Chasse aux sorcières – Jour 10

--- Bonsoir, voyageur égaré. Te voila arrivé sur une critique un peu particulière: celle-ci s'inscrit dans une étrange série mi-critique, mi-narrative, mi-expérience. Plus précisément, tu es là au dixième épisode de la cinquième saison. Si tu veux reprendre la série à sa saison 1, le sommaire est ici :
https://www.senscritique.com/liste/Vampire_s_new_groove/1407163
Et si tu préfère juste le sommaire de la saison en cours, il est là :
https://www.senscritique.com/liste/Secret_of_the_Witch/2727219
Et si tu ne veux rien de tout ça, je m'excuse pour les parties narratives de cette critique qui te sembleront bien inutiles...---


Cette année et pour la première fois, la Toussaint et Halloween n’étaient ni le point de départ ni la ligne d’arrivée du mois monstre. Je m’attristais un peu de cette configuration qui ne donnait pas toute son importance à ces deux dates-clefs, mais c’était sans compter sur cette sympathique pandémie mondiale qui a su re-donner toute leur symboliques à ces dates… Non seulement, célébrer la mort revêt un caractère tout particulier dans ce contexte lugubre, mais en plus un opportun re-confinement nationale a ôté à Halloween tout son festif, pour n’en garder que le macabre. Tout cela n’arrangeait guère ma chronologie, car me voici subitement coupée d’une partie de mes apports en film. Le plus qu’attendu Belladonna est relégué à un futur plus qu’incertain, tout comme Frankenstein et le monstre de l’enfer (à mon grand dam, j’avais réussi à faire rentrer au forceps la Hammer dans mon programme, et la destiné m’en prive…). Tout cela pour dire finalement que la Toussaint et Halloween ont été plus que funestes cette année, et que je les ai accompagnés sans m’en rendre compte, si ce n’est d’une terminaison du mois-monstre, au moins d’une sacré étape : les derniers films d’horreur avant un bon gros moment. Curieusement, les sorcières semblent avoir connu un tournant que je ne m’explique pas dans les années 80, disparaissant visiblement du film d’horreur, pour se retrouver à l’affiche dans des comédie, ou en apparition dans des films fantastiques. Comme si soudainement, les sorcières ne pouvaient plus faire peur… Nous partons donc pour un mois de novembre champêtre (au propre comme au figuré, je suis confinée en pleine cambrousse), gambadant dans les films de princesses et de dragons, ou volant sur le siège arrière de balais chevauchés par des sorcières déjantées. 
Et le film de ce soir semble en être l’illustration parfaite. Ridley Scott (oui.) et Tom Cruise (je vous jure), se rencontrent sur l’affiche du très curieux Legend, 1985. Imaginez donc : l’homme de Alien, braquant sa caméra sur celui de Rencontre avec un vampire, au beau milieu des années 80 ! Le résultat est brillant (mais peut-être plus au sens propre qu’au figuré cette fois-ci). Le film est dans la démesure la plus totale : il y a une belle princesse qui veut apprendre à parler le lapin, il y a Tarzan sauf qu’il est joué par Tom Cruise, il y a de la pluie qui se transforme en neige qui elle même se transforme en bulle de savon, il y a le « seigneur des ténèbres » mais en fait il a la tronche de Hellboy, il y a un enfant elfe qui peut générer des violons par le pouvoir du hors-champ et des faux-raccords, il y a des licornes qui courent au ralenti, il y a des assiettes qui brillent tellement fort qu’elles génèrent le cosmos (scientifiquement prouvé), et il y a, donc, entre autres, une sorcière verte qui surgit des marais (c’est donc théoriquement plutôt un mélange entre un zombie et la créature du lac, mais son nez crochu ne fait aucun doute quant à sa véritable nature). Caméo, donc, que ma sorcière de ce soir, sur laquelle je ne m’étendrai pas. Malgré l’apparente démesure du film, celui-ci ne verse pourtant pas dans le complètement con, et donc notre sorcière fait preuve d’un minimum d’esprit. Là où il aurait été facile de la faire tomber bêtement dans le piège cousu de fil blanc de notre héro sexy (c’est Tom Cruise. Non je ne m’en remet pas de le retrouver là), Ridley Scott (c’est Blade Runner. Non je ne m’en remet pas non plus) a l’habileté de la doter de suffisamment d’intelligence pour rendre la situation moins évidente, brouillant un minimum les sens du spectateur. Comme pour cette scène du début du film, où le héro trouve la réponse à la devinette, malgré tous les clichés auxquels on aurait pu s’attendre, et mettant son interrogateur au supplice face à ce revirement de situation ; notre sorcière elle aussi a le bon sens de ne pas tomber dans la tournure de scénario cliché et revue mille fois. Ridley Scott nous conte un conte, certes, et il l’habille de toutes les paillettes qui siéent à son rang, mais il sait renouveler le genre en nous proposant un scénario qui, dans l’ensemble va dans la même direction que n’importe quel autre conte, mais qui sait s’en échapper dans le détail pour quelques envolées géniales et surprenantes. Finalement, j’avais fini par tranché entre premier et second degré, sur cette phrase : « you’re a children of the forrest, and you don’t know the gump ? », jeu de mot honteux pensais-je, faisant une référence parfaitement inappropriée au film de Zemeckis. Mais une petite vérification chronologique m’a fait ravaler ma théorie : nous sommes en 1985, donc presque dix ans avant le film, et quoi qu’il en soit au moins un an avant le roman sur lequel celui-ci est adapté. C’est donc au mieux un éclair prémonitoire qui aura poussé Ridley Scott à écrire cette ligne de dialogue. Je ne sais donc toujours pas quoi choisir, si Ridley Scott rend hommage au conte ou si il s’en moque, si il fait une nouvelle démonstration de son génie, ou s’il se tourne lui-même en auto-dérision. Mais une chose est sure : Legend, quel que soit le degré de lecture auquel vous désirez le prendre, est au choix, soit un divertissement familial archi-classique mais efficace, soit une expérience hallucinatoire extrêmement cocasse et polie dans les moindre détails. Et dans les deux cas, on n’en sort qu’avec une affection plus grande pour le duo champion Scott-Cruise. Avec une petite touche de féminisme classique mais efficace pour parfaire le tout. Confinée oui, mais bien accompagnée…
Zalya
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le 4 nov. 2020

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