"Le Train" est un film tourné par John Frankenheimer en 1964. C'est un film de guerre relatant une action menée par la Résistance française pour empêcher que des tableaux de maîtres partent, en train, vers l'Allemagne à quelques jours de la Libération.
D'après ce que j'ai lu, c'est une œuvre quasiment fictive (il y a eu un train dit d'Aulnay mais qui en fait n'est jamais parti)
En première lecture, le film est construit comme un film d'action avec des moments très spectaculaires et un suspense plutôt efficace. J'en veux pour preuve que ce film que je connais très bien l'avoir vu assez souvent m'accroche toujours et me tient en haleine jusqu'au bout. Maintenant, je passe plus de temps à apprécier le jeu des acteurs, tous excellents.
En deuxième lecture, ce film est bien plus profond qu'il n'en a l'air : en effet, se pose la question du prix à payer pour sauver le (un) patrimoine national. Et quand on fait les comptes, la facture est plutôt salée en vies humaines, côté français notamment.
Deux réponses vont être apportées.
L'une par Albert Rémy qui se bat pour des œuvres qu'il ne connait pas : "faudra quand même, après la guerre, qu'on aille voir ces tableaux pour voir à quoi ils ressemblent".
L'autre par le colonel allemand (Von Waldheim qui me fait irrésistiblement penser à Kurt Waldheim, ancien secrétaire général de l'ONU - rien à voir sûrement) qui apostrophe Burt Lancaster en lui crachant tout son mépris d'homme "raffiné et instruit" face à une "brute tout en muscle" qui se bat pour quelque chose qu'il est bien incapable d'apprécier.
Dans les deux cas, on se battra ou par principe pour sauvegarder un patrimoine ou bien pour réserver les œuvres d'art à une élite.
Mais je voudrais m'attarder un peu sur le personnage joué par une extraordinaire Suzanne Flon, Melle Villard. Elle est le conservateur du musée du Jeu de Paume où sont stockées/exposées toutes les toiles de maîtres impressionnistes ou modernes. Avant le générique, elle est plutôt respectueuse et amicale ave le Colonel Von Waldheim en qui elle reconnait un connaisseur et défenseur de toutes ces œuvres pourtant classées comme art dégénéré par l'ordre nazi. Jusqu'à ce qu'elle comprenne que sa dernière visite n' a pour but que de profiter de la panique général pour se les approprier. Elle est mise en contact avec la Résistance (Lancaster, A. Remy, etc ...) dans une scène, pour moi d'anthologie, où avec sa petite voix pleine de douceur, elle va convaincre un à un les grosses brutes (pardon, pour les cheminots...) qui l'écoutent poliment et qui réagissent avec leurs tripes. Si elle ne les convainc pas sur le moment, elle instille une "idée" dans les têtes des résistants. Idée qui fera son chemin. On voit peu à peu le cheminement de cette "idée". Scène magnifique.
Un autre personnage intéressant est celui de l'aubergiste jouée par Jeanne Moreau pleine de désillusions et qui a déjà payé un lourd tribut à la guerre et à la folie des hommes. Et c'est touchant de voir Lancaster, qui au début du film, est très sceptique sur le bien fondé de l'action qu'on lui demande d'exécuter, tenter de convaincre Jeanne Moreau qu'il existe des valeurs supérieures à la vie humaine susceptibles de justifier qu'on se sacrifie. Le regard, jusque là, morne de Jeanne Moreau à cet instant est splendide car il s'éclaire.
Pour finir, le personnage joué par Michel Simon est un personnage aigri, qui aime son boulot avec passion, qui ne fait pas partie d'un réseau de Résistance mais adopte une position de principe vis-à-vis des allemands qui peut se révéler contre-productive. C'est un personnage émouvant qui donnera le ton au reste du film.
En prime, dans ce film, les magnifiques portraits de locomotives à vapeur ...