Je suis partagé entre deux évaluations contraires. Une première évaluation, qui se fonderait sur les quelques scènes inoubliables du Dictateur, me conduirait à dire que c'est un grand film. Hynkel dansant avec sa mappemonde ou le barbier s'occupant de son client au rythme de Brahms, ces scènes ont apposé leur marque dans l'histoire du cinéma. On notera d'ailleurs ce talent qu'a Chaplin pour créer ces chefs-d'oeuvre de quelques minutes : il en va de même de la chanson improvisée dans Les Temps Modernes, de la danse des petits pains dans La Ruée vers l'Or ou du match de boxe dans Les Lumières de la Ville. Il y a évidemment aussi d'autres scènes satiriques absolument exquises (par exemple celle du discours au début du film).


Mais si je me place, non du point de vue du génie de ces quelques scènes, mais de la conception du film dans son ensemble et de la majorité des autres scènes, je trouve bien moins de choses à dire. Il semble que Chaplin a voulu faire ici un film un peu moins burlesque, un peu plus sérieux, et la partie "barbier" du scénario, celle qui est la moins drôle donc, est un peu lassante. En effet, la partie "Hynkel" étant quasiment toujours burlesque, elle ne cesse de divertir, alors que la partie "barbier" n'arrive pas à contrebalancer ce défaut d'humour par une histoire vraiment palpitante, ou même émouvante. Le discours final m'a semblé un peu mièvre.


Naturellement, Le Dictateur,sorti en 1940, est une oeuvre éminemment politique. En fait, il y a un fond politique dans presque toutes les oeuvres de Chaplin, mais cet aspect est particulièrement prégnant dans Le Dictateur puisque le film est contemporain du régime nazi qu'il dénonce. Dès lors, si nous voulons juger le film d'un point de vue esthétique, il faut arriver à en extraire le contexte historique : Le Dictateur ne doit pas être considéré comme un "bon" film parce qu'il est anti-nazi en 1940, mais pour ses qualités propres, qui, visionnées au XXIè siècle font ressortir, comme dit plus haut, quelques scènes grandioses, quelques bons gags, mais un scénario pour le reste un peu mollasson.

Philip-Marlowe
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le 27 avr. 2021

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Philip Marlowe

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