Julien Sorel, jeune homme issu du peuple, beau et arriviste, devenu précepteur dans l’aristocratie (Gérard Philipe) sous le règne de Charles X et Louis-Philippe, est jugé pour la tentative d’assassinat sur la personne de la mère de l’un de ses élèves, Madame de Rênal, châtelaine franc-comtoise pieuse (Danielle Darrieux), qu’il est également suspecté d’avoir séduite. Son procès en assises devient l’occasion de se remémorer son passé, de son ascension à sa chute finale. Fils de charpentier franc-comtois, de sympathie bonapartiste, il est employé chez les Rênal et doit dissimuler, voire abjurer, ses anciennes sympathies politiques. Il en arrive à être fort apprécié de ses employeurs, au point de vivre une relation platonique avec la maîtresse des lieux qui refuse de se livrer à lui. De peur du scandale, il préfère s’éloigner et part contribuer à l’éducation de la fille d’un Pair de France, à Paris. Cette nouvelle protégée finit également par s’éprendre de lui. Aussi, par dépit, s’apprête-t-il à tirer sur Madame de Rênal, à la sortie de la messe, ce pour quoi il est condamné à la prison.
Ce film, certes fort académique, traite bien des relations sociales et des difficultés d’aimer entre personnes issus de milieux distincts.
A toute époque, il reste difficile d’aimer entre deux personnes venant de deux conditions sociales différentes. Les amours contrariées peuplent densément la littérature, romanesque ou théâtrale. Stendhal innove par l’introduction d’un autre élément, la volonté d’ascension sociale et de reconnaissance d’un plébéien arriviste, aussi volontaire que désireux de plaire également sur le plan sentimental. Aussi finit-il par se prêter au jeu, au point de se lier d’affection pour ces deux femmes si différentes qui tombent dans ses filets, Madame de Rênal et Mathilde de la Môle. Il finit donc par se perdre quelque peu à son propre jeu, et cette faiblesse de sincérité lui vaut le pardon de ces dernières qui lui rendent visite en prison, après sa condamnation.
Le film reste fidèle au roman, tout en gardant un ton relativement compassé. Il y est montré la lumière de l’ascension sociale tant espérée et l’ombre du procès et de l’emprisonnement. De grands acteurs viennent porter cette adaptation, exercice inévitablement casse-gueule a priori quand l’œuvre originelle reste aussi présente dans les esprits. Le résultat s’avère réussi par une mise en scène qui demeure assez dynamique, ce que permet le flash-back, inexistant dans le roman, et par une distribution solide.

Créée

le 19 juin 2018

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