapports humains (le vrai). C’est interessant, et encore une fois ça porte un regard de metteur en scène que je vois rarement de manière aussi discrète chez Dupieux.


Bref, c’est dommage, je vais pas dire que j’ai pas ri parceque c’est pas vrai, ni que j’ai passé un mauvais moment parceque bon j’ai beaucoup apprécié les 50 premières minutes. Mais encore une fois Dupieux s’enfonce dans son metafilm a la con et se detourne de ce qui fait reellement briller son cinema. Je sens quand meme qu’il est dans un tournant dans son style qui est a consolider et qui je sens va nous offrir ses meilleurs films (comme c’est déjà le cas pour Yannick). C’est pas le cas avec celui la qui fait honnêtement parti de ses pires, mais peut-être la prochaine fois alors !


Note: 5/10 (jsp quoi en penser)


Aussi j’en ai pas trop parlé pcq en vrai c’est pas hyper intéressant et que je suis pas super apte a en parler mais je trouve ça un peu sus que la majorité des blagues du film soient des propos reac dédramatisés par des personnages qui ne les approuvent pas. En vrai c’est pas grave ducoup parceque ce qui ressors du film c’est que ces propos ne sont pas des bonnes choses, mais bon quand on se dit que toutes ces blagues limites sortent du meme cerveau c’est un peu bizarre. Dans le film les blagues sur le cancel sont marrantes parceque utilisées de maniere interessantes mais fais gaffe quand meme sinon on va te cancel nous aussi.

Créée

le 14 mai 2024

Critique lue 53 fois

Famoso Sosa

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