Le Livre de la Jungle est d’abord un recueil de nouvelles écrites par Rudyard Kipling paru à la fin du 19e siècle. S’il a souvent été décliné sur le grand comme le petit écran, c’est la version de Disney réalisée par Wolfgang Reitherman en 1967 qui est la plus mémorable, grâce à son animation soignée, ses personnages finement écrits et des chansons qui peuvent rester longtemps en tête. Qui pouvait se douter que Disney choisirait donc cette œuvre pour un faire un de ses remakes live après le Cendrillon mis en images par Kenneth Branagh ?


On ne va pas vous refaire le pitch du Livre de la Jungle. Vous connaissez l’histoire de Mowgli, le « petit d’homme » élevé par des loups qui finira par partir vers le village des hommes le plus proche pour échapper à Shere Khan, le tigre. Le film de Jon Favreau reprend la même trame, en y injectant quelques notions supplémentaires issues des histoires de Kipling et oubliées dans la version de 1967, comme le fait que l’éléphant Hathi ne soit pas simplement un colonel mais bien le légendaire seigneur de la jungle à qui tous les animaux vouent un respect sans fin.


La relation entre Shere Khan et Mowgli est également modifiée de manière inédite : le tigre n’en veut plus aux humains d’une manière générale mais à Mowgli en particulier, le petit d’homme étant le fils de celui a brulé un oeil du tigre. Il s’agit donc désormais d’une histoire de vengeance bien ciblée. D’autres personnages sont réécrits, ou plutôt tristement simplifiés, à l’instar de King Louie qui devient juste un grand singe méchant et plus le manipulateur qui faisait avaler des bananes à Mowgli en rigolant dans la version de Reitherman.


Ces modifications n’ont qu’un seul but : niveler par le bas une histoire qui n’en avait pas besoin. Qui plus est, Favreau emprunte des éléments à d’autres productions Disney, dont Bambi pour une scène où plein de petits animaux mignons vont se planquer de la pluie et Le Roi Lion pour des passages beaucoup plus importants et bien plus similaires. Le Cendrillon de Branagh modifiait lui aussi l’histoire de la version animée mais parvenait à y insuffler des choses intéressantes, notamment à travers de très belles scènes. Ici, tout semble fonctionner moins bien.


Visuellement, le film a le cul entre deux chaises. Favreau, pas forcément spécialiste des scènes d’action, donne tout ce qu’il a pour filmer les animaux de manière dynamique et s’en sort honorablement même si certains passages font beaucoup trop numériques. Certains décors sont extrêmement bien faits, et photoréalistes, quand d’autres puent le digital à plein nez. On se demande d’ailleurs pourquoi Disney ne fait pas appel à Pixar pour résoudre ce genre de problèmes, eux qui étaient parvenus à des prouesses pour le Voyage d’Arlo.


Du haut de ces douze ans, Neel Sethi fait lui aussi ce qu’il peut. Pour sa défense, incarner Mowgli est le premier grand rôle de ce jeune comédien qui a dû imaginer être entouré d’animaux et devoir interagir avec les contraintes liées aux effets spéciaux. Le casting vocal, lui, est de belle tenue à commencer par Idris Elba en Shere Khan et Bill Murray en Baloo, tous les deux taillés pour les rôles pour lesquels ils ont été choisi.


On notera aussi le beau travail de John Debney qui s’approprie le travail des frères Sherman et de Terry Gilkyson avec brio pour recréer de nouveaux thèmes rappelant juste assez les originaux. Mais comme tout le reste du film, rien n’est jamais sans défaut. L’utilisation des chansons ne fonctionne donc ici qu’à moitié. La reprise de la chanson de Baloo, « il en faut peu pour être heureux », fonctionne à merveille mais la chanson de King Louie, sans doute à cause de la réécriture du personnage, arrive comme un cheveu sur la soupe.


De Cendrillon émanaient de petites modifications intelligentes qui venait booster un conte mollasson. Du Livre de la Jungle ne ressortent surtout que les défauts issus de mauvais choix. Le film n’est pas parfait mais il n’est pas non plus complétement mauvais. Peut-être y verrez-vous un divertissement honorable qui plaira à vos enfants ? Ca aurait sans doute été le cas si le film de Jon Favreau ne vivait pas dans l’ombre du chef d’oeuvre de Reitherman, largement supérieur. Certes, il en faut peut pour être heureux. Mais pas si peu.

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le 11 avr. 2016

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