Les gangsters n'ont de cesse de fasciner. Mauvais bougres par excellence, ils ont toujours été source d'adoration, que ce fût à l'époque de la Prohibition ou plus récemment, à en voir l'héritage de films comme Scarface, Il était une fois en Amérique, Le Parrain ou encore Les Affranchis. Mais voilà, comme tout phénomène, il faut une origine, une source où tous les grands réalisateurs des films cités ont pu puiser leur inspiration. Et il semblerait qu'avec Le Petit César, nous ayons une sérieuse piste.


Certes, il n'a pas fallu attendre l'arrivée du cinéma parlant pour parler de gangsters au cinéma. Des prémices sont arrivés très rapidement, notamment, pour ne citer qu'un exemple, dans le cinéma de D.W. Griffith avec Coeur d'Apache en 1912. Plus tard, toujours dans le cinéma muet, Josef von Sternberg réalisait en 1927 Les Nuits de Chicago, mettant en scène de nombreux codes du film de gangsters, et une fin qui a, sans nul doute, inspiré le Scarface d'Howard Hawks. Le titre original du film de von Sternberg était d'ailleurs "Underworld" , la désignation courante du monde des gangs lors de la Prohibition, signe de l'aspect fondateur du film. Mais c'est bien lors de l'émergence du parlant et au début des années 1930 que les gangsters vont envahir les écrans, et Little Caesar fut l'un des tous premiers.


Cet homme sans but, impétueux et imprévisible n'a pas encore de nom, mais il l'obtiendra rapidement. Le Petit César n'est d'ailleurs pas un surnom choisi au hasard, car c'est bien un homme plein d'ambition qui va se bâtir un immense empire sur le dos de ses adversaires et à coups de règlements de comptes. Cette histoire ne vous dit rien ? Sans aucun doute, elle a inspiré les futurs Scarface, mais aussi la plupart des films de gangsters. Car Le Petit César est le parfait prototype du film de gangsters, mettant en lumière un héros menaçant, imprévisible et charismatique, dans un univers impitoyable où la réussite peut rapidement faire basculer vers l'enfer et la mort.


Dans l'exécution, Le Petit César est un film court mais qui condense tous les codes du parfait film de gangsters. Si peu ont aujourd'hui le souvenir ou la connaissance de ce film, son spectre n'a de cesse de planer au-dessus de tous ses successeurs. Et cet héritage, il le doit sans le moindre doute à la prestation irréprochable d'Edward G. Robinson, au regard foudroyant, incarnant à merveille cet homme prêt à tout pour réussir, qui ne laissera aucun obstacle le freiner, quitte à tuer sans le moindre remords. Avant Paul Muni dans Scarface, un an plus tard, il dresse le portrait de ces hommes à la fois redoutés et adulés, qui semaient la terreur à une époque prise en tenaille entre le relâchement des mœurs et la pression des forces de l'ordre provoquée par la Prohibition.


Le Petit César est un immanquable pour tout amateur de films de gangsters et, en dépit de son allure modeste, est un film qui fait date dans l'histoire du cinéma. Il n'est certes pas le tout premier parlant sur les gangsters, mais par sa qualité le constat est simple. Il fait partie d'une sorte de Sainte Trinité du film de gangsters : Les Nuits de Chicago imaginait et suggérait les codes du genre, Le Petit César les applique, les adapte au parlant et les affirme, et Scarface les popularisait définitivement. Dans tous les cas, je ne me lasserai jamais de ces histoires toujours aussi passionnantes, et Le Petit César fait définitivement partie des références en la matière.

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le 2 févr. 2018

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