Passons outre la mensongère et hideuse affiche US (on ne croise aucune horde de filles dénudées et aux yeux luisants dans ce film) et son titre racoleur ("Raw Meat" signifiant littéralement "Viande Crue" , indiquant fallacieusement qu'on va avoir droit à du cannibalisme à tire-larigot...) et retenons l'affiche française, visant bien plus juste et traduisant correctement le titre original de ce film (soit Death Line).

Évacuons encore une petite chose avant de rentrer dans le vif du sujet: le regretté Christopher Lee.
Crédité en grosses lettres sur les diverses affiches à l'international et au générique d'ouverture du film, Sir Lee n'apparait en fait que dans une seule scène - assez anecdotique au demeurant - et n'apporte strictement rien au déroulement du récit.
Mais le regretté Sir Lee accepta cette courte apparition pour travailler avec le fameux Donald Pleasence.
Cela dit, le problème de taille entre les deux hommes ne permit pas de les filmer en même temps donc leur rencontre se fait par l'entremise du champ/contre-champ (exceptée la fin de la scène où Lee est assis).
Ne vous laissez donc pas avoir par cet appât qui, pour le coup, mériterait bien son synonyme de "leurre"!

Le film:

Excepté le générique d'ouverture très long et maniéré (un homme erre dans un quartier dédié à la luxure puis floutage, crédit et errance du gars, floutage, crédits..., et le tout pendant 4 minutes), ce film méconnu mérite grandement une vision.

Bénéficiant d'une réalisation sèche mais fonctionnelle, le métrage de Gary Sherman baigne dans une photographie atonale et froide , en osmose parfaite avec les décors austères du poste de police, l'appartement du jeune couple et la véritable ligne de métro abandonnée, servant de repaire aux "oubliés".

Nous y retrouvons un Donald Pleasence incarnant un Inspecteur Calhoun assez antipathique, car despotique, railleur et maniant un humour très pisse-froid. Il va devoir se dépêtrer d'une affaire assez étrange: en effet, des personnes disparaissent sans laisser de trace, après avoir été aperçues une dernière fois, dans la station de métro de Russell Square.
Un couple de jeunes gens y croisent un homme inconscient, allongé en vrac sur les marches de l'escalier qui y descend (ou en remonte, tout dépend du point de vue...).
La demoiselle pense que c'est un homme malade, tandis que son petit-ami en déduit que c'est un ivrogne de plus.
Ils alertent quand même un "Bobby" (un flic, dans le jargon Londonien) et lorsqu'ils retournent sur place, l'ivrogne et/ou malade, ne s'y trouve plus.
Tout aurait pu en rester là s'il ne s'agissait pas d'un membre du Gouvernement, d'où l'intérêt soudain de Calhoun sur ce cas précis.

Sur un rythme lent, le film nous entraine dans cette enquête où il est question

d'un groupe d'ouvriers resté bloqués lors de l'effondrement d'un tunnel, pendant la construction

d'une portion de ligne de métro, en 1892.
Cet évènement laisse

donc à supposer que ceux-ci avaient les moyens de survivre

de l'autre côté de l'éboulis...

En replaçant ce film dans le contexte cinématographique britannique de l'époque, force est de constater qu'il est assez étonnant d'y trouver des scènes assez "craspecs", en témoigne ce long travelling horizontal circulaire,

nous présentant des corps suspendus dans le "garde-manger" de ces êtres ayant évolués d'une manière peu conventionnelle (fort probable qu'il s'agisse de consanguins, même si le film ne le mentionne a aucun moment...),

rappelant plus le côté "craspec" de Deranged, Confession of a Necrophile (sorti l'année précédente) que n'importe quels films estampillés Hammer !

La caractérisation de ces "Homos Cavernicolus" les dépeints plus comme étant des êtres tragiques doués de sentiments que des monstres anthropophages, ainsi qu'ils furent décrits dans d'autres films traitant d'un sujet similaire (la tribu de Pluto dans The Hill Have Eyes ou les créatures de The Descent). D'ailleurs, Death Line est leur ancêtre commun...

En témoigne la scène où la compagne de l'"Homme" meurt sans pouvoir libérer son nouveau-né de ses entrailles et où celui-ci - faute de savoir parler - hurle son désespoir dans la station abandonnée, l'écho étant sa seule réponse...
On peut donc dire que c'est une des romances les plus étranges et poignantes (car il devient de par ce fait, l'unique survivant de sa "tribu", ce qui doit être une horrible chose à encaisser!).

le personnage interprété par feu Pleasence amène une touche d'humour sardonique qui sied bien à l'ensemble.
Il est à noter que la scène dans le bar a été improvisée par Pleasence et Rossington qui étaient fins saoûls, donnant ainsi un côté naturaliste à l'ensemble.

Quant à l'interprète de The Man, c'est un excellent Hugh Amstrong qui lui donne corps, remplaçant au pied levé un Marlon Brando prévu de longue date (mais qui dût se désister au dernier moment, son fils ayant attrapé une pneumonie). Amstrong amène une large palette d'émotion avec uniquement des grognements

(exceptée la fameuse phrase "Mind the doors", soit "Attention aux portes")

et expressions faciales suffisamment explicites.

En résumé, un film brut de décoffrage, sans jump-scare ni scène gore/tripaille inhérentes à ce sous-genre.
Mais Death Line n'est pas vraiment un film d'horreur, mais une sorte de constat social amer sur les laissés-pour-compte qu'on ne regarde même plus, car ceux-ci se fondent dans le paysage de par l'indifférence générale qu'ils suscitent.

Le premier long de Gary Sherman (qui livrera le très bon Dead and Buried avant de s'enfoncer en dirigeant plus tard Rutger Hauer dans le minable Wanted: Dead or Alive et une Heather O'Rourke agonisante dans l'opportuniste Poltergeist III) est de fait plus une tragédie humaine qu'un énième film traitant de l'anthropophagie.

Si l'on arrive à faire abstraction de son côté so British (soit froid et languissant), Death Line mérite à coup sûr une vision plus approfondie...

Une curiosité made in England...

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le 11 juin 2016

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The Lizard King

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