LES HUIT SALOPARDS (17,8) (Quentin Tarantino, USA, 2016, 168min)
Un formidable film somme, très cinéphile, une colossale pièce thâtrale, qui mélange les genres (western, thriller, politique..) racontant l'histoire de John Rutt dit le bourreau qui fait route en diligence en compagnie d'une prisonnière, Daisy Domergue l'amenant à Red Rock se faire pendre et pour toucher la prime. Quentin Tarantino nous plonge pour son huitième film dans les paysages enneigés et somptueux du Wyoming pour nous offrir une leçon de cinéma tournée en 70mm et en Ultra Panavision (une première depuis Ben Hur) qui offre une texture d'image sensationnelle et un choix très judicieux. Un film comprenant une ouverture de 5min et un entracte de 12 minutes old school, une séance comme jamais vu dans les salles françaises depuis des décennies. Un opéra crépusculaire décliné en chapitres, quasiment en huis clos pour revisiter l'histoire abrupte et impitoyable du Far West et ausculter l'Amérique actuelle avec un fond politique d'une densité imprévue. Le cinéaste donne une ampleur grandiose à cet enfermement et installe une première très longue partie très bavarde (trop longue et trop bavarde diront certains mais ne pas venir voir Tarantino alors...), où tous les dialogues sont absolument délectables, où les mensonges nous dévoilent petit à petit toutes les vérités, un Agatha Christie où chacun personnages avancent masqués, où chaque phrase du début résonnent implacablement lors du chapitre final...De ce huis clos parano (qui nous fait évidemment penser à The Thing de John Carpenter), où une simple mercerie par l'ingéniosité du metteur en scène devient en fait le territoire des Etats-Unis, où tous les enjeux finiront par éclater brutalement. Une maîtrise du cadre absolument époustouflante, un scénario épatant, retors et intime, une violence graphique sidérante, sans parler de la direction d'acteurs remarquable avec notamment en tête un Samuel L. Jackson (le commandant Warren) ineffable et délicieux, la révélation de l'excellent Walton Goggins (le shérif), Jennifer Jason Leigh totalement étonnante en prisonnière, Kurt Russel épatant en bourreau et l' épatant Tim Roth "le court sur pattes". Une œuvre sous tension porté par petites touches par la splendide, prenante et oppressante musique du Maestro Ennio Morricone qui accompagne nos frissons devant ce spectacle étourdissant. Une claque cinématographique qui convoque aussi bien "Evil Dead" de Sam Raimi, que le singulier et admirable western "La chevauchée des bannis" d'André de Toth, le cinéma de John Ford et des clins d'œil à sa propre filmographie (Reservoir Dogs, Inglourious Basterds...).Venez vous frotter et affronter "Les Huit Salopards" ! Un tableau très sombre de l'Amérique, qui s'impose déjà comme un classique et déjà culte...Exigeant, éblouissant, implacable et sacrément jubilatoire ! Quentin Tarantino ou la fête permanente du cinéma...

seb2046
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le 22 sept. 2016

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