Navré pour cette phrase d'accroche en guise de titre mais il y a quelque chose qui me percute beaucoup dans ce film.

Comme la plupart, j'ai regardé ce film une bonne centaine de fois quand j'étais petit (donc dire que j'adorais ce film serait un euphémisme). Je lui ai mis 10 direct quand je me suis inscrit sur Sens Critique... comme une sorte de réflexe où la nostalgie opère principalement. Mais voilà... je l'ai revu hier du haut d'une bonne trentaine bien entamée... et j'ai pleuré, crié de rire et exulté de joie à la fin comme quand j'avais 5 ans. BORDEL... CE FILM N'A PAS VIEILLIT D'IOTA.

Et le revoir m'a convaincu de me refaire une rétrospective des films de Don Bluth car les thématiques et la technique d'animation des films dont je me souviens de lui (Le Secret de NIMH, Titan A.E, Fievel et Anastasia) sont à des années lumières en terme de traitement de ce petit concurrent qui me parait de plus en plus surestimé à mesure que les années passent et qu'on appelle Disney.

Mais voilà, Le Petit Dinosaure et la Vallée des merveilles est le genre de film qui mettrait la pâté à deux des films les plus célèbres de son concurrent... à savoir Bambi et Dumbo. Vous l'aurez bien compris ces trois films ont ceci de commun de parler de l'enfant qui perd sa mère (ça me fait pleurer rien que de l'écrire). Et je n'avais pas le souvenir que le film de Don Bluth insistait avec autant d'aplomb sur le deuil et de l'apparente insurmontabilité de la tâche pour l'enfant de tourner la page.

Le film est dur... très dur car il appuie sur toutes les phases de cette épreuve.

- Le décès.

- La surdité à la raison la plus élémentaire (le discours rhétorique et sage d'un vieux dinosaure qui vient consoler Petit Pied qui préfère se morfondre)

- L'envie de se laisser mourir (la scène où Petit Pied cesse littéralement de se nourrir).

- Le déni (la scène de l'ombre... mon dieu j'en pleure rien que de repenser à ce court instant.)

Et si t'avais pas compris que Petit Pied est triste d'avoir perdu sa mère... tu as droit à une scène où le gamin préfère aller dormir seul les yeux grand ouverts de lassitude plutôt qu'avec ses nouveaux amis... qui viennent le rejoindre l'un après l'autre (meilleure scène du film).

Le film insiste et martèle la tragédie avec une insistance qui pourrait ressembler à une torture pour le glandes lacrymales (avec la magnifique musique de James Horner qui en refout une couche)... mais en fait je me rend compte qu'il n'en est que plus brillant car j'ai rarement vu un film parler aussi bien de la mort... et à des enfants qui plus est (car n'oublions pas que c'est un film pour enfant).

Et le plus dingue, c'est cet environnement cauchemardesque dans lequel Petit Pied et ses amis vont devoir survivre. Cette Terre boueuse et pluvieuse ou alors aride et rocailleuse... le vert (la couleur de l'espoir) est très peu présent dans ce film. La couleur n'est pas totalement absente : l'étoile d'arbre (évidemment) et la verdure des végétaux... symbole d'une nature nourricière. Mais ce qui est encore plus fort (et encore plus brillant)... c'est que l'irruption la plus affirmée de cette couleur dans le film survient lorsque Becky entre en scène. LE PERSONNAGE LE PLUS POSITIF DU GROUPE.

Car Becky, c'est elle la vraie héroïne du film. Elle est la "Sam Gamegie" et la "Gandalf" (réunies) de cette aventure.

C'est elle qui remet le sourire sur le visage de Petit Pied (peut-être la tache la plus difficile du film).

C'est elle qui motive Pétri de voler et de surmonter sa peur de tomber.

C'est elle qui prend le rôle de véritable grande sœur pour Pointu.

La grande Vallée, c'est la destination et l'espoir des jours meilleurs. Mais Becky, c'est elle le moteur et le ciment du groupe... parce qu'avec une personnalité comme Céra, l'esprit d'équipe n'aurait pas fait long feu.

Le film a ceci de fort qu'il plonge vraiment le (jeune) spectateur dans le désespoir le plus complet (en insistant bien dessus)... mais qu'il retrousse ses manches pour vraiment inverser la tendance et montrer que l'union fait la force alors que tout l'environnement respire la mort et la désolation.

Le film met également les potards de la peur à son maximum. Dent Tranchante est à ce niveau là un méchant d'une efficacité redoutable (je me souviens que l'une de ses premières scènes où il renifle le sol à la recherche de Petit Pied et Céra me terrifiait quand j'étais petit). Il a ceci de fort qu'il est fidèle à sa nature de carnivore. Il n'est pas spécifiquement méchant : c'est un monstre dans sa forme la plus authentique qui survit lui-aussi dans une nature implacable.

Ce film ne fait pas de politique. Rien ne s'arrange à cause de l'argent ou la célébrité (#dumbo). Rien ne s'arrange par la vengeance ou la justice (#roilion). Rien ne s'arrange par le fait de devenir adulte et de conquérir le cœur d'une femme (#bambi)

Petit Pied et ses amis s'en sortent ensemble car seuls, ils seraient morts. Le Petit Dinosaure et la Vallée des merveilles parle du principe le plus élémentaire qui soit : la survie qui se doit à l'entraide, l'entraide qui se doit à l'amitié et l'empathie.


Et ajouté à cela ce narrateur contant l'histoire avec une sagesse narrative d'une si belle simplicité.

"Les seuls survivants de son troupeau étaient sa mère, sa grand-mère et son grand-père. Il les reconnaissait avec les yeux, le nez et à leur amour. Il croyait qu'ils seraient ensemble pour toujours."

Et le plus grandiose avec ce narrateur, c'est qu'il se tait également quand il faut. Je pense à la scène où le groupe d'ami s'endort dans une chorégraphie silencieuse (si on exclue les ronflements).

Que voulez-vous... ce film est beau, tout le temps et n'embellit pas un seul instant la soif d'aventure, car cette aventure est dure, triste mais formatrice aux pires tumultes qu'il est naturel de connaitre.

Pour un film de 69 minutes... moi j'appelle une masterpiece.

Zefurin
10
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Créée

le 4 avr. 2024

Modifiée

le 4 avr. 2024

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Zefurin

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Le Petit Dinosaure et la Vallée des merveilles
Fab
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