Ma quête de revoir les films de Miyazaki de mon enfance se poursuivant, je me suis lancé, encore une fois un peu à contrecœur, dans son film le plus connu. Quelle n'a pas été ma surprise (encore! je devrais peut-être me rendre à l'évidence), quand j'ai non seulement apprécié le film, mais en plus sur la base d'une lecture, d'autant que je sache, peu répandue. Suis-je obsédé par le capitalisme? C'est possible. Mais quand je vois la sorcière compter ses pierres précieuses, les travailleurs se battre pour une pépite, la grève des boules de suif, le sans-visage (qui représente le Japon moderne d'après Miyazaki lui-même), sans identité, sans voix, sans attache qui se gave avant de se trouver dans l'artisanat, la fausse conscience raciste envers Chihiro, l'aliénation par la perte du prénom, je ne peux m'empêcher de voir là une attaque féroce envers le capitalisme et tout ses rejetons postmodernes assoiffés de produits à consommer.
Mais du coup, je me rends compte que j'aime beaucoup cet aspect du film, et qu'il y en a d'autres que j'aime beaucoup moins. Des bains tenus par des grenouilles, ca fait quand même moins d'effet qu'une île qui vole gardé par des robots à l'allure grotesque. Je ne parle pas de "rêver", mais de cette espèce de nostalgie pour quelque chose qu'on a pas connu, dont on perçoit une valeur intemporelle, je parle de l'ingéniosité perdue dans le temps, des ruines muettes, de la tragédie de l'Histoire.
L'histoire d'amour un peu gênante entre les deux protagonistes est juste... là. On ne sent pas d'atomes crochus, on ne ressent pas grand chose, si ce n'est que le scénario serait bien emmerdé sans Haku. On aurait pu en faire des camarades de circonstance, le film aurait fonctionné sans un élément forcé sur lequel il n'a rien à dire.
Que dire de la fin, sinon qu'elle n'est pas méritée. On est supposés sympathiser avec cette idée que Chihiro se rend compte, par je ne sais quel moyen, de l'entourloupe? On arrive à la libération, qui devrait être une catharsis, et à la place... un pet. On a vu l'héroïne ne pas reconnaitre ses parents, et là d'un coup, parce qu'elle a fait un tour en train, hop c'est bon? Je n'arrive pas à suspendre mon incrédulité sur ce passage.
Pour moi, Miyazaki s'est égaré dans ses idées, il a voulu en faire trop, et il s'est démené pour se sortir des coins qu'il s'est lui même créés, alors qu'il tenait une trame forte.